Extrait de la revue L’Illusionniste, N°145 de janvier 1914
Devant l’énorme succès remporté auprès de nos abonnés par La Prestidigitation sans Appareils, cet important ouvrage devenu, dès le premier jour, le manuel préféré de tous les fervents de la magie, nous ne saurions certainement mieux faire que de présenter à ceux qui l’ont accueilli avec tant d’enthousiasme, quelques lignes biographiques sur l’auteur, M. Camille Gaultier. La tâche sera facile, car la lecture de l’excellent traité qui fait, d’un seul coup, reconquérir à la littérature magique française le premier rang sur tous les écrits similaires étrangers, suffit à révéler les réels mérites du consciencieux écrivain : clarté du style, précision des explications, étendue et variété des connaissances, perfection de la méthode. Cependant, M. Gaultier, aujourd’hui grand maître du filage et de l’empalmage, ne paraissait, tout d’abord, dirigé en aucune façon vers cet art tout spécial.
Né aux Andelys, où il retourne chaque année, avec plaisir, au moment des beaux jours, il vint à Paris, pour entrer au collège, puis pour faire ses études de Droit poursuivies jusqu’au grade de Docteur. Après un court stage dans deux études d’avoué de la capitale, il préféra, alors qu’il pouvait passer patron à son tour, conserver son indépendance et sa chère liberté.
Contrairement à beaucoup d’amateurs que la magie taquina dès leurs jeunes années, la déesse ne hanta point de bonne heure ses rêves. Croirait-on que ce fut, en quelque sorte, sur ordonnance du médecin, qu’il s’adonna à la prestidigitation ? C’est, en effet, dans le but de remédier à un engourdissement consécutif à de passagères douleurs névralgiques localisées dans les extrémités du pouce et de l’index de la main droite, que M. Gaultier, à qui l’exercice des doigts était recommandé, revint définitivement à notre art, cultivé très sommairement pendant quelques années, puis entièrement délaissé.
Mais notre auteur ne devait rien faire à demi. Tout de suite intéressé à toutes les finesses des manipulations qu’il exécutait, ce fut bientôt avec passion qu’il y consacra une partie de son temps, et ce n’est pas trop dire que de proclamer aujourd’hui que, même parmi les plus habiles professionnels, bien peu pourraient rivaliser avec lui d’adresse et de dextérité.
En outre de cette perfection d’exécution qu’il atteignit très rapidement, il voulut étudier à fond les moindres ressources de cet art si complexe et, se documentant auprès des artistes français et étrangers les plus réputés, il put analyser et comparer scientifiquement leurs différents procédés et en créer de nouveaux ; c’est donc le résultat des recherches de son esprit curieux et toujours en éveil qu’il présente dans ce traité, composé en grande partie à Paris, mais aussi aux Andelys et à Monte-Carlo, et que tous nos lecteurs ont aujourd’hui entre les mains. Le succès qu’il a trouvé auprès d’eux est certainement le plus flatteur hommage adressé à cet auteur si français. Membre de notre Chambre syndicale, M. Camille Gaultier fit partie à diverses reprises du jury de nos concours et obtint, la seule année où il concourut, le premier prix de manipulations nouvelles (cartes et dés à coudre).
J. C.
Notes :
– La Prestidigitation sans Appareils de Camille Gaultier (1872-1943) a marqué durablement l’illusionnisme mondial. Ce livre encyclopédique, signé d’un magicien visionnaire érudit et excellent praticien, fait non seulement le point sur les meilleures techniques et routines de son temps, mais il en dévoile un grand nombre de nouvelles.
A lire :
– La Prestidigitation sans Appareils de Camille Gaultier (Edition originale, 1914. Réédition chez Fantaisium, 2018).
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