Préambule
Des bracelets blancs sont distribués à tous les spectateurs de la salle, avec écrit dessus « David Copperfield » et ses liens Internet (Site web, Facebook et Twitter). Le public est invité à les mettre autour du poignet et à envoyer un email à l’adresse de Copperfield figurant sur le bracelet (en mentionnant sa ville, sa région et son pays). Une fois le mail arrivé, celui-ci se matérialise en un point vert sur une grande mappemonde retransmise sur un écran vidéo (indication de l’endroit où habite chaque spectateur).
Une vidéo d’introduction fait apparaître des mots qui résonnent comme étant essentiels à la vie et au futur discours de l’illusionniste Copperfield (« vous naissez, vous grandissez… vous vivez l’impossible… »)
Apparition
Une grande structure en forme de cadre, décollé du sol, apparaît sur scène. Les 4 côtés sont recouverts de toiles opaques, puis retirés, et apparaît Copperfield sur une moto. C’est son apparition favorite depuis des décennies et on a vu plus original…
Twisting hands
L’illusionniste prend la parole et nous refait le coup des Twisting hands de Meir Yedid (usé jusqu’à la corde car présenté par tous les magiciens) pour faire participer le public. C’est mal parti, mais on espère mieux pour la suite !
Webster et Frank
Traverse alors sur scène son oie préférée Webster, marque de fabrique de Copperfield depuis longtemps, qui a l’habitude de s’inviter dans ses spectacles.
L’illusionniste parle ensuite de son enfance et de son jouet préféré : un squelette de T-Rex nommé Frank (ce sera le fil rouge du show jusqu’à la toute fin). Nous le voyons en compagnie du dinosaure en photo sur l’écran de projection dans un diaporama cocasse (« Frank et moi à la page, Frank et moi à la neige, etc ».)
Twitter transposition
David Copperfield a rencontré une personne via Twitter et dont le rêve est de réaliser un tour avec le magicien. ça tombe bien puisqu’elle est dans la salle ce soir et va réaliser son souhait.
Six personnes du public montent sur scène pour former un cercle. Deux assistants du magicien viennent placer deux plates-formes sur pied, transparentes, dans la salle, au milieu des sièges des spectateurs. Copperfield et son spectateur volontaire montent dessus. Les assistants déploient deux grandes arches par-dessus eux pour montrer qu’il n’y a pas d’attaches quelconques.
Copperfield recouvre le spectateur d’un drap et le fait léviter hors de la plate-forme dans une sorte d’Asrah. Nous voyons ses pieds dépasser du drap et brusquement le tissu est retiré et il disparaît dans les airs… pour réapparaître sur scène au milieu du groupe de spectateurs !
Une disparition / transposition magnifique réalisée complètement entourée, visible de partout, à 360° ; de la VRAIE magie, incompréhensible. Enfin ! Pas de doute, Copperfield est de retour avec ce coup de maître et le spectacle va aller crescendo jusqu’à la fin.
Lottery prediction
Copperfield parle de son grand-père de façon mélancolique. Celui-ci avait un rêve : posséder une voiture Lincoln convertible verte. Pour cela il jouait à la loterie nationale toujours les mêmes numéros, espérant remporter le gros lot pour s’acheter son véhicule.
Une prédiction dans un coffre transparent est amenée sur scène, ainsi qu’un petit sac en velours. Deux spectateurs sont conviés à surveiller de près ces objets en ayant une main dessus.
Un frisbee est lancé dans la salle pour choisir au hasard des spectateurs qui, à tour de rôle, vont donner une série de deux numéros jusqu’à composer une série de 6 nombres.
4 spectateurs fournissent 4 clés à un 5ème spectateur sur scène qui est désigné pour ouvrir le coffre d’où est retirée une enveloppe avec une clé USB à l’intérieur. Cette clé est lue par un poste et on entend une voix annoncer les nombres sélectionnés par les différents spectateurs au début.
