C’est un travail titanesque, entrepris par Michel Caen et Nicolas Stanzick en 2011, qui vient d’être achevé en décembre 2021 avec la réédition intégrale et augmentée de la mythique revue du cinéma fantastique des années 1960. Une superbe collection de 24 numéros (de 1962 à 1971), plus deux inédits, en quatre volumes1. Le résultat est bluffant et il aura fallu dix ans et une patience de moine pour maquetter, scanner et relire cette somme de documents. Il faut également saluer la maison d’édition Rouge Profond2 pour cette entreprise périlleuse.
Midi-Minuit Fantastique (MMF) est une publication inclassable. Une formidable aventure à la fois ludique et exigeante, foisonnante et avant-gardiste. Son ton est libertaire, ses racines sont populaires, ses inspirations surréalistes. Véritable ovni en marge du cinéma officiel de l’époque, MMF a exposé le fantastique et l’érotisme, le sang et le sexe comme contre-culture subversive et underground. La revue a aussi contribué à l’émergence d’une cinéphilie de genre et de séries B en pleine période de la Nouvelle Vague française3 !
Les textes avisés, d’une grande qualité littéraire, témoignent de la modernité de MMF alors enfermé dans un cinéma de genre méprisé par l’élite.La présence d’Eric Losfeld, ami proche d’André Breton, a été décisive dans l’édition de la revue qui est la première en Europe à être consacrée au cinéma de genre. C’est à lui que l’on doit la participation ponctuelle d’auteurs qu’il avait édités comme Ionesco, Topor ou Pieyre de Mandriargues.
Ce qui est fascinant est l’analyse des motifs fantastiques par auteurs et par thématiques. Par exemple : Terence Fisher, Mario Bava, Roger Corman, Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack, sont analysés à travers le motif du château, du héros noir, de la pathologie sexuelle, etc.
Il y a également de judicieuses « mises en perspective » avec :
– Le portrait de Dorian Gray (Lewin, 1945) / Horror of Dracula (Fisher, 1958)
– La nuit du Loup-Garou (Fisher, 1958) / La Belle et la Bête (Cocteau, 1946)
– Jehanne d’Alcy sur une balancelle (Méliès) / Femme fleur lunaire des Aventures Fantastiques du Baron de Munchhausen (Baki, 1943)
– King Kong (Cooper – Schoedsack, 1933) / Les voyages de Gulliver (Jonathan Swift, 1721)
Ce qui frappe est la remarquable iconographie de l’ouvrage. Les photos d’époque avaient un aspect délibérément fantastique et érotique, faisant la part belle aux actrices. MMF s’est toujours intéressé aux femmes victimes ou cruelles (avec comme figure de proue l’actrice Barbara Steele). Il y avait une vraie dramaturgie des cahiers photos, une forme de mise en scène passant d’une photo à une autre, permettant de « rêver » le film dans sa tête et de continuer ou non la fiction.
Pour la petite histoire, c’est la salle de cinéma des Grands Boulevards à Paris : le Midi-Minuit qui a donné son nom à la revue. Et c’est grâce à Michel Caen que MMF est né en mai 1962. Caen a alors vingt ans et son envie est de mettre en avant toute l’actualité d’un cinéma de genre et de la « contre-culture ». Il assure dès lors la co-rédaction en chef pendant dix ans. MMF a cristallisé une tendance qui s’exprimait sporadiquement depuis les années 1950 grâce, entre autre, à Jean Boullet et Boris Vian et leur revue Saint-Cinéma-des-Prés. Midi-Minuit Fantastique a su saisir en temps réel un certain âge d’or du cinéma de genre, mettant à l’honneur La Hammer, le gothique italien, la naissance du Giallo et l’épouvante américaine.
La revue n’a pas pour but de défendre un cinéma de genre, mais plutôt d’en faire son actualité brûlante, comme pour Terence Fisher avec la Hammer qui faisait un cinéma totalement nouveau en Technicolor, reprenant les figures du Studio Universal en les transfigurant dans un univers érotique et sanglant. Pour les auteurs, le fantastique est l’autre nom de l’érotisme.
