Comment êtes-vous entré dans la magie ? A quand remonte votre premier déclic ?
J’ai toujours cherché la magie, au sens large du terme, au plus profond de moi.
Elle m’a appris, m’a formé, m’a fait voyager là où il n’y a pas de mots,
où il n’y a que l’essence du « caché » et du « signifiant ».
Mon premier déclic est survenu lorsque j’ai vu (comme beaucoup d’autres magiciens) David Copperfield. J’ai ressenti alors un sentiment sans précédent, ce qui m’a amené par la suite sur les terres merveilleuses de « l’art de l’illusion ».
Quand avez-vous franchi le premier pas et comment avez-vous appris ?
Mon premier pas dans la magie fut presque un hasard. Je suis entré dans un magasin pour acheter un tour en forme de jouet, et j’ai ensuite trouvé mon premier livre magique, décrivant plusieurs tours. J’ai trouvé des boutiques de magie en ligne et j’ai commencé à acheter de façon erratique des tours, des DVD, des livres. J’ai aussi participé à des séminaires. Dans le même temps, j’ai contacté des personnalités du monde magique pour partager des idées et des opinions.
Quelles sont les personnes ou les opportunités qui vous ont aidé. A l’inverse, un évènement vous a-t-il freiné ?
Dans mon parcours, j’ai rencontré des gens et des situations qui m’ont aidé à comprendre et à voir les choses dont je n’avais jamais attendu parler. Je n’ai pas eu une vie dite « normale » et j’en suis particulièrement heureux. Je croyais que la vie amène tout le monde sur un chemin particulier.
Je me suis donc mis à travailler très dur pour détecter le vrai « chemin magique », pour le servir avec amour et respect. Avec l’âge, j’ai ressenti une gratitude infinie pour les gens qui m’ont aidé, parce que personne ne peut aller de l’avant tout seul.
Dans quelles conditions travaillez-vous ?
Ce merveilleux travail qu’est la magie m’a donné la capacité de transformation, comme le lézard, de sorte que je peux présenter mon art dans presque toutes les conditions possibles. Toutefois, selon les exigences de chaque représentation, je suis particulièrement prudent avec tous les détails dont j’ai besoin pour donner le meilleur résultat possible.
Quelles sont les prestations de magiciens ou d’artistes qui vous ont marqué ?
J’ai été influencé par de nombreux artistes. Pour faire court, voici quelques noms : Harry Houdini, Jean-Eugène Robert-Houdin, Dai Vernon, David Copperfield, Tommy Wonder, Max Maven, Ricky Jay, Jeff McBride, Kevin James, The Amazing Jonathan et bien d’autres que je respecte et que j’ apprécie profondément.
Quels sont les styles de magie qui vous attirent ?
Chaque style a un intérêt unique et se complète.
Voilà pourquoi je préfère être un magicien de « magie générale ». Je considère qu’il n’y a pas de style qui détermine la qualité ou l’impact qu’on aura sur ses spectateurs. C’est, au contraire, la façon dont nous nous comporterons face au public, la construction de notre routine, la présentation, la forme et notre personnage.
L’esprit est forcé – afin de maintenir la monomanie – de reconstruire des choses obsolètes, ce qui rend les puzzles inutiles, au lieu de créer des numéros qui ont un sens et une signification artistique. Cependant, il y a des artistes qui sont l’exception ; des gens qui ont pratiqué différents styles avant de construire leur personnage.
Quelles sont vos influences artistiques ?
Voilà une question très difficile. L’art est comme l’univers. Il n’a pas de fin.
Un « voyageur d’art » est forcément influencé, il tombe en admiration et est capturé comme un enfant. Depuis les civilisations anciennes, d’Homer au théâtre Kabuki, jusqu’au post-modernisme et les tendances contemporaines ; l’harmonie de l’art est partout. Dans notre corps, dans nos relations, dans la société, dans la vie ! Nous avons donc une dette à respecter. Les enseignements sont partout et tout s’organise comme une harmonie supérieure.
Quel conseil et quel chemin conseiller à un magicien débutant ?
Il ne devrait pas perdre son précieux temps à apprendre des centaines de tours, mais il devrait essayer de perfectionner ses routines pour qu’elles lui « collent à la peau » et expriment sa personnalité. Il devrait également expérimenter de façon créative et étudier avec respect et gratitude tous les arts. Se concentrer profondément sur le détail de la technique, mais aussi sur les éléments dramatiques (scénario, musique, vêtements, mouvements, etc.). Bien sûr, tout cela exige du temps pour étudier et pratiquer. Il faut de la patience, de la passion et de l’amour comme un guide.
Quel regard portez-vous sur la magie actuelle ?
Dans tous les arts, de nos jours, dominent deux faits étranges.
Le premier : la commercialisation qui massacre le besoin de s’exprimer et produit des choses prédigérée de fast food.
Le deuxième : l’offre incontrôlée des connaissances qui façonne une compréhension triviale et conduit à des problèmes esthétiques. Dans la magie, je vois très souvent des routines sans essence et sans signification. Je vois beaucoup de gens pris au piège dans l’illusion de l’analphabétisme et j’en suis désolé.
Heureusement, il y a l’autre côté de la médaille. Certains artistes ont la nécessité de lutter contre cette manière prémâchée de voir les choses. Ils cherchent, sortent des sentiers battus et donnent un sens à notre art. Si vous enlevez le sens à la magie, il ne reste qu’une énigme insignifiante, une coquille vide !
Quelle est l´importance de la culture dans l´approche de la magie ?
La culture est un mode de vie. Elle correspond à l’éducation, au respect et à la courtoisie. Sans elle, il n’y a pas de perception et sans perception, cela engendre la folie et la paranoïa.
Le monde que nous avons construit est une série d’illusions : dans nos relations, dans notre environnement de travail, en amour, et même en nous-mêmes ! L’art abolit les illusions. Il nous réveille, convoque les souvenirs et lutte contre l’oubli.
Si nous voulons devenir sensible à cela, nous devons être initié. Sacrifier notre égoïsme et le mode de vie qu’ont nous a vendu et lutter pour que nous puissions comprendre les enseignements cachés. Se réfugier dans les vraies valeurs que la culture peut offrir. C’est seulement à ce moment que nous obtiendrons du sens. Et cela s’appelle « magie » !
Vos hobbies en dehors de la magie ?
Ma profession est mon hobby et inversement, ce qui est un vrai luxe ! Je dédie donc beaucoup de temps (même mon temps libre) à la magie et à la musique. A part ça, j’aime la lecture, les exercices physiques, ainsi que passer du temps avec de bons amis et ma famille bien-aimée.
– Interview réalisée en mai 2016.
A visiter :
– Le site de Tristan.
Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants-droit, et dans ce cas seraient retirés.