Pour couronner le tout, le spectateur sur scène donne le sac en velours à Copperfield : celui-ci contient deux plaques minéralogiques de voiture avec gravées dessus les numéros choisis par le public ! (Licence plate, inventée par Chris Korn pour Copperfield)
Les assistants de Copperfield installent alors 4 plots sur scène et des spectateurs constituent une chaîne humaine autour à 360°. 4 voiles sont disposés sur les côtés, au-dessus des plots pour former un tunnel face au public. Nous voyons l’intérieur du tunnel vide et d’un seul coup apparaît une voiture Lincoln verte à l’horizontale sur les plots ! Le rêve du grand-père de Copperfield s’est réalisé ce soir dans un bel hommage. Pour prouver que ce n’est pas une maquette en carton, Copperfield grimpe dans la voiture et la démarre.
Cette illusion avait déjà été réalisée par l’illusionniste, notamment, lors de sa tournée européenne de 2005 mais dans une version écourtée. Du grand art et un modèle de construction dramatique qui touche les gens.
Télékinésie ballon
Redéfile sur l’écran vidéo une photo de Copperfield enfant avec son compagnon Frank, le T-Rex.
Le magicien gonfle un ballon qu’il place dans la salle et le fait éclater à distance par la force de sa pensée. Il va répéter l’opération, mais cette fois-ci en enfermant le ballon noir dans un ballon transparent, le tout disposé dans une boîte de plexiglass transparente. Sans contact, le ballon noir éclate en laissant intacte le ballon transparent. Un très bel effet de télékinésie, très épuré dans sa forme.
L’arbre des mots
Tous les spectateurs sont invités à lever leur poing en l’air, celui armé du bracelet du début. La lumière s’éteint et l’on distingue sur l’un des bracelets une croix se matérialise sous l’action d’ultraviolets. Cette croix désigne au hasard la volontaire qui va monter sur scène assister Copperfield pour sa prochaine expérience. Une seconde spectatrice est choisie, au hasard, grâce à deux croix orange en mousse jetées dans la salle.
Copperfied demande aux spectatrices sur scène si elles ont une collection quelconque ? Le magicien, lui, aime collectionner les mots. Apparaît alors sur scène des centaines de mots suspendus à des ficelles blanches et rouges comme une sculpture cinétique de Jesús-Rafael Soto. Au dos des mots sont inscrits des chiffres.
La première spectatrice appuie sur un buzzer qui déclenche une musique (Copperfield danse avec elle – gag). La deuxième spectatrice est invitée à se placer en dessus des mots, les yeux bandés et au déclenchement du buzzer, doit se déplacer ou elle veut et s’arrêter. La structure se met à tourner comme un carrousel et la spectatrice s’arrête à un endroit. Le magicien lui demande « droite ou gauche ? » et elle décroche le mot suivant son choix : elle tombe sur « Truth », la vérité.
Le mot apparaît alors sur le bracelet de la deuxième spectatrice sur scène qui devient malgré elle la prédiction du magicien ! Mais le plus beau arrive…
Les lumières de la salle s’éteignent et tout le monde est invité à lever son poing et apparaît alors le mot choisi sur TOUT les bracelets !
Magnifique effet dans sa symbolique et son impact émotionnel jouant sur la communion humaine. Mais jusqu’où va aller David Copperfield dans ses prochaines illusions ? Car la barre est déjà au sommet.
Squeeze box
Webster l’oie revient sur scène et cette fois-ci, Cooperfield la saisit et la présente au public. Cette dernière intimidée urine (pour de faux) sur les spectateurs. Du mauvais goût, mais de courte durée, heureusement.
Sur une musique du groupe Prodigy et des bruits de métallurgie, Copperfield entre dans une grande boîte horizontale et se réduit lui-même progressivement jusqu’à ce que sa tête touche ses pieds. Présentation éclair de la Squeeze box inventée par André Kole.
Floating rose
Nous arrivons à un moment solennel avec du close-up présenté dans la salle à une spectatrice privilégiée et retransmis sur écran vidéo pour l’ensemble du public. Le magicien froisse un morceau de papier et le fait léviter dans ses mains, puis dans celle de la spectatrice. Il sculpte ensuite une rose avec le papier, la fait léviter et la transforme en vraie fleur, qui est offert à son assistante d’un soir (Référence : Floating rose de Kevin James sur une idée de Finn Jon).