MMF est comme une traversée du miroir. La revue donne le sentiment de lire le récit d’aventures cinéphiles au diapason de celles racontées à l’écran. Elle est porteuse d’une érudition, d’une manière de vivre le fantastique de façon éclectique, faisant la place à la littérature, aux beaux-arts, aux arts graphiques, à la BD, à la mode, à la magie… avec une généreuse curiosité.
AU PROGRAMME (sélection)
MMF 1 : Terence Fisher. Galerie de monstres (Frankenstein, Dracula, la Momie, le Loup-Garou…). Horror of Dracula, Les vamps au cinéma (mythes, femmes papillons, femmes fleurs, vampires, sorcières, femmes robots, femmes araignées, sirènes, femme sphinx, fées, freaks, géantes, femmes à trois têtes, femmes panthères, etc.). Le Masque du Démon (Bava, 1960), La Marque du Vampire (Browning, 1935). Spécial King Kong (entretien avec Merian C. Cooper, focus sur le travail d’animation de Willis O’Brien avec des dessins préparatoires, photos, affiches et trucages expliqués). Fantasmagorie (Molinard,1963). Spécial Dracula (avec notamment un étonnant roman-photo du film de Tod Browning avec Bela Lugosi). The Most Dangerous Game de Pichel – Schoedsack, 1932 (photogrammes inédits et filmographie de Schoedsack). Ray Harryhaussen, Dr Cyclop de Cooper – Schoedsack, 1940 (un chef-d’œuvre oublié).
MMF 2 : Entretien fleuve avec Ricardo Freda (L’effroyable Secret du Dr Hichcock, 1962), Entretien avec Barbara Steele (trente pages avec des photos inédites), Entretien avec Mario Bava, Terence Fisher et Roger Corman. Judex (Franju, 1963). Peeping Tom (Powell, 1960). Danse Macabre (Margheriti, 1964). Dracula de Jean Boullet, 1963 (flashback de Nicolas Stanzick avec de superbes photogrammes d’ombres chinoises). Peter Lore et ses différents visages de méchants (M, Le Faucon Maltais, Le Corbeau, Les mains d’Orlac…). Filmographie de William Castle, le pape de la série B.
MMF 3 : Entretiens avec Jacques Tourneur, Edgar G. Ulmer, Roger Corman, Christopher Lee, Karel Zeman et Barbara Steele (trente pages avec photos). Fu Manchu à l’écran. Six femmes pour l’assassin de Mario Bava, 1964 (critique et photos). Le mystère Bricolo, le film retrouvé de Charley Bowers.
MMF 4 : Entretiens avec Michael Powell, Seijun Suzuki, Koji Wakamatsu, Roman Polanski, Ishiro Honda, Barbara Steele, Salvador Dali, Stanley Kubrick, Jesus Franco, Paul Morissey. Etudes littéraires majeures sur Gaston Leroux, l’initiateur du roman policier fantastique. Reportage photo sur Johnny Eck, la star du film Freaks de Tod Browning. Hommage à Jean Rollin. Œuvre graphique de Christian Broutin. Retours sur Haxan, la sorcellerie à travers les âges (Christensen, 1922), Vampyr (Dreyer, 1932), La fiancée de Frankenstein (Whale, 1936), I Walked with a Zombie (Tourneur, 1943), The Body Snatcher (Wise, 1945), Invasion of the Body Snatchers (Siegel, 1956). Solo (Mocky, 1970). THX (Lucas, 1971). Les lèvres rouges (Kumel, 1971).
LES SEANCES DE MIDI-MINUIT
Chaque volume est accompagné d’un DVD exclusif4 rempli de courts-métrages francophones inédits (souvent sans paroles) qui montrent l’étonnant foisonnement du cinéma de genre dans la fiction française, cantonnée alors au seul Georges Franju (La tête contre les murs, Les yeux sans visage, Judex). Voici quelques-unes de ces pépites.
