Installés depuis huit ans maintenant au Rio de Las Vegas, Penn & Teller ont cette qualité, que d’une année sur l’autre, leur show change. Le tour d’entrée reste le même (évasion de deux boîtes), le tour de fin aussi (Don’t cross the yellow line) mais entre-temps, il y a quelques nouveautés. C’est le seul show, affirme la pub, qui commence une heure avant l’heure légale ! En effet un pianiste de jazz joue ses compositions pour faire patienter. Toutes les cinq minutes, il exhorte le public à monter sur scène pour examiner une caisse, à rentrer à l’intérieur, puis à aller signer une enveloppe A4 qui se trouve sur un support. Donc on assiste à un défilé perpétuel. Puis le show commence. Penn Jillette rentre côté jardin et la caisse s’ouvre : Teller est à l’intérieur.
Tissus
Penn & Teller vont exécuter le tour de la grande bande d’étoffe coupée en deux et raccommodée. C’est un vieux truc qui a été fait par bon nombre de grands magiciens du passé. En, fait c’est la corde coupée avec un tulle de douze mètres sur quarante centimètres. Sauf que si deux assistants tiennent les bouts, ça remplit la scène à peu de frais. Ici, ils font monter une petite fille. Le tissu sera coupé deux fois (pliage à la première fois et prise d’une « boucle » à la manche la seconde), puis l’ensemble est raccommodé. Ensuite en se mettant à deux, toujours avec la même bande, ils font le tissu qui passe à travers le cou, puis la petite fille est renvoyée à sa place.
Cups & balls
Vient alors une version de Cups & balls qui n’est certes pas nouvelle chez eux, et dont je ne vois pas bien ce que cela apporte. Trois guéridons répartis en avant-scène, trois gobelets de taille normale, trois boules. Les boules vont voyager deux fois, puis apparitions de balles de base-ball en grosse charge. Ensuite, ils refont la même chose avec des gobelets transparents et débinent le truc. Franchement à quoi ça sert ?
Aéroport
Vient ensuite une routine entièrement nouvelle avec un de ces portails d’aéroport qui nous agacent tous. Et Penn avec un texte vindicatif sur la chose, fait passer divers objets à travers le portique en faisant sonner ou non. A la fin, il y a une apparition d’une étoffe assez grande et sous l’étoffe une fille couverte de bijoux qui fait sonner l’ensemble. La fille est en fait celle qui va faire plus tard le numéro de feu avec Penn.
Penn regagne la basse qui se trouve à côté du piano, Teller fait une courte routine de cigarettes avec explication (pourquoi ?), puis une disparition au faux pouce non expliquée.
Floating ball
Vient alors une routine de boule volante, qui est excellente. La boule est plus grosse qu’une boule de bowling, on la devine dans une sorte de caoutchouc semi dur. Tantôt elle rebondit, tantôt elle vole, passe dans un cerceau, etc. Ce qu’il y a de bien c’est qu’il n’y a pas de balancement et que la transition entre les moments où elle vole et les moments où elle se met à rebondir sont parfaits.
Prédiction
Vient ensuite une prédiction. C’est l’enveloppe qui a été signée par plus de cent personnes au début du show, mais comme elle a été gardée en coulisses pendant vingt minutes, on a eu le temps de faire tout ce qu’on veut dedans. Teller montre un livre de blagues le fait circuler parmi les spectateurs et en chope un en lui demandant de choisir une blague dans le livre. Il ajoute : « choisissez en une dont vous êtes certain de comprendre la chute ! » Quand c’est fait, le type est invité sur scène assis sur une chaise et derrière son dos Teller décachète l’enveloppe. En sort une grande bande de papier pliée en accordéon. Le type doit s’arrêter de lire avant la chute. Penn & Teller s’éloignent l’un de l’autre ce qui déplie la banderole et toute la salle lit la chute d’une seule voix, ce qui évidemment surprend le spectateur.