Copperfield exécute à la perfection ce classique qu’il présente depuis des décennies à son auditoire, toujours charmé par tant de poésie. Ce tour est à l’image de l’illusionniste, délicat et léger ; il convoque ses grands thèmes : la lévitation et l’émotion participative.
A noter que la retransmission vidéo est assurée par un caméraman professionnel équipé d’une caméra full HD qui donne à l’image un rendu digne d’une image cinématographique. A ce propos, Copperfield est passé maître dans l’art de jouer avec la caméra et son jeu d’acteur décuple ses effets magiques car il permet de faire un lien visuel (la puissance de son regard) avec toute la salle comme si chaque spectateur vivait le numéro devant lui. Pour rappel, l’illusionniste a notamment collaboré avec le grand Francis Ford Coppola pour un show à Broadway et son tableau sur le spiritisme (Barclay house).
Attila l’Alien
L’illusionniste parle maintenant de son père qui est parti trop tôt et qui lui a appris un geste avec les mains signifiant « je t’aime ».
Un projecteur vintage 8mm, placé sur une petite commode dans la salle, diffuse des extraits de bande familiale où l’on voit le père de Copperfield, qui n’a pas eu le temps de lui dire je t’aime avant qu’il décède.
Ce dernier lui a laissé des clés qui ouvrent un grenier où sont entassés d’innombrables objets lui ayant appartenu. Sont disposés sur scène des meubles en vrac et une petite caisse qui est ouverte sur ses 4 côtés et montrée vide. La caisse est ensuite placée sur un piédestal transparent au milieu de la salle, entourée par des spectateurs. Une caméra retransmet les actions à venir en gros plan. La caméra plonge dans la caisse vide avant que celle-ci se referme et fait apparaître, dans un grondement et une production de fumée, un petit Alien du nom d’Attila. Une magnifique marionnette animatronique originale, dessinée spécialement pour Copperfield (comparable à celle utilisée dans certains films).
Copperfield revient sur scène avec son nouveau compagnon et converse avec lui. Attila discute et bouge comme une vraie personne. Ses antennes composées de diodes ondulent comme celles d’un escargot. Attila a connu son père et donne à David une photo de son paternel pendant la guerre ainsi qu’une lettre de ce dernier.
Un gros sablier se met en route sur scène pour faire un saut dans le futur et Copperfield demande à la salle de faire le signe des mains (« je t’aime ») et de se concentrer dessus. Une grande affiche est suspendue sur scène, face cachée du public. Le magicien demande ensuite à tous les spectateurs d’allumer leur téléphone portable et de les placer dans les boîtes noires prévues à cet effet.
Il choisit ensuite un spectateur au hasard qui lui donne le nom d’une ville, d’une personne avec qui il veut partir et combien de temps. Le spectateur vient ensuite sur scène et est invité à penser à une personnalité célèbre et d’écrire son nom sur un paperboard caché de la vue du public.
Le poster-prédiction typographique, réalisé à la façon d’un portrait maniériste de Giuseppe Arcimboldo, est révélé et dévoile la célébrité choisie par le spectateur (nom écrit sur le paperboard). Mais ce n’est pas tout. Une caméra zoome sur le portrait qui dévoile une multitude de mots qui correspondent aux réponses données par la spectatrice au début de la séance (nom de la ville, personne avec qui il veut partir et le temps du voyage). Tous les téléphones sont alors ouverts et tous les spectateurs ayant envoyé un mail à Copperfield au début du spectacle reçoivent la prédiction du poster sur leur écran.
Attila a une défaillance et manque de mourir. Copperfield vient à son secours en faisant le signe des mains. La salle est alors plongée dans le noir absolu et apparaît sur scène un énorme vaisseau spatial qui flotte dans les airs. Cette soucoupe volante se dirige alors dans la salle et lévite au-dessus des spectateurs médusés pour revenir sur scène et disparaître.
