Angelo Raffaele Cefalo est né à Bonito en Italie. Cinquième de sept enfants, il émigre aux Etats-Unis en 1900, à l’âge de quinze ans, partant de Naples avec le navire Victoria avec son père Giovanni, ses frères (Pompilio, Nicola) et ses sœurs (Ermelinda, Giulietta). Angelo Raffaele Cefalo trouve un travail dans un salon de coiffure de Boston qui jouxte un fabricant d’accessoires magiques du nom de William Davis LeRoy. Le jeune homme est immédiatement fasciné par le monde de la magie. Il prend des cours dans l’école de LeRoy et commence à travailler comme magicien en 1902, recevant même des conseils de Harry Houdini. Quelques années plus tard, en 1907, ce dernier lui suggère de changer son style de présentation pour s’orienter principalement vers la pantomime et supprimer ses passages parlés à cause de son accent italien. Raffaele Cefalo devient Ralph Chefalo et annonce son spectacle dans le Conjurers’ Monthly Magazine d’Houdini. La même année, Chefalo rencontre Magda Palermo, une fille d’origine italienne qui se produit sous le nom de Capretta. Il ne tarde pas à s’associer avec elle se faisant appeler Capretta & Chefalo, « The Wizards in White », Capretta étant la vedette.
Chefalo et Madga Palermo alias Capretta au tout début de leur collaboration en 1909.
En 1910, Magda Palermo et Ralph Chefalo, se présentant sous les noms Palermo & Chefalo, montent leur compagnie Mystery Workers et tentent leur chance en Angleterre, remportant un succès considérable avec le spectacle In the Garden of Mystery dans lequel on retrouve une attraction en la personne de Mario Alfaro, un ventriloque et imitateur argentin. In the Garden of Mystery est divisé en trois scènes, mêlant numéros de prestidigitation, scènes théâtrales et parties dansées dans des décors orientaux et de la Rome Antique. Palermo & Chefalo terminent leur représentation avec un tango à la fin de chaque soirée.
Après un bref retour aux États-Unis, le couple retourne en Europe, voyage entre la Belgique, l’Angleterre et l’Espagne jusqu’au déclenchement de la Première Guerre mondiale. Au cours de ces années, les rôles s’inversent et le couple se produit en tant que Chefalo & Palermo. Ils se présentent en tant que nécromanciens, thaumaturges et magiciens. Ils prennent la direction de l’Amérique latine et de l’Extrême-Orient, travaillant avec des circassiens.
Palermo & Chefalo à l’Apolo Théâtre de Madrid en 1914.
Après la Grande Guerre, ils retournent en Europe et en 1923, après un arrêt aux États-Unis, ils retrouvent leur pays natal. Chefalo travaille à Naples et en profite pour retourner à Bonito, son village qu’il a toujours dans le cœur. En 1923, il inaugure, à Hollywood, la première boutique du célèbre bottier italien Salvatore Ferragamo, qui chausse les stars du cinéma américain.
Raffaele et Magda se marient en 1925 à San Francisco, après que Magda ait obtenu le divorce de son premier mari, Antonio Capretto, dont elle a également eu un fils que Chefalo a adopté et aimé comme le sien. Chefalo travaille dans les circuits des vaudevilles avec un succès très relatif. En 1926, Chefalo prend la direction de l’Australie pour une grande tournée, avec sa femme, en s’associant avec une troupe de vingt nains (Irving’s Imperial Midgets) et un géant. Cette formule s’avère être un succès considérable. Le spectacle fait escale six mois en Russie puis au Japon.
Magda Palermo se retire de la scène en 1933, après une dernière tournée en Australie, et décède prématurément à Francfort en 1939, à seulement cinquante et un ans. La même année, Chefalo se remarie avec Magdalena Streur, une danseuse hollandaise de trente-deux ans de moins que lui.
Quelques jours après le mariage, l’Allemagne envahit la Pologne et Chefalo, en tant que citoyen italien, est expulsé d’Angleterre où il travaille. Il retourne donc en Italie, où nait sa fille Maddalena Triestina. Il donne un spectacle de gala sous le nom de The Great Chefalo, pour les troupes à l’arrivée de l’armée américaine.