Avaleur de feu
Teller passe au vibraphone et Penn va exécuter sa routine d’avaleur de feu, avec la dame de l’aéroport, qui était déjà dans les autres shows. C’est la routine que l’on a vue sur toutes les vidéos. Elle doit bien dater de quinze ans si ce n’est plus. L’alcool est dans des flûtes de champagne, ils sont tous deux sur un canapé rouge et l’ensemble se fait sur le mode de la séduction réciproque. Beau ballet sur une belle musique.
Femme coupée en deux
On apporte une table et la dame va être coupée en deux par Penn & Teller. La version présentée ici est amusante, car elle est coupée à la scie et lors de la séparation des deux morceaux on voit bon nombre d’organes et quelques viscères se casser la gueule, mais l’ensemble reste propre, je vous rassure !
Solid Gold Fish
Teller vient en avant scène faire sa fameuse routine de l’aquarium et poissons rouges. Une spectatrice est assise sur une chaise et Teller lui remet un aquarium de verre. Il fait alors une courte chasse aux pièces qu’il jette dans l’aquarium pour le bruit. Sur scène se trouve également un autre aquarium plus grand sur pied. Teller plonge ses mains dedans et à chaque fois en ressort une poignée de pièces de 1ct qu’il jette dans l’aquarium de la spectatrice. Cela est répété trois ou quatre fois. Puis Teller vient reprendre une poignée de petites pièces dans l’aquarium de la spectatrice et les jette dans le grand aquarium où ils se transforment immédiatement en une nuée de petits poissons rouges. Très beau à voir. Il marque un temps, puis vient reprendre une poignée de poissons rouges, qu’il jette dans l’aquarium de la spectatrice où ils se retransforment en pièces de 1ct.
Close-up time
Certains d’entre vous doivent se souvenir d’une routine passée sur YouTube, dans laquelle on voit un type faire choisir une carte et la retrouver. Sauf que tout a changé et qu’on ne s’en aperçoit pas : le fond à changé, la couleur des cartes, le tapis de table, etc. C’est une version de scénique de ce concept que Penn & Teller on voulut reproduire avec l’autorisation du créateur. On apporte donc un plateau qui représente une petite pièce. Une fenêtre à travers laquelle on voit un bâtiment de ferme rouge, deux chaises, une table recouverte d’un tapis vert. Penn fait monter un spectateur à qui il confie une petite caméra qui va être retransmise sur un grand écran se trouvant au dessus de l’ensemble.
Penn va faire une courte routine d’apparition de vaches miniatures qui lui sont passées par Teller qui se trouve derrière la fenêtre. Si on regarde l’écran, on a l’illusion d’une routine type Slydini. Si on regarde Penn, on voit absolument tout : lappings, reprises, changes, etc. Et c’est d’ailleurs là dessus que comptent nos deux compères, car on ne peut pas avoir l’œil partout. A la fin, tout a changé : le tapis de table, la vue par la fenêtre et …et non, je ne vous le dirai pas, mais il y a une grosse surprise : on est sur le cul la première fois qu’on le voit !
La cloueuse électrique
On apporte sur scène une planche longue et étroite tenue par deux tréteaux. Penn fait la démonstration d’une cloueuse électrique. On voit que de gros clous entrent à pleine puissance dans la planche, pas de doute, ça doit faire mal. Penn explique alors le principe et montre que les clous sont dans les chargeurs linéaires un peu semblables aux chargeurs de balles de mitrailleuse mais en plus petit. Chaque chargeur contient une centaine de clous, peut-être plus. Penn montre deux nouveaux chargeurs dans lesquels il a enlevé d’avance certains clous avec une pince et il commence à clouer alternativement la planche et son autre main, expliquant que la difficulté du truc c’est de se souvenir de la place des clous qui manquent ! Le tout est fait à une vitesse vertigineuse et chaque fois pas de clou au contact de la main. A la fin la cloueuse sera même appliquée contre sa figure. L’ensemble est fait tellement rapidement, que cela laisse les spectateurs pantois !
