Comment êtes-vous entré dans la magie ? À quand remonte votre premier déclic ?
Depuis tout petit, j’ai été attiré par la scène. Mes premiers pas ont été en tant que musicien dans un orchestre harmonique. Puis un jour, j’ai vu un spectacle de magie avec mes parents pendant les vacances, et j’étais fasciné par ce que je voyais. Je voulais absolument, moi aussi, « faire de la magie ».
Quand avez-vous franchi le premier pas et comment avez-vous appris ?
J’ai appris mon premier tour juste après avoir vu ce spectacle de magie, je devais avoir quatorze ans. J’ai découvert l’essentiel des bases de la magie grâce à des VHS/DVD, des livres et divers gimmicks trouvés sur Magicaplanet. J’ai également passé pas mal de temps dans les clubs de magie de ma ville pour assister à des conférences et échanger avec d’autres magiciens.

Quelles sont les personnes ou les opportunités qui vous ont aidé ? À l’inverse, un événement vous a-t-il freiné ?
Les concours de magie m’ont aidé à me fixer des objectifs. À l’époque, j’avais un numéro avec des colombes et ces concours me permettaient de présenter mon travail. J’avais vingt ans et c’est à double tranchant : cela peut autant encourager que décourager, ce qui a été mon cas. Je perdais petit à petit le sens de ce que je faisais. J’ai eu la chance de suivre la formation en « magie nouvelle » au CNAC. Cela a été un vrai moteur pour moi, car j’ai découvert que la magie n’a pas de limites et que nous ne sommes pas obligés d’être formatés. Bien au contraire, que ce soit grâce à l’enseignement de Raphaël Navarro ou d’Étienne Saglio, cette formation m’a permis une vraie remise en question et a ouvert de nouvelles portes dans mon imaginaire.
Quels sont vos domaines de compétence ? Dans quelles conditions travaillez-vous ?
Je travaille essentiellement sur scène, mais je pratique également le close-up. Je préfère largement la scène, qui me permet de développer un sujet.
Parlez-nous de vos créations, numéros et de votre tout nouveau spectacle I.A. : Intelligence Artificielle – Magie Réelle
Mon spectacle I.A. : Intelligence Artificielle – Magie Réelle est le résultat de peut-être dix ans de réflexions, de notes prises à la volée, d’envies posées sur le papier. Dans ce spectacle, j’ai voulu parler de ce qui, pour moi, est déjà magique dans notre monde : en l’occurrence, la science, et plus particulièrement le temps et la physique quantique. J’ai dû me tordre l’esprit mille fois pour rendre mon propos accessible, compréhensible et drôle, tout en y intégrant de la magie. Pour cela, il fallait surtout que je rende visible l’invisible. Certaines particularités de ce que nous appelons le temps ne sont pas perceptibles à notre échelle, et j’ai dû trouver comment les matérialiser. Je voulais également que la mise en abyme du personnage soit la plus forte possible et que je puisse le jouer avec sincérité. Ainsi, un conférencier venu parler du temps et de sa peur de la mort, qui va devoir y faire face en pleine conférence, était l’histoire qui m’intéressait le plus. L’I.A. est arrivée naturellement, comme une évidence. Je voulais avoir un binôme sur scène, et les interactions entre l’homme et la machine me fascinent. Mon I.A., nommée MIA (Mon Intelligence Artificielle), est une partie de moi : froide mais factuelle, elle dit ce qu’il est parfois impossible d’exprimer en société. Elle me permet de créer des situations et des dialogues absurdes qui, à titre personnel, me font beaucoup rire.


Quelles sont les prestations de magiciens ou d’artistes qui vous ont marqué ?
J’ai beaucoup aimé l’ensemble des spectacles d’Étienne Saglio. Pour moi, c’est de la « vraie magie ». Dans la veine actuelle, j’apprécie le travail de Klek Entos, qui a su créer un univers très riche. Dans les anciennes générations, j’étais fan de Lance Burton, une magie très propre et chic. Il a une classe folle !
Quels sont les styles de magie qui vous attirent ?
Je n’ai pas de style particulier qui m’attire. Je suis plus captivé par un personnage singulier ou une approche que je vais trouver particulièrement « intelligente ». Je pense, par exemple, à Tana Manga, Markobi ou encore Luc Langevin.
Quelles sont vos influences artistiques ?
Paradoxalement, ce qui m’inspire le plus n’est pas la magie, mais le cinéma. Matrix, Black Mirror, ou même Doctor Strange. Que ce soit pour la narration ou les thèmes abordés, ces œuvres sont extrêmement inspirantes. Elles ouvrent des portes sur des univers immenses, avec des moyens colossaux qui leur permettent de faire exactement ce qu’elles veulent.
Quels conseils donneriez-vous à un(e) magicien(ne) débutant(ne) ?
Question complexe… J’ai commencé la magie dans les années 2000, et j’ai cru comprendre que le milieu a beaucoup changé, notamment dans l’accessibilité aux secrets. La première chose que je dirais, c’est : ne surtout pas écouter tout le monde. Chacun a son avis, ce que vous faites ne peut pas plaire à tout le monde, et quelque part, on s’en fiche. Tant que vous avancez dans la direction qui vous plaît, continuez ! Gardez toujours en tête le plaisir et le bonheur dans ce que vous faites. Si vous créez pour plaire aux autres mais que cela ne vous correspond pas, tôt ou tard, vous vous perdrez. Testez des choses, n’ayez pas peur d’échouer. Et si vous devez échouer, faites-le vite pour pouvoir passer à autre chose.


Quel regard portez-vous sur la magie actuelle ?
Mon regard se porte sur ce qui est faisable ou non du point de vue du spectateur. À une époque où la technologie grand public progresse tellement vite, les spectateurs imaginent de plus en plus des trucages sophistiqués qui leur donnent l’impression d’avoir compris, alors que ce n’est pas le cas. Par exemple, certaines lévitations d’objets peuvent leur faire penser qu’un drone est utilisé. Un simple forçage de carte peut être interprété comme un « jeu connecté » (même si ça existe, ce n’est jamais utilisé). Dès qu’il y a une brèche technologique, le spectateur s’y engouffre, même si la vraie solution n’a rien à voir. Et une fois que cette explication est ancrée dans son esprit, la sensation de magie s’efface.
Quels sont vos hobbies en dehors de la magie ?
L’équitation. J’ai découvert cela assez récemment, car j’avais envie d’apaisement et de sérénité. Et c’est exactement ce que j’y ai trouvé. Ces animaux sont très sensibles, très à l’écoute. Ils ont la force d’un bulldozer, mais avec nous, ils ont la tendresse d’un petit chaton. On ne peut que les en remercier.
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Interview réalisée en mars 2025. Crédits photos – Documents – Copyrights avec autorisation : Alexandre Ollier / Eye of Circus / Xavier Constantine. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.