Après la Seconde Guerre mondiale, il s’installe en Hollande, le pays de sa femme, et continue à se produire avec un spectacle de facture égyptienne dans les grands théâtres européens, entre la France, la Suisse, l’Angleterre et l’Espagne. Chefalo revient un moment dans le circuit du vaudeville, avec l’illusion de P. T. Selbit, Million Dollar Mystery1. À la fin des années 1950, avec le déclin des salles de théâtre, il commence à travailler avec des cirques, avec lesquels il se déplace en Afrique. Raffaele et Magdalena retournent en Europe pour travailler avec le cirque national allemand. En 1962 ils partent en tournée en Argentine, puis en Extrême-Orient. C’est à Séoul, en Corée, que le 4 juin 1963 Ralph Chefalo meurt d’un accident vasculaire cérébral. Son corps est rapatrié et inhumé aux Pays-Bas, lieu de sa résidence.
Son répertoire
Chefalo maîtrise les classiques de la magie scénique comme la production de cartes, de foulards, de colombes, de lapin et de réveils. Il connaît la renommée avec le célèbre tour des anneaux chinois, exécuté avec vingt anneaux, dans lequel il est passé maître, et qui conclut généralement ses spectacles. Il n’hésite pas à intégrer dans ses représentations du pickpockétisme, des expériences spirites ainsi que des numéros d’hypnose, de suggestion et de catalepsie très en vogue.
Chefalo est l’inventeur de la grande illusion Girl in Drum, une apparition d’une femme dans un tambour. Il effectue aussi avec sa fille un effet de transposition où il enferme Maddalena Triestina dans une cage ronde élevée au sommet du chapiteau. Celle-ci disparait pour réapparaître dans un obus géant qui explose sous une multitude de fleurs multicolores. Mais Chefalo est surtout connu pour sa contribution à la magie des cordes avec le Chefalo Knot2, une technique qui permet de faire disparaître un double nœud sur une corde. C’est enfant qu’un vieux marin montre à Chefalo ce « double nœud évanescent ». Il l’utilise alors comme un élément impromptu dans son répertoire non professionnel.
The Chinese Noah’s Ark3 (l’Arche de Noé Chinoise). Une grande armoire, préalablement montrée vide au public, produit une multitude d’animaux : volailles, chiens, chats… jusqu’à ce que la scène ressemble à un jardin zoologique. Pour finir, c’est au tour d’une femme de faire son apparition.
Notes :
1 À partir d’une petite boîte, isolée et surélevée au milieu de la scène, le magicien produit autant d’objets, d’animaux ou de personnes qui le désirent. Ce tour scénique est inventé par l’anglais Walter Jeans en 1927 sur la base de son illusion Silver Hat de 1912. Avec P. T. Selbit, ils améliorent l’effet et Selbit présente le résultat de leur collaboration en 1928 à Londres sous le titre The Million Dollar Mystery.En 1929, Howard Thurston popularise cette illusion en s’associant au constructeur Cyril Yettmah et en fait un grand moment d’anthologie qui reste la référence du genre.
2 L’origine de cette technique se trouve dans le Quadruple Vanishing Knot, utilisant un carré de soie, publié pour la première fois par Ellis Stanyon dans New Handkerchief Tricks et à nouveau dans Magic World en 1913. Selon J. T. Burgess, le « véritable nœud », utilisant une corde, est connu sous le nom de Staffordshire Knot. Chefelo a combiné ces deux techniques en toute innocence et en est devenue l’auteur.
3 Cette version est une variation « orientale » de la spectaculaire illusion Noah’s Ark inventée par le magicien autrichien Ernest Thorn en 1894 et présentée par une très grande partie des illusionnistes de l’époque dont The Great Raymond.
Cet article a été publié pour la première fois dans le MAGICUS magazine n°231 (septembre-octobre 2021). Crédits photos – Documents – Copyrights avec autorisation : State Library of Victoria / Archives Gaetano Di Vito / Collection S. Bazou. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants-droit, et dans ce cas seraient retirés.