Production : Cultival. Création numérique et sonore : Moment Factory studio.
Le Dôme des Invalides
L’église des Invalides (1674-1706) est un chef-d’œuvre de l’architecture classique française due à Jules Hardouin-Mansart (l’architecte de Versailles et de Louis XIV) devenue panthéon militaire et véritable symbole dans le monde car abritant le tombeau de Napoléon Ier (1769-1821) depuis 1861, dans un monumental sarcophage en « grès métamorphique ».
Un lieu de mémoire et de récupération politique
À la suite d’un arrêté des consuls, en date de septembre 1800, Napoléon Bonaparte, alors Premier consul, décide de placer sous le Dôme des Invalides un premier tombeau, celui de Turenne. Le 22 septembre, jour anniversaire de la fondation de la République, a lieu la translation du corps de Turenne. Lors de la cérémonie, Lazare Carnot, alors ministre de la Guerre, prononce l’oraison funèbre en présence de Napoléon. En 1807-1808, Napoléon Ier fait construire par Guillaume Trepsat, un monument funéraire pour présenter l’urne contenant le cœur de Vauban. Ce monument n’est plus visible aujourd’hui car il a été remplacé en 1847 par un cénotaphe, réalisé par le sculpteur Antoine Étex (1808-1888), qui reprend la forme du tombeau de Turenne dans un souci d’harmonie. Les deux grands serviteurs de la monarchie sont ainsi mis au service de l’idéologie républicaine puis impériale. Le 28 juillet 1835, sous la monarchie de Juillet, après l’attentat Fieschi contre Louis Philippe, un caveau est aménagé dans une galerie souterraine du Dôme. Il contient quatorze des personnes tuées lors de l’attentat.
En 1840, Louis Philippe Ier fait transférer le corps de Napoléon, de l’île de Sainte-Hélène aux Invalides. En 1841, après avoir été exposé sous un catafalque situé entre l’église des soldats et le Dôme, le corps est installé dans la chapelle Saint-Jérôme, en attendant la construction du tombeau. Ce tombeau aménagé au centre du Dôme par l’architecte Visconti est inauguré le 2 avril 1861 par l’empereur Napoléon III. Le corps de Napoléon est placé dans un cercueil de fer blanc (1821) emboîté dans un cercueil de plomb (1821), lui-même dans un deuxième cercueil de plomb (1840), ensuite un cercueil d’acajou (ou de bois des îles), puis un cercueil d’ébène (1840). Ce dernier est installé dans un sarcophage de quartzite aventuriné de Finlande (4m de long sur 2m de large) installé sur un socle de granit vert des Vosges.
En 1847, les monuments funéraires de Duroc et Bertrand sont installés sur le palier intermédiaire aménagé par Visconti. Ils encadrent ainsi les grandes portes qui mènent au tombeau de Napoléon. Le 20 avril 1858, Jérôme Bonaparte installe la dépouille de son fils aîné, Jérôme Napoléon, et l’urne contenant le cœur de sa femme, Catherine de Wurtemberg, dans le caveau affecté à la famille, situé sous la partie orientale de l’église du Dôme (sous la chapelle de la Vierge).
En 1861-1862, le tombeau de Jérôme Bonaparte est aménagé par Alfred-Nicolas Normand dans la chapelle Saint-Jérôme. En 1862 le monument contenant le cœur de la femme de Jérôme, Catherine de Wurtemberg est transféré dans la chapelle Saint-Jérôme. Le 22 mars 1864, le tombeau de Joseph Bonaparte réalisé par l’architecte Crépinet est disposé dans la chapelle Saint-Augustin. En 1904, le cœur de La Tour d’Auvergne, « premier grenadier » de la République tué en 1800 à Berhausen (Bavière) est transporté dans le caveau des gouverneurs. Il est transféré dans la chapelle Saint-Grégoire en 1927. Après sa mort en 1929, Ferdinand Foch séjourne dans le caveau des gouverneurs jusqu’en 1937. À cette date Paul Landowski (1875-1961) achève le tombeau destiné à ce maréchal de France et situé dans la chapelle Saint-Ambroise. En 1940, le sarcophage du Roi de Rome est déposé dans la chapelle Saint-Jérôme. Ce n’est qu’en 1969, que le cercueil est descendu dans la « Cella ». En 1961, la dépouille de Lyautey (-1934) est transféré du Maroc aux Invalides à la demande de Charles de Gaulle. Le tombeau visible aujourd’hui dans la chapelle Saint-Grégoire réalisé par l’architecte Albert Laprade (1883-1978) est inauguré en 1963.
