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L' Art de l'illusion

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Ernest THORN

Moses Abraham Thorn (1853-1928).

Sébastien Bazou

Ernest Thorn est considéré comme le premier grand illusionniste itinérant à parcourir le monde. Il parle couramment huit langues et présente ses spectacles dans la langue du pays où il se trouve. Il est un collectionneur passionné d’antiquités et de pièces de monnaie rares. Il est également membre des Cercles magiques allemands et britanniques.

Ernest Thorn est né à Jaroslau, dans la province multilingue de Galice. A cette époque, cette province est sous domination autrichienne, bien que les citoyens polonais jouissent de libertés culturelles considérables ; aujourd’hui, elle est divisée entre la Pologne et l’Ukraine.

À l’âge de dix ans, Ernest Thorn assiste à un spectacle du magicien Simonelli et est immédiatement fasciné par ce qu’il voit. À seize ans, il se rend à pied en Autriche emportant dans ses bagages une quantité importante de tours. Au cours de son voyage, il fait son apprentissage auprès de magiciens plus âgés et est l’assistant de l’illusionniste polonais Samuel Bellachini (1827-1885).

Ernest Thorn fait ensuite de son frère cadet Heinrich son partenaire et ils se produisent en Inde, à Batavia, sous le nom de « Thorn et Darvin ». Après avoir parcouru l’Autriche et l’Allemagne, ils se rendent en Turquie et restent deux ans à Istanbul, avant de continuer en Inde, en Extrême-Orient, en Chine, au Japon et en Australie. Ils donnent des représentations à Java, aux Philippines, à Sumatra, au Cambodge. Le roi Norodon a généreusement récompensé les deux frères et a rendu hommage à Ernest Thorn en le faisant « Chevalier ». Ernest et Heinrich vont ensuite en Birmanie et se produisent devant le roi de Mandalay.

Ernest Thorn utilise alors le titre de « Chevalier » sur tout son matériel publicitaire, et se présente avec son frère comme des « Illusionnistes royaux ». Ils se spécialisent dans les effets spirites et proposent un spectacle complet avec lévitations, matérialisations d’esprits, armoire spirite, questions/réponses. Ils inventent également un numéro original, le Vanishing Horse.

En 1879, Thorn et Darvin se produisent à Sydney. Après une représentation pour le roi Kalakaua dans les îles hawaïennes en 1880, ils arrivent aux Etats-Unis en 1885 et jouent au Standard Theatre de San Francisco. Ernest veut alors recommencer une tournée mondiale mais Heinrich décide de rester en Amérique, obligeant son frère à travailler en solo et à collaborer avec d’autres magiciens comme Marius Cazeneuve.

Après deux ans passés à Constantinople où il rencontre sa future femme Julia, Ernest Thorn se rend en Égypte et en Inde, se produisant devant dix-huit maharajas. A partir de 1892, Julia devient sa première assistante et son manager général. Le couple rencontre vite un immense succès à Vienne, où il joue 209 dates consécutives.

Le grand spectacle de Thorn intitulé Dreamland, « une heure dans un pays de rêve », où l’on retrouve « six illusions sensationnelles en moins de vingt minutes », présente des effets classiques comme Inexhaustible Bottle (Barman du diable), The Mysterious wardrobe (L’armoire spirite), Vanishing Birdcage (La cage volante), Dancing Handkerchief (Le foulard dansant) et un certain nombre de ses créations avec des illusions originales comme The Sarcophagus, Toiza-Wonnda, Mystery of Lahore, Casket of Cagliostro, Karma Sutra vs. Benares, Rapid Transit, Kati-Hony, Floating Yoge, Travankor, Pagoda mystery. Parmi ses innovations, l’illusion de la crémation dans laquelle son assistante disparait dans les flammes alors qu’elle se tient dans un rideau d’amiante. Son impressionnante Arche de Noé (créée en 1894) dans lequel un modèle de l’Arche, d’abord montré vide, produit divers animaux, culminant avec l’apparition de la femme de Noé. Cette illusion est reprise par de nombreux illusionnistes contemporains dont The Great Raymond.

Parmi ses autres illusions :

– Caliph of Bagdad (le Rêve du Calife) 1894. Un assistant entre dans une armoire et réapparait dans une autre suspendue de l’autre côté de la scène. Comme pour L’arche de Noé, The Dream of the Chalif a également trouvé sa place dans les programmes d’autres illusionnistes. L’anglais Charles Morritt l’a adapté pour l’américain Harry Kellar qui l’a renommé Fly To (Princess Karnak). Cette illusion devient si populaire qu’elle est utilisée comme son final pendant de nombreuses années.

– Attavar. Un hamac est suspendu entre deux tables superposées et une assistante entre dans le hamac. En une seconde, la table du haut, le hamac et la dame disparaissent en pleine lumière sans l’aide de miroirs, ni de rideaux.

– Le Miracle de Benares de Madame Blawatzka est le numéro final de Thorn faisant écho à la célèbre spiritualiste de l’époque et fondateur de la Théosophie Helena Blavatsky (1831-1891).

Thorn perd la plupart de ses économies en tentant de diriger plusieurs music-hall en Europe. Contraint par ses finances de revenir aux tournées, il se produit à Londres au Britannia Theatre et à l’Empire Theatre en 1904 avec beaucoup de succès, puis joue quatre semaines au Théâtre Scala de Copenhague et au Théâtre Svea de Stockholm.

