Comment êtes-vous entré dans la magie ? À quand remonte votre premier déclic ?
Le premier déclic remonte à 2012 où deux amis à moi m’ont rendu fou avec un tour de cartes lors d’une soirée. J’ai vécu une émotion tellement étrange, cela me donne encore des frissons, c’était complètement nouveau pour moi. J’ai ensuite rapidement atterri à la boutique Abracadabra d’Yves Doumergue, le virus était né.
Quand avez-vous franchi le premier pas et comment avez-vous appris ?
Mon meilleur ami Albin m’a appris mon premier tour dans un couloir du 2ème étage – en face de la B213 – au lycée La Martinière Monplaisir de Lyon. J’ai appris à travers des bouquins comme les Cours de Cartomagie Moderne, l’encyclopédie de Roberto Giobbi, les DVD’s de Jean-Pierre Vallarino, David Stone et Jean-Luc Bertrand, les supers conférences à l’amicale Robert-Houdin de Lyon, les congrès de magie en France et à l’étranger, mais par-dessus tout : en pratiquant ! J’ai commencé à proposer des spectacles à ma famille, mes proches, mes ami.e.s , des inconnus, puis à peu près toutes les personnes que je rencontrais à l’époque ! La devise du général Claude Martin, fondateur des écoles la Martinière : « labore y constancia », « travail et persévérance », m’a toujours grandement inspiré.
Quelles sont les personnes ou les opportunités qui vous ont aidé. À l’inverse, un évènement vous a-t-il freiné ?
Je dois beaucoup à MagicPic, créée par les magiciens Anthony Istar et Florian Gabert. Initialement MagicPic était l’association de magie de l’INSA Lyon. Depuis huit ans désormais nous sommes un collectif et j’organise les rencontres une fois par mois où tout le monde est bienvenu.e. C’est un peu l’Illegal Magic Club de Paris mais version Lyonnaise ! J’écris ces lignes depuis une colocation magique avec Andrea Genzel, qui m’aide bien au quotidien à aller plus loin dans mon univers et avec qui j’écris régulièrement des numéros. En 2016, j’ai eu l’opportunité de rencontrer Cédric Bertox qui m’a fait une promesse et l’a tenu sept ans après : m’accompagner sur la mise en scène d’un numéro, qui est actuellement en cours de peaufinage. Enfin, je dois beaucoup de mes effets à Red Nist, qui a offert encore plus de pouvoir à mon Atebas, ma « tresse magique ».
J’ai remarqué que je suis généralement bien freiné puis inspiré après des chagrins d’amour. Le Covid nous a bien empêcher de performer, mais en même temps il en est sorti de nouvelles créations, j’essaye de voir toujours le côté positif.
Quels sont vos domaines de compétence ? Dans quelles conditions travaillez-vous ? Parlez-nous de vos créations, spectacles et numéros (en solo et avec votre collectif The Martin’s).
Je travaille en close-up. Mon dada c’est d’aller rencontrer les gens, créer du lien, toujours avec le smile ! J’interviens pour les entreprises lors de séminaires, de repas d’affaire, de lancements de produits, et pour les particuliers lors de mariages, anniversaires ou soirées privées. J’adore créer des spectacles intimistes sur mesure, cela crée des moments uniques que je vis seulement une fois dans ma carrière, et ça c’est magique ! J’adore partager des histoires que j’ai eu la chance de vivre à travers mes routines. Avec The Martin’s, nous avons créé des routines de close-up réalisables en duo et en trio, notre interactivité et nos complémentarités offrent une autre dimension à la magie. Nous avons écrit et joué en Thailande un spectacle d’1h30 sur le thème de nos voyages, où nous présentons notre bijou : le « Cocktail master piece », une machine à fabriquer des cocktails.
Comment et pourquoi avez-vous développé l’idée de « la tresse magique » ? Comment intervient-elle dans vos tours ?
L’Atebas, au-delà d’être une tresse en fil, est pour moi un objet qui symbolise les liens que nous tissons à travers nos relations. Elle a une origine peu connue à ce jour. Je m’amuse donc à leur écrire des histoires, et à chercher leurs origines. Le nom « Atebas » viendrait d’un groupe de musique Camerounais qui s’appelait « Atebasse », car les bassistes avaient des dreads en fil. L’Atebas intervient à la fois comme baguette magique, mais aussi comme objet de manipulation, je joue avec les fragments d’Atebas qui la compose, pour faire naître d’autres Atebas, que je partage à mes spectateurs, afin qu’ils puissent découvrir leur pouvoir. Enfin, nous formons un duo, et comme dans tout duo il y a parfois des caprices, parfois elle ne m’écoute pas et en fait qu’à son fil… Dans ces cas-là je m’en sépare, c’est comme cela qu’une de mes Atebas a terminé son chemin dans un musée hippie en Argentine.