Le cornet
Teller revient avec une feuille de papier grâce à laquelle il fait un cornet. Le cornet est confié à une spectatrice qui s’approche du bord de la scène pour pouvoir le tenir mais reste dans la salle. Teller lui donne un petit foulard rouge et lui demande de le placer dans le cornet ce que fait la dame. Teller montre une baguette, donne un coup sur le foulard, la dame déplie le corner : le foulard a disparu. Bien fait, très net, et encore plus rigolo quand on sait comment ça marche ! Belle application d’un truc déjà existant.
American flag
Puis c’est la routine du drapeau américain. Le drapeau, enlevé de sa hampe, est plié selon les règles militaires et enveloppé… dans la déclaration des droits de l’homme ! On imagine bien le numéro de corde raide et le texte qu’il faut pour ne pas se prendre des procès de la part des vétérans du Vietnam ou autre. J’ai pas tout compris, mais ils sont perpétuellement sur le bord ! Le drapeau va disparaître dans la déclaration roulée en forme de tube. Puis il réapparaît et l’explication complète du procédé est donnée. A la fin, véritable disparition, puis réapparition sur la hampe où le drapeau flotte au vent d’un ventilateur dissimulé.
La rose
Puis c’est Teller qui revient et va faire un truc très poétique sur une musique de piano. Une rose est mise dans un vase uni fleur. Un spot, placé devant, projette l’ombre de la rose et du vase sur une feuille de papier posée sur un chevalet qui se trouve derrière. Teller, avec un drôle d’air sort alors un canif qu’il déplie soigneusement à la façon de Jack l’éventreur qui se prépare à commettre un nouveau crime et, pétale par pétale, il mutile l’ombre de la fleur en donnant des coups de couteau dans la feuille de papier. Les vrais pétales, auxquels il ne touche pas tombent un par un, ainsi que les feuilles, avec un synchronisme parfait. Puis il cisaille l’ombre de la tige qui tombe. Il se blesse alors un doigt avec son couteau, pose sa main sur le papier : le sang coule : blessure. Teller répare sa blessure, prend son couteau, le plie, le range et sort. Belle séquence qui laisse quand même les gens dans la stupeur.
La ligne jaune
On attaque maintenant le final Stay behind the line. Un grand rouleau de papier jaune descendant des cintres est déroulé sur la scène de façon à partager celle-ci en deux. Chacun devra rester de son côté. Penn & Teller descendent dans la salle et demandent chacun la participation de quelqu’un qui connaît les armes à feu et les pistolets en général (ce qui au Nevada n’est pas bien difficile à trouver.) Ils reviennent chacun avec leur markman et lui donnent un pistolet à examiner. Le canon est surmonté d’un viseur infrarouge et lorsqu’on braque l’arme sur quelqu’un pour viser, on voit la tache rouge sur la personne. Une fois les deux armes vérifiées, chaque tireur reçoit une balle qu’il doit graver avec ses initiales ; ce qu’ils font. Il n’y a que des spectateurs pour croire que l’on puisse graver ses initiales sur une balle sphérique de moins de un centimètre avec un canif, sans appui, mais bon, ça passe… Puis les tireurs chargent eux-mêmes les armes, tandis que Penn & Teller reviennent chacun des coulisses avec une plaque de verre montée sur un trépied qu’ils placent devant leur figure. Ils s’emparent chacun de leur revolver, se visent mutuellement et à « 3 » tirent. Les deux plaques de verre sont trouées au milieu et ils tiennent chacun dans la bouche la balle de l’autre. Les « signatures » sont vérifiées : tout correspond.
Les spectateurs sont renvoyés à leur place et Penn & Teller saluent à peine et partent à fond de train chacun de son côté vers la sortie pour l’atteindre avant que n’arrivent les premiers spectateurs à qui ils vont serrer la main un par un, poser pour des photos, dédicacer des programmes, etc. Ce sont les seuls magiciens qui ont de bons produits dérivés : plusieurs livres très intéressants. Plusieurs séries de trois DVD de leur série télé Bullshit !, un jeu marqué, un programme, etc. En bref, un bon spectacle, qui évolue sans cesse et deux anticonformistes qui entendent bien le rester, mais font de la magie sur un autre registre et sortent définitivement des sentiers battus.
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