Fantasmagorie de Patrice Molinard (1963) fait partie des raretés visibles sur le DVD du volume 2, invisible et ignoré depuis cinquante ans. Un film de vampire avec Édith Scob en croqueuse d’enfants errant dans une poétique Transylvanie val-d’oisienne, filmée par le génial photographe du Sang des bêtes. D’une beauté expressionniste à couper le souffle et d’une audace formelle constante, le film s’impose comme un écho déformé de Nosferatu et de Vampyr. Un moyen-métrage envoûtant et précieux, un poème d’ombres et de lumières dans le cinéma fantastique français. Molinard synthétise et radicalise la composition visuelle héritée de Franju en accentuant la dimension surnaturelle et onirique. Le fantastique naît directement des paysages, des cadres, de l’emplacement et des déplacements des personnages. Edith Scob, icône des Yeux sans visage de Franju, offre sa présence diaphane, charnelle et fantomatique comme une apparition qui aimante la pellicule et le regard. La phrase d’André Breton prend ici tout son sens : « Ce qu’il y a de formidable avec le fantastique, c’est qu’il n’y a plus de fantastique. Il n’y a que le réel. »
Dracula de Jean Boullet (1963) fait partie de l’événement visible sur le DVD du volume 3. Le plus mythique des films midi-minuistes ! Peu après sa rupture avec MMF fin 1962, Jean Boullet se lance dans le projet fou d’une adaptation en ombres chinoises de Dracula. Entouré de Philippe Druillet et de Boris Bergman, qui font là leurs premiers pas artistiques, il va donner corps, deux ans durant, à sa vision toute personnelle du mythe, entre fascination pour l’homo-érotisme, désir de renouer avec la préhistoire du cinéma et identification manifeste à son héros. En résultent des images sublimes, parfois dans l’héritage de Cocteau, et qui toujours tiennent de l’invocation magique. Le film restera inachevé mais est livré ici, pour la première fois, un montage des rushs ayant survécu.
Boullet donna des séances de théâtre d’ombre dès 1949 à la Cinémathèque Henri Langlois. Depuis longtemps, il a le projet de monter un Dracula (dont il est un spécialiste) en ombres chinoises. Il travaille comme un artisan, à la manière du XIXe siècle, avec une vitre, un décor et la caméra placée devant pour retrouver l’essence d’un cinéma primitif, évocateur par son pouvoir d’incantation expressionniste. C’est à partir de ce projet que Boullet a commencé à s’identifier à son personnage de Dracula en pratiquant la chirurgie esthétique. Il sombra vite dans la psychose. Le film fut arrêté à l’état de rush…
Insomnie de Pierre Étaix (1963), visible sur le DVD du volume 4 (et présenté pour la première fois), est l’unique excursion du clown-cinéaste dans le cinéma fantastique. C’est un hommage au genre qu’il aimait tant, notamment le Dracula de Terence Fisher. L’image est parfaitement travaillée avec une photo bleutée superbe pour le récit vampirique. Le montage est constamment audacieux. Le script est savoureux et laisse place à l’épouvante, l’humour et les gags visuels avec une subtilité n’appartenant qu’à l’auteur de Yoyo. On pense notamment à la séquence de l’image retournée pour cause de lecture à l’envers, ou au visage verdâtre de la femme provoqué par le motif d’un abat-jour mal tourné (renvoyant étonnamment aux expérimentations chromatiques de Mario Bava, la même année, dans Les trois visages de la peur).
Eves futures de Jacques Baratier (1964), visible sur le DVD du volume 4, décline la figure du mannequin et de la société de consommation en fleurtant avec le fantastique entre chair et plastique, matière inerte et matière vivante, sur une musique envoûtante de Georges Delerue. Ce court-métrage anticipe de façon spectaculaire l’univers artificiel de David Lynch (Mulholland Drive) reprenant le motif final du Killer’s Kiss de Kubrick (1955) et de sa fabrique de mannequin. Comme le dit son auteur : « nous ne sommes rien, tout n’est qu’illusion. »
La brûlure de mille soleils de Pierre Kast (1965), visible sur le DVD du volume 3, est un film d’animation expérimental troublant de poésie. Ardent défenseur de l’idée d’un cinéma de SF français dès les années 1950, Pierre Kast livre une somptueuse variation interstellaire sur la tragédie de Bérénice. L’auteur puise dans une série de quatre cents dessins commandés à Eduardo Luiz la matière d’un film conçu comme une bande dessinée, limitant l’animation au minimum. Son modèle avoué : Le Jetée de Chris Marker (ce dernier étant d’ailleurs le monteur du film).
