Le grand retour de Michel Polnareff sur scène est l’occasion de revenir sur un artiste d’exception, qui est devenu au fil des années une légende vivante. Dès son plus jeune âge, sa vocation est la musique, un des arts les plus accessible où il va exceller. Que l’on aime ou non le chanteur, n’est pas la question. Ce qui nous intéresse, c’est la construction d’un mythe, où comment le jeune Polnareff, à la fois premier prix de conservatoire de piano et beatnik de la butte Montmartre, est entré dans l’inconscient de milliers de personnes.
Invisible depuis une trentaine d’année. Disparu de la scène française au milieu des années 70. Exilé aux Etats-Unis. Il sort néanmoins quelques albums studio jusqu’en 1990. Vient ensuite un silence de dix-huit ans, excepté un « live » sorti en 1996 et quelques « singles » éparpillés. Absent physiquement, Polnareff n’a jamais été aussi présent. C’est là tout le paradoxe. C’est justement cet éloignement qui le rend éminemment actuel. Entretenant le mystère autour de son personnage, il a su se faire désirer au fil des années, construire encore un peu plus son image d’artiste énigmatique et insaisissable. Il surgit là où on ne l’attend pas. Il provoque le scandale comme en 1972 avec sa « Polnarévolution » où il montre ses fesses sur d’immenses affiches placardées dans les rues. Dès ses débuts en 1966 il s’impose en tant que chanteur, compositeur et interprète accompli. Le succès est immédiat et foudroyant. C’est pendant cette période qu’il sort ses meilleures chansons : «La poupée qui fait non», «Love me, please love me», «L’amour avec toi » et «Le bal des laze», un chef d’œuvre d’une force lyrique extraordinaire. Avant même de s’exiler aux Etats-Unis il était déjà devenu une icône pour son public qui lui sera fidèle jusqu’au bout. Il entrera ainsi au panthéon de la chanson française avec des oeuvres intemporelles et magnifiques dont l’emblématique «Lettre à France» et le populaire «On ira tous au paradis».
«Dans la tête de Michel Polnareff» : le concert
Un retour incroyable pour ses admirateurs. Le retour d’un être cher, disparu et qu’on croyait perdu. L’attente et les espoirs étaient immenses. Pour ce «come back» à double-tranchant, fidèle à ses grands concerts des années 1970, l’artiste renoue avec un spectacle total, où la scénographie est magnifiée pour servir au plus près ses œuvres musicales.
Michel Polnareff, le perfectionniste n’a rien laissé au hasard pour que le public soit immergé dans la magie de son univers. Tout est construit autour d’un symbole, érigé comme une image charismatique au dessus de la scène : les lunettes du chanteur. Les fameuses lunettes blanche dessinée par Pierre Marly en 1971, spécialement pour l’artiste. Les spectateurs voient littéralement à travers ses yeux dans une mise en abyme astucieuse. C’est la fameuse «Polnavision», une manière de faire entrer directement le public dans sa tête. Le programme officiel est traité de la sorte, avec lunette 3D à l’appui. «L’amiral» , surnom utilisé sur le Polnaweb, immerge les spectateurs dès leur entrée. Les imposantes lunettes nous saute aux yeux et nous renvoie souvent notre propre image. Pendant toute la durée du concert,
elles retransmettent des images vidéo du chanteur et des spectateurs présent dans la salle, dans un jeu de va et vient ludique et interactif. Tout le monde est un peu « Polnareff » dans son âme, tout le monde s’est attribué une partie de son univers. Ses chansons font parties de l’inconscient collectif, ce qui crée un lien exclusif entre la star et son public. D’ailleurs, tout le marketing va dans ce sens en proposant aux fans une horde de produits dérivés, jusqu’à se déguiser en Polnareff (lunette et perruque) et aller ainsi au bout du mimétisme ! On l’aura compris, Michel Polnareff maîtrise son image comme personne et c’est pourquoi le public s’identifie si bien à lui.
Un dernier point sur la scénographie. Une énorme alcôve, style abside d’église entour les musiciens. Cette structure est habillée d’un manteau de lumières et d’écrans vidéo, ce qