Les artistes comme le public partagent une profonde fascination pour la jungle, que l’on retrouve dans des œuvres cultes et populaires de la littérature, du cinéma, de la bande dessinée, des arts plastiques et même de la musique. Pendant trois mois les bibliothèques nîmoises ont invité à (re)découvrir la jungle sous toutes ses formes : illustrations, papier découpé, collections patrimoniales, décors en 3D et photographies emportent ailleurs, dans un lieu à la fois exotique, hostile et luxuriant. Ces expositions sont accompagnées de conférences, lectures, spectacles, concerts, projections et contes théâtralisés. Le Carré d’Art accueille ainsi plusieurs expositions dans son espace modulable dû à Norman Foster.
Deux ombres dans la jungle
Antoine Guilloppé et Hélène Druvert sont deux figures de l’édition jeunesse qui viennent croiser leurs univers autour du thème de la jungle. Le premier réalise, depuis 1998, des albums jeunesse en tant qu’auteur-dessinateur. Ses illustrations, très graphiques, se distinguent par un trait maîtrisé et très peu de couleurs. Depuis 2010, il développe une nouvelle forme d’illustrations à partir de la technique de découpe au laser pour Prédateurs (Ed. Thierry Magnier), ou Ma jungle (Ed. Gautier-Languereau). La deuxième est illustratrice, designer papier et textile. Elle explore le papier découpé depuis plusieurs années à travers ses albums (1001 nuits, Paris s’envole, etc.), installations ou projets d’édition.
Jim Curious
Ce personnage de scaphandrier, créé par Matthias Picard en 2012, part à l’aventure pour des explorations muettes dans une nature foisonnante et spectaculaire. Il entraîne à sa suite le lecteur, qui plonge lunettes 3D sur le nez, dans des périples plains de reliefs et de surprises. L’auteur a mis son petit scaphandrier en scène dans un premier album : Jim Curious, voyage au cœur de l’océan où ce dernier descend dans les profondeurs de l’Atlantique découvrir des épaves de la Seconde Guerre mondiale, les vestiges d’un galion, une cité perdue, des formes de vie les plus primitives, méduses étranges et monstres en tous genres.
Dans sa deuxième aventure Jim Curious explore la jungle. Il est endormi, mais quelque chose se pose sur son visage… C’est une libellule, qui s’envole et prend la fuite à travers le miroir du salon ! Jim s’engage à sa suite et, soudain, une forêt puissante et ancestrale lui fait face… Au cœur d’une mangrove dédaléenne, sous les frondaisons lumineuses d’une forêt primaire, au pied de pins millénaires, Jim le scaphandrier entame un nouveau périple. Il sillonne un champ de lentilles d’eau sans déranger grenouilles et crocodiles, se laisse guider vers les sous-bois par d’envoûtants papillons et s’avance dans la jungle… Majestueux et tendus vers le ciel, tortueux ou intrigants : les arbres forment le décor de ce nouveau voyage en trois dimensions. Singes, toucans, tortues, serpents : les forêts vibrent de vie, et ces rencontres rythment la marche paisible de Jim Curious. Mais, sourdement, la présence de l’homme affleure, fait surface et interroge…
« J’ai réfléchi à cet album pendant deux bonnes années, puis ça m’a quand même pris encore deux ans à le réaliser. Il faut dire que je passe à peu près une semaine par page, c’est très long mais je sais qu’à la fin, j’aurai la surprise de découvrir l’image en relief. Ça étonne beaucoup de monde, parce que l’économie du livre ne permet pas vraiment ça… Beaucoup de jeunes auteurs de BD réalisent et auto éditent leurs albums très très rapidement. Pas moi : par exemple, j’ai commencé à penser à Jeanine, mon tout premier album publié par L’Association, en 2006… et je n’ai commencé à en dessiner les premières pages qu’en 2009 ! La maturation est très longue, chez moi. » Matthias Picard
Matthias Picard nous propose un parcours interactif et ludique pour découvrir son dernier album en agrandissant quelques planches de sa BD sous forme de paravents – châssis. Il construit ainsi un cheminement immersif à taille humaine où le public, se substituant à Jim, peut plonger entièrement dans ses illustrations en 3D (grâce à des lunettes anaglyphes stéréoscopiques) en appréciant les détails de son travail graphique labyrinthique et son sens de la profondeur de champ. L’exposition est complétée par des appareils et jouets optiques (stéréoscope, miroirs, visionneuse stéréoscopique) qui créés une dimension supplémentaire dans les recherches de l’auteur – dessinateur. Sont exposés également des carnets de croquis, des essais, des esquisses préliminaires et des recherches qui montrent l’étendu du travail exécuté en amont par Matthias Picard et sa facilité à croquer la flore et la faune de la jungle. Pour compléter l’expérience, des planches expliquent de façon décalée et humoristique les techniques du « grattage », de la « 3D anaglyphe », terminées par un petit historique sur la BD en 3D.
A lire :
– Jim Curious, voyage à travers la jungle de Matthias Picard (Editions 2024, 2019). BD vendue avec deux paires de lunettes 3D anaglyphes.
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