L’Homme aux chats d’Henri Glaser (1969), visible sur le DVD du volume 3, n’est jamais cité dans MMF. Son réalisateur, Henri Glaeser, n’appartient pas aux cercles midi-minuistes. Et pourtant, le filma tout à voir avec cette veine de l’étrange qui travaille de manière souterraine le cinéma français durant les années 1960. Le film est une plongée vertigineuse dans la solitude et la folie d’un homme. L’angoisse, le malaise, le scabreux potentiel des situations suintent du non-dit permanent. Comme chez Georges Franju, le vernis du réel ne cesse de se craqueler pour laisser entrevoir un monde de terreur insoupçonné. Résolument insolite et bénéficiant d’une production ample, ce coup de maître a été sélectionné au Festival de Cannes en 1969.
Ténèbres de Claude Loubarie (1971), visible sur le DVD du volume 3, est un véritable ovni au sein du midi-minuisme sur grand écran, un film stupéfiant dans le contexte français, et une œuvre en avance de dix ans sur le fantastique transalpin de Lucio Fulci ! Animateur du ciné-club Midi-Minuit II à Lyon, et proche un temps de Michel Caen, Claude Loubarie reste l’une des figures les plus énigmatiques du mouvement. D’une santé mentale fragile, disait-il la vérité lorsqu’il exhibait des lettres d’Hitchcock clamant avoir aimé son film au point, peut-être, de le faire distribuer en ouverture de Frenzy ? Décédé d’un suicide peu de temps après avoir souffert de délires de persécutions extraterrestres, Loubarie a peut-être finalement livré ici une sorte de cauchemar autobiographique : le récit d’un homme inexorablement happé par un au-delà de zombies putréfiés… Expressionniste, gore et expérimental.
Il y a aussi toute une série de documentaires passionnants. Le DVD du volume 1 regroupe trois documentaires marquants :
– Le cinéma fantastique (1968), avec les interventions de Georges Franju, Michel Caen, Roman Polanski et Barbara Steele.
– Quelle horreur mon seigneur Dracula (1969), sur la figure mythique de Dracula.
– Les monstres (1969). Une interview de Jean Boullet avec la figure tutélaire du Freaks de Tod Browning.
Jean Boullet, le Montreur d’ombres (2018), visible sur le DVD du volume 3, retrace la carrière chaotique de cet illustrateur, critique d’art et collectionneur d’objets étranges. Jean Boullet (1921-1970) était un provocateur anticonformiste en rupture avec le bon goût qui aimait et défendait ce qui était considéré comme de la sous-culture. Parmi ses centres d’intérêt : le bizarre, le baroque, les nains, les infirmes, le fantastique et la magie. Ce fut également un amateur et un passionné de prestidigitation, proche de Maurice Saltano et Monique Dorian. Il publia notamment des articles et des illustrations dans la revues Le Magicien. Il avait aussi réalisé un énorme ouvrage sur les grandes illusions qu’il ne publia jamais… Il fut le secrétaire de Sacha Guitry, l’ami de Jean Cocteau, Boris Vian et Kenneth Anger.
Le DVD du volume 4 se conclut par un réjouissant MMF par les midi-minuistes (2021) qui retrace l’aventure MMF de sa création à sa disparition avec les interventions de Michel Caen, Geneviève Colange-Caen, Georges Lenglet, Gérard Lenne, Roland Lethem, Raphaël-G. Marongiu, Gilles Menegaldo, Jean-Claude Romer et Noël Simsolo.
Magie, cinéma et trucages
Depuis l’origine du cinématographe, la prestidigitation est liée au 7ème art de par les inventions du pré-cinéma et ses diffuseurs en la personne du magicien. Méliès a achevé cette fusion par des trucages manuels, mécaniques et chimiques en intégrant la manipulation, le boniment, la misdirection et l’illusionnisme pour créer de nouveaux effets typiquement cinématographiques appelés « effets spéciaux ». Le cinéma de genre et plus particulièrement le fantastique, la science-fiction, l’horreur, l’épouvante et le gothique, sont les vecteurs privilégiés des trucages et de l’illusion.
Toutes une pratique de compétences sont déployées pour le trucage : le maquillage et le grimage (Nosferatu, Frankenstein…), la marionnettes et le stop motion (King Kong…), Les maquettes et le changement d’échelle (Dr Cyclop, L’homme qui rétrécit, Les poupées du Diable…) Jean Cocteau sera un fervent adepte des trucages cinématographiques pour mettre en images ses poèmes surréalistes que sont Le sang d’un poète, Orphée ou La Belle et la bête.