Une apparition hallucinante ! Il faut être dans la salle et vivre cette expérience pour mesurer l’impossibilité de cette illusion. Une apparition que le public cru rêver et pour cause. On ne s’en remet toujours pas…
Attila fait un dernier câlin à David en lui disant que son père l’a protégé et disparaît derrière un voile avant de lui avoir confié une lumière. Son vaisseau réapparaît sur la vidéo, à l’extérieur de la salle, et l’on voit Attila monter dedans et s’éloigner du MGM, avec sa famille, pour partir rejoindre sa galaxie.
Copperfield monte sur une grande caisse transparente, se recouvre d’un voile, lévite au-dessus et disparaît dans les airs pour aller rejoindre son père dans la vidéo qui est projetée sur un côté de la scène (une disparition saisissante !). David apparaît du ciel et va embrasser son père avec la lumière d’Attila dans sa main. Il lance cette lumière en direction de la salle et réapparait en vrai parmi le public pour faire signe à son père, en dehors de l’image.
Ainsi se termine cette magnifique histoire de filiation, à laquelle le public est dubitatif au début, et qui emporte tout au fur et à mesure que la dramatisation se met en place. Un moment inoubliable pour toute la salle !
Webster the duck
Copperfield revient à des choses plus légères avec son oie blanche qu’il fait disparaître d’une boîte, qui est ensuite démontée en plusieurs morceaux. L’animal réapparaît dans un seau, montré au préalable vide, tenu par un spectateur.
Le tour est refait mais au ralenti avec l’aide d’un assistant du magicien. Le seau est de nouveau montré vide à l’aide d’une torche et l’oie revient sous la forme d’une marionnette animée par Copperfield. Une fois l’animal mit dans la boîte, l’assistant prend l’oie et va la placer dans le seau tenu par le spectateur. Le seau est à nouveau ré ouvert et apparaît le vrai Webster.
Frank le T-Rex
Pour conclure son spectacle, Copperfield résume sa magie à une métaphore de la vie où les rêves sont le moteur pour accéder à nos motivations les plus profondes.
David se place dans une cabine vide : « Cela commence toujours avec rien. »
Des torches balaient les grands panneaux qui sont placés autour de la cabine et apparaît un gigantesque squelette de T-Rex mécanique qui s’anime sous nos yeux en rugissant comme dans le film Jurassic Park.
Copperfield concrétise un rêve d’enfant et retrouve son jouet préféré grandeur nature. Il se place vers sa tête et lui fait un câlin en faisant le signe des mains appris de son père.
Copperfield is BACK !
C’est avec beaucoup de réserves que je me suis rendu au dernier spectacle de Copperfield, étant resté sur une déception après sa piètre tournée européenne de 2005. Que dire de la magnifique surprise que j’ai eu en redécouvrant le maître sous son meilleur jour, artistiquement ressuscité et toujours dans la course, offrant aux spectateurs (et aux magiciens) une véritable leçon de magie théâtralisée et scénarisée.
Car c’est dans ce registre que l’illusionniste excelle entre le théâtre et le cinéma. Il sait créer de toute part un monde qui lui est propre jouant sur l’inconscient collectif avec maestria, soulevant des questions existentielles que tout le monde se pose. L’impact émotionnel est toujours au centre de son dispositif. L’exemple de l’Alien Attila est représentatif de l’art de Copperfield qui sait transporter son auditoire dans une histoire captivante qui transfigure ses illusions.
Copperfield est plus que jamais un des plus grands magiciens de tous les temps et comme l’annonce sa publicité, sur les façades du MGM, il reste « le plus grand illusionniste de notre temps ». Il sait encore se renouveler en captivant son public et en médusant ses collègues magiciens. Avide de nouvelles techniques, de nouvelles technologies et de nouveaux challenges, Copperfield est passé maître dans les procédés dramatiques qu’il met en place pour toucher le plus grand monde. Courez voir ce show exceptionnel si vous avez l’opportunité de passer à Las Vegas, il fera date à n’en pas douter.
A lire :
– David Copperfield / Illusion.
– World Tour 2005.
– Le musée de David Copperfield.
– David Copperfield, une vie de magie de Benoît Grenier. Editions Amalthée (2008).
– Cet article a été publié pour la première fois dans le MAGICUS magazine n°198 (janvier-février 2016).
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