Bertox, Léopoldine et Maxime Delforges, le trio grenoblois de Parenthèse cubique nous a donné une belle leçon de créativité lors du concours de scène de la FFAP. Le jury ne s’y est pas trompé en leur décernant le premier prix en catégorie grandes illusions.
Le pari était risqué : reprendre une illusion connue et pratiquée par une kyrielle de magiciens pour en faire un numéro unique. Ce numéro c’est le carton volant ou Flying box, popularisé par l’américain Andrew Mayne et les hollandais de Magic Unlimited (Gravity box).
C’est André Kole qui est à l’origine de cette illusion avec son effet No feet présenté, entre autre, par Doug Henning en 1983 dans son show Merlin. André Kole qui s’est, lui-même, inspiré des travaux de Joe Karson (1949), l’inventeur de la boule zombie.
Du copiage à la création
De tout temps les magiciens se sont copiés entre eux. Un besoin chronique à reproduire à la virgule près le travail que certain on mit des années à mettre en oeuvre. Si la copie est un passage obligé dans l’apprentissage de la prestidigitation, celle ci doit vite laisser la place à l’interprétation. Si le magicien est rarement le créateur d’un effet ou d’un tour, il peut se démarquer et être original par l’adaptation qu’il en fait. Ce qui compte n’est pas l’effet, ni encore moins le truc, mais « l’enrobage ». Quelle présentation, quelle mise en scène et quel sens apporter ?
La copie atteste d’un manque flagrant de créativité ! N’est pas créateur qui veut. Créer, c’est avoir une solide connaissance du sujet que l’on va traiter. Savoir ce qui s’est fait et quelles en sont les sources. Pourquoi refaire telle ou telle illusion si tout à déjà été dit ?
Beaucoup d’illusions se suffisent à elles-mêmes. Il faut convenir que certaines d’entres elles ont un fort potentiel créatif. Il n’y a qu’à voir aujourd’hui, le nombre de version de la femme coupée en deux créée en 1920 par Selbit !
Pour celui qui s’en donne la peine, les possibilités sont énormes. Rien n’est impossible et l’évolution de la magie prend pour base tout ce qui a été inventé de part le passé.
Notre trio grenoblois a compris tout cela. Ils savent que pour faire évolution l’art magique, il faut allé chercher là ou d’autres se sont arrêtés en chemin. Comme le disait si bien Dai Vernon : « on s’arrête toujours de penser trop tôt ».
Comment utiliser toutes les ressources du carton volant ?
Maxime Delforges avait tenté de répondre à la question quand il a adapté l’effet avec son trio Just Imagine. Fort de cette expérience, Maxime renouvelle l’aventure avec son ami Bertox et Léopoldine .
Le numéro
Deux hommes habillés en noir arrivent chacun d’un côté de la scène. L’un transportant une sorte de réverbère industriel et l’autre faisant rouler une boîte en lycra blanc. Après avoir soumit la boite aux radiations du réverbère, celle ci commence à léviter dans l’air. Les deux hommes réagissent aux mouvements générés par ce cube mystérieux comme si il était doué d’une vie. Effectivement, la boite est ouverte et apparaît la tête d’une femme. S’en suit un jeu de cache cache à trois, où les lois de l’apesanteur n’ont plus de prise sur la matière.
L’interaction est constante entre le cube et les deux hommes. Les corps s’allongent de façon spectaculaire comme si l’intérieur de la boîte modifiait la matière et l’espace temps. Au final, l’expérience s’arrêtera comme elle a commencé.
Le trio a choisit un esthétisme moderne en noir et blanc. Les costumes noirs vont de paire avec le réverbère et le socle à roulette. Le cube est l’élément de couleur blanche qui se détache du fond, comme la cravate et les bretelles des deux compères. Les couleurs s’inverseront lors d’un beau changement de costumes sous couvert d’un tissu. Ainsi, le contraste du départ est rétablit, les deux hommes faisant corps avec la mystérieuse boîte.
Il faut également souligner le travail de la bande son qui joue sur la dissonance par l’emploi subtil du didjeridoo. La lumière est aussi importante car c’est par elle que tout commence. La magie opère par la présence lumineuse du réverbère.
Parenthèse cubique, comme son nom l’indique, est plus une expérience éphémère qu’une simple grande illusion de plus. L’accent est mit sur la géométrie des formes (le cube et les sphères des balles) et des mouvements (gestuelles). Refusant le côté spectaculaire généralement attribué aux illusions scéniques, le trio grenoblois joue la carte de l’intelligence et de la subtilité avec brio.
A visiter :
– Le site de Parenthèse cubique.
– Le site de Bertox.
– Le site de Maxime Delforges.
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