Tout comme en prestidigitation, le cinéma fantastique possède ses propres effets pour rendre compte de situations extraordinaires. Les trucages et autres effets spéciaux peuvent être mécaniques ou numériques et ils répondent tous à une classification, par famille, que l’on peut comparer à celle du magicien américain Winston Freer pour la pratique de l’illusionnisme (production, disparition, transformation, changement de taille et de couleur, lévitation, etc.) A savoir que dans le cinéma fantastique, il y a une famille qui se détache plus que les autres : la transformation.
Mythologie et figures du fantastique
La mythologie gréco-romaine est riche en créatures fantastiques qui donnent lieu à des récits épiques : Jason et les Argonautes, Le 7ème voyage de Sinbad, The Gorgon, Le choc des Titans (tous adaptés au cinéma). Par ailleurs, beaucoup de créatures sont l’objet de croyances passées et actuelles issues de légendes ou du folklore populaire, suivant l’imaginaire et les religions de différentes cultures.
Les précurseurs du fantastique cinématographique se nomment Etienne-Gaspard Robertson (au XVIIIe siècle) et John Henry Pepper (au XIXe siècle). Ils ont tous les deux mis au point des installations scénographiques dans le but de produire et de convoquer tout un tas de monstres, fantômes, chimères et revenants en tout genre…
Les phénomènes de foire appelés Freaks, visibles dans les foires et fêtes foraines du XIXe siècle, ont participé à l’imaginaire fantastique de ses figures et de ses créatures. Freaks de Tod Browning (1932) en est l’exemple parfait et le symbole ! Le film synthétise la monstruosité qui est renvoyée à une déviance de la nature et inverse judicieusement le rapport à la normalité : les monstres ne sont pas toujours ceux que l’on croit !
Mais c’est la littérature du XIXe siècle qui a été la grande pourvoyeuse de créatures à travers les écrits de Bram Stoker, Mary Shelley, Robert-Louis Stevenson, Edgar Allan Poe… Les grandes figures du fantastique se nomment Dracula, Frankenstein, Dr Jekyll and Mr Hyde. Nous retrouvons également un sous-groupe comme le loup-garou, la momie, le robot, l’extraterrestre, etc.
Dracula, la créature crée par Bram Stoker en 1897, est la plus adaptée au cinéma et le personnage le plus intéressant du fantastique car, comme le dit Bernard Chaouat : « il est au confluant des trois grandes choses de l’humanité : le pouvoir, l’érotisme et la contagion.. » Parmi les cinéastes qui l’on, le mieux, porté à l’écran : Murnau, Dreyer, Browning, Fisher, Romero, Ferrara, Herzog et Coppola. Les meilleures adaptations étant Nosferatu, Vampyr, Horror of Dracula et Coppola’s Dracula.
Magie noire
Sorciers, sorcières et chamanes, ont un rôle prépondérant au cinéma. Ils sont souvent utilisés comme passeur et intermédiaire entre le monde des vivants et celui des morts. Plus que tout autres cinéastes, Jacques Tourneur aura exploré le monde de l’occulte avec une incroyable trilogie (Cat People, I Walked with a Zombie, The Leopard man), sans oublier Night of the Demon (1957). Il faut aussi évoquer le film fondateur sur la sorcellerie Häxan (Christensen, 1922) et le travail de chamane de Kenneth Anger, avec notamment Invocation of My Demon Brother (1969)et Lucifer Rising (1972).
Pouvoirs surnaturels
Mentalisme, télékinésie, contrôle à distance, divinations et prédiction, sympathie, magnétisme, lévitation… Les romans de l’écrivain Stephen King regorgent d’être humain aux capacités extra-sensorielles. King est certainement l’écrivain le plus adapté au cinéma et à la télévision. Parmi les films les plus réussis, nous pouvons citer ceux de Brian De Palma (Carrie), David Cronenberg (Dead Zone), John Carpenter (Christine), et Stanley Kubrick (The Shining).