Julia Thorn meurt en 1919, à l’âge de cinquante ans, à Leipzig. Après la crise monétaire allemande de 1922, Thorn continue ses représentations jusqu’en 1923 et se retire de la scène vendant la plupart de ses illusions à l’illusionniste allemand Alois Kassner. Ernest Thorn glisse ensuite inexorablement dans le déclin. Heinrich rejoint son frère pour ses dernières années. Thorn revend alors ses nombreuses antiquités qu’il avait rassemblées partout dans le monde lors de ses voyages. Il meurt à Leipzig dans la pauvreté en 1928.

Extrait de la revue L’Illusionniste, N°55 de mai 1906.

En songeant aux grands prestidigitateurs dont la brillante réputation est répandue par tout l’univers, j’ai toujours désiré les voir dans les merveilleuses expériences qui ont fait leur renommée. Puis, quelques-uns de ces artistes venant faire consacrer leur talent à Paris, il me fut donné d’assister à leurs représentations, et j’avoue que le plaisir que j’en éprouvai ne fut pas toujours aussi vif que je l’avais escompté. Trop souvent mon rêve avait « dépassé » la réalité. Quelquefois cependant, j’ai vu des spectacles que mon esprit n’aurait même jamais osé imaginer. Un de ces rares bonheurs m’a été procuré quand j’ai pu admirer le chevalier Ernest Thorn qui est bien réellement l’un des plus extraordinaires magiciens connus.

On a dit et écrit de lui beaucoup de bien. Aucun éloge n’a été au-dessus de ce que réalise son incontestable talent couronné par un succès parfaitement mérité. Thorn n’est pas un magicien de la dernière heure. Depuis de longues années notre art n’a plus, pour lui, aucun secret.

L’affiche que nous publions plus loin, en dehors de l’indiscutable attrait documentaire qu’elle comporte, nous montre qu’en 1885 il donnait déjà des séances en collaboration avec Cazeneuve. On sait que la réputation de ce dernier a surtout été établie par son adresse aux tours de magnifiquement profité de cette fréquentation ; il exécute, lui aussi, avec un jeu de cartes, d’étourdissants exercices.

Tous les pays du monde ont pu admirer et applaudir notre éminent artiste. En 1885, il était à l’Opéra khédival du Caire, puis il donna des représentations devant le roi du Cambodge, Norodon, devant le sultan de Constantinople, le roi d’Angleterre, le bey de Tunis, etc. En Italie, où il fit une tournée à son compte en louant les théâtres, il gagna une véritable fortune.

Il fonda ensuite un music-hall, le Colosseum à Lemberg (en Autriche). A Vienne, il donna 209 représentations consécutives. Partout un retentissant succès le récompensa de ses travaux et accrut son universelle réputation.

Ses nombreux voyages développèrent chez lui un grand talent de polyglotte. Il parle huit langues, ce qui lui permet de parcourir le monde en présentant ses expériences dans l’idiome du pays où il se trouve.

La dernière création de ce maître inventeur auquel les magiciens sont redevables d’une quantité de grands trucs, dont il possède les brevets, est particulièrement à signaler. Sous le titre original d’Attawar, cette illusion déçoit les recherches des esprits les plus perspicaces. Son nouveau programme au Casino de Paris est tout entier d’ailleurs des plus attrayants et des plus artistiques. La presse parisienne a été unanime à constater le succès de Thorn.

Nous découpons, au hasard, dans le Journal : « Le chevalier Thorn c’est, dans la rue, un homme comme vous et moi, mais sur la scène du Casino, il se mue en magicien. Et tour à tour nous le voyons faire s’envoler des oiseaux vivants du chapeau des jolies spectatrices, renouveler le miracle des noces de Cana, en changeant en vin d’abord, puis en chocolat, en punch, en café brûlant, l’eau claire de la carafe qu’il tient à la main, et se livrer à mille autres facéties divertissantes. Mais là où le chevalier devient affolant, c’est lorsqu’ après avoir subtilisé une femme, il se met en devoir, opérant sur lui-même, de se subtiliser à son tour. En moins de temps que vous n’en mettez à rouler une cigarette, notre magicien s’est évaporé, volatilisé, perdu dans les airs, laissant les spectateurs confondus et criant au sortilège ou bien au prodige. »

Et dans le Figaro : « Vous êtes bien d’avis, n’est-ce-pas, que le monde appartiendrait à celui qui aurait le secret de se rendre invisible, momentanément et à sa volonté ?… Eh bien, dans ce cas, le monde est près d’appartenir au chevalier Thorn. Ne le voyons-nous pas tous les soirs, au Casino de Paris, s’évaporer, se perdre dans les airs, devant les spectateurs confondus et qui crient au miracle ? L’instant d’après, le chevalier Thorn reparaît avec, aux lèvres, le sourire. Et chacun d’applaudir. Jamais encore on n’avait vu, à la scène, se réaliser un pareil exploit. Cela tient du prodige, c’en est un en effet. »

N’oublions pas de noter enfin la magnificence de la mise en scène du chevalier Thorn, qui se fait d’ailleurs une coquetterie de ne posséder que des appareils de la dernière richesse et d’un mécanisme perfectionné. Il y réussit pleinement. La peinture de ses trois malles est une véritable œuvre d’art ; il est regrettable que la distance ne permette pas au public d’en admirer toutes les merveilles.

J. C.

– Cet article a été publié pour la première fois dans le MAGICUS magazine n°216 (mars-avril 2019).

Documents : Mike Caveney’s Egyptian Hall Collection. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants-droit, et dans ce cas seraient retirés.

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