Le spectacle
Ce projet a demandé deux ans de travail avec une équipe pluridisciplinaire, technique et artistique où l’histoire et la symbolique du lieu sont au centre de l’expérience pour révéler l’esprit et l’aura du Dôme des Invalides. C’est une projection monumentale à 360° en mapping 3D1 où les visiteurs sont invités à déambuler dans l’édifice pendant cinquante minutes pour profiter des mouvements d’images et de sons qui envahissent toutes les parties de l’église, de sa crypte ouverte aux chapelles rayonnantes. Trois séances à la nuit tombée proposent de visiter les lieux autrement, comme une procession collective où l’âme de la pierre se révèle et où l’émotion affleure de ce son et lumière numérique extrêmement bien calé.
Au programme, trois mouvements qui se terminent en apothéose. Le premier mouvement du spectacle est une invitation à la découverte de la construction du célèbre Dôme qui souligne chaque élément architectural, jusqu’à la coupole. La deuxième partie fait découvrir aux visiteurs la mémoire collective du lieu. Un voyage dans le temps propose des fragments d’histoires et de mémoires éternelles. La troisième et dernière partie est une célébration collective du moment présent. Un instant sensoriel qui se conclu par une connexion avec l’esprit de Napoléon Bonaparte dans la scène du « retour des cendres » inspiré de gravures et de textes de Victor Hugo, dans son œuvre Choses vues qui décrit cette journée du 15 décembre 1840 où la dépouille de l’empereur est rapatriée de l’île de Saint-Hélène à la chapelle Saint-Jérôme.
Le spectacle, remarquablement orchestré par des musiques symphoniques, est un jeu de perspective et de trompe-l’œil constant venant accentuer les éléments de décor, un chapiteau, une corniche, une toile peinte, un tombeau, etc. La pierre se pare de couleurs chatoyantes, irréelles ou de polychromies oubliées. Les murs s’animent, les colonnes se fragmentent en tranches horizontales, la coupole s’instille de mille feux où la lumière divine apparait sous forme de faisceaux. Le mur de la chapelle de la Vierge se métamorphose en faisant apparaître des statuts en bas-relief (un saisissant effet optique se confondant aux vrais tombeaux de Turenne). Des ombres de soldats menaçantes surgissent comme les fantômes d’une guerre passée (des silhouettes de soldats de plomb appartenant au Musée de l’Armée). Seul bémol à ces projections, l’apparition du champs de Mars et de la tour Eiffel venant parader au milieu de la nef dans un travelling incongrue qui casse l’unité esthétique de l’ensemble.
Note :
1 Longtemps cantonné aux façades des édifices, le mapping 3D investi depuis la fin des années 2010 l’intérieur des monuments avec plusieurs projets numériques d’importance comme ceux de la basilique Notre-Dame de Montréal en 2017, de la basilique Sainte-Jeanne-d’Arc de Domrémy-la-Pucelle en 2019 ou plus récemment de la cathédrale Saint-André de Bordeaux avec Luminiscence (2023) qui pare les voûtes et bas-côté gothiques de sublimes couleurs polychromiques disparues.
Crédits photos – Documents – Copyrights avec autorisation : BnF, RMN Grand Palais, Paris Musée de l’Armée et S. Bazou. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.