Les illusionnistes
Parmi les premiers « vrais » magiciens qui sont apparus au cinéma, il y a bien sûr Georges Méliès, David Devant, Fregoli, Gaston Velle, Harry Houdini, Dante, Channing Pollock… Les magiciens à l’écran sont ensuite légion. A ce propos, Maurice Saltano a fait une remarquable étude sur le sujet en publiant l’article Les illusionnistes et le cinéma dans la revue Fantastyka n°10 (novembre 1995), puis dans le magazine Arcane (en neuf parties).
Les acteurs ont ensuite repris le rôle du magicien dans beaucoup de films oubliables ! Tod Browning aura mis en scène plusieurs figures d’illusionnistes dans ses films : The Show (1927), West of Zanzibar (1928) et Miracles for sales (1939). Il y a des magiciens « bien sous tous rapports » comme Mandrake (créé par Lee Falk en 1934) et d’autres diaboliques et pervers (The Mad Magician, 1954). Les tours de magie sont souvent mis en scène pour révéler le côté dramatique du climax comme avec la fameuse femme coupée en deux (tour le plus représenté au cinéma).
Notes :
1 Le volume 1 rassemble les six premiers numéros de la revue. Chacun est consacré à un sujet : Terence Fisher, Les Vamps du fantastique, King Kong, Dracula, La Chasse du conte Zaroff… Dans le volume 2 (n°7 à 12) nous retrouvons, entre autres, des entretiens avec William Castle, Roger Corman, Mario Bava et une thématique : « Érotisme et épouvante dans le cinéma anglais ». Le volume 3 (n°13 à 18) regroupe les entretiens avec Christopher Lee, Karel Zeman, Jacques Tourneur, Barbara Steel, Edgar G. Ulmer, Roger Corman ainsi qu’un dossier de trente pages sur les adaptations au cinéma du Fu Manchu de Sax Rohmer. Le volume 4 (n°19 à 24), initialement prévu pour novembre 2019, vient clore cette réédition fin 2021, sept ans après le volume 1, avec l’exhumation du mythique n° 25/26 resté inédit en 1973, maquetté et publié ici pour la première fois !
2 Les éditions Rouge Profond, basées à Aix-en-Provence, ont été co-fondées en 1999 par Guy Astic et Jean-Baptiste Thoret, en hommage au film de Dario Argento (Profondo Rosso). Ses missions sont multiples. D’abord patrimoniale, avec la restauration de monuments de la littérature fantastique (MMF). Ensuite transartistique avec une orientation formelle sur les genres et l’esthétisme au cinéma. De 1999 à 2003, la maison d’édition publie la formidable revue Simulacres (8 numéros) en mettant en avant les auteurs du cinéma de genre comme Dario Argento, Mario Bava, John Carpenter, Brian De Palma et en proposant des thématiques originales. Depuis 2003, des livres sont publiés devenant vite des références en la matière (26 secondes : l’Amérique éclaboussée, Le Magique et le vrai, Ecrits de Jacques Tourneur, Freaks : de la nouvelle au film, Le corps en abîme, Bruno Dumont : l’animalité et la grâce, L’œil domestique : Hitchcock et la télévision, Jean-Claude Brisseau : entre deux infinis, Peurs : autobiographie de Dario Argento, L’ultima maniera : le giallo, Quand soupirent les mystères : le cinéma de Dario Argento). En plus de vingt ans d’existence et cent livres publiés, Rouge Profond est devenue incontournable dans le paysage de la littérature cinématographique.
3 Certains cinéastes de la Nouvelle Vague ont produit des œuvres inspirées du fantastique et de la science-fiction comme Godard (Alphaville, 1965), Truffaut (Fahrenheit 451, 1966), ou Resnais (Je t’aime, je t’aime, 1968).
4 Les quatre DVD s’intitulent respectivement : La télévision des Midi-Minuistes, Les cauchemars de Midi-Minuit, Les ombres de Midi-Minuit et Les frissons de Midi-Minuit.
À lire :
– Midi-Minuit Fantastique Volume 1, 2, 3, 4. Une intégrale augmentée par Michel Caen et Nicolas Stanzick. Relié, 2 928 pages, 3 200 photos (couleurs et noir et blanc), avec DVD (Editions Rouge Profond, février 2014, octobre 2015, août 2018, décembre 2021).
– Le cinéma fantastique de René Predal (Seghers – Cinéma Club, 1970).
– Le cinéma fantastique et ses mythologies (1895-1970) par Gérard Lenne (Editions Henri Veyrier, 1985).
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