Quelles sont les prestations de magiciens ou d’artistes qui vous ont marquées ?
Je dois citer Dani Daortiz, ce mec m’a littéralement envoyé dans une autre dimension lors d’un congrès Master of Magic en Italie. Dans l’école espagnole j’adore Mario Lopez, car il donne beaucoup de sens à sa magie. J’aime beaucoup Étienne Pradier, par son aisance à briser les codes. Deux artistes originaux m’ont aussi bien marqué : E-Motion Sound System, qui crée de la musique seulement avec sa bouche et un artiste dont je n’ai jamais eu le nom qui jonglait avec des cailloux en Colombie, qui m’a littéralement fait pleurer.
Quels sont les styles de magie qui vous attirent ?
La magie espagnole m’a toujours attiré, c’est même pour cette raison que j’ai appris à parler cette langue. Je suis très bon public face à la magie, j’adore en voir et j’adore être bluffé. J’aime beaucoup le mystère, la magie visuelle et les routines avec des histoires qui délivrent un message. Je suis très intrigué par la « magie nouvelle ».
Quelles sont vos influences artistiques ?
J’ai toujours été très influencé par le monde de la trance psychédélique, né de la culture hippie dans les années 1990 à Goa en Inde. Les rythmes et tous les sons psychédéliques nous amènent à toujours être « derrière la musique », à nous laisser porter par l’émotion qu’elle procure et à ne plus comprendre ce qui nous arrive. Finalement cela ressemble beaucoup à ma perception de la magie ! Il y a toutes sortes d’artistes dans l’univers de la psytrance, des jongleurs, des circassiens, des peintres, des vidéos-jokeys, des musiciens, des joaillers… C’est un monde qui rassemble autour de beaucoup de partage, bienveillance, dans lequel je me suis toujours senti bien.
Quel conseil et quel chemin conseiller à un magicien débutant ?
Écouter sa voix intérieure, ne pas laisser les croyances des autres imposer un chemin de vie. Ne pas avoir peur de faire des erreurs car on apprend, on avance et on grandit. Pratiquer quotidiennement l’art magique dans toute situation, cela nourrira votre approche, votre univers et votre magie ! Ne rien laisser de côté, intéressez-vous à plein de choses : théâtre, danse, cinéma, voyage… Tout est source d’inspiration !
Quel regard portez-vous sur la magie actuelle ?
Nous vivons dans un monde assez saturé et je trouve difficile de suivre tout ce qu’il se passe. En tout cas, le côté positif c’est qu’il se passe beaucoup de choses. Je continue de découvrir des univers magiques géniaux (le dernier en date : Moulla à Avignon). Nous sommes de plus en plus nombreux, c’est un pas en avant pour être mieux reconnu, et plus de cerveaux pour développer notre art ! Enfin nous avons la chance de pouvoir le partager, j’ai pu constater lors de mes voyages que la magie de close-up est inexistante dans bien des pays.
Vous avez voyagé à travers de nombreux pays dans le monde. Quelle est l´importance de la culture dans l´approche de la magie ? Comment sont perçus vos tours et votre personnage ? Qu’en tirez-vous comme leçons et expériences humaines ?
Dans certaines cultures la magie est perçue comme dangereuse, dans d’autres comme une médecine ou un divertissement. Pour partager son univers, il faut savoir s’adapter et non s’imposer, en étant à l’écoute. En s’adaptant, on introduit un cadre de confiance, et une fois ce cadre installé, il est possible de pouvoir librement exprimer son personnage et ses tours, et là c’est incroyable !
Ce que je tire comme leçons et expériences de mon dernier voyage de treize mois, c’est que les croyances sont extrêmement fortes. Le fait d’être confronté à d’autres croyances à des années lumières des nôtres, en Europe, bouscule notre esprit. Notre réalité est toute petite. Je retiens une chose avec la magie : peu importe les croyances, c’est un art qui permet toujours de se connecter d’humains à humains, même avec la barrière de la langue. Elle permet de sortir des codes, et ça c’est magnifique !
Vos hobbies en dehors de la magie ?
Le secteur de l’énergie, plus précisément la performance énergétique des bâtiments. Le montage vidéo en tout genre, l’hypnose, la randonnée, les treks et les voyages occupent une bonne partie de mon temps. Et bien sûr : continuer de découvrir la vie !,
À visiter :
Interview réalisée en janvier 2024. Crédits photos – Documents – Copyrights avec autorisation : Clarissa Genzel, Claire Latour, Clarissa Genzel, Lucas Dmj, Nicolas Bosia, Martin Beguinot, Albin Millet et Paulin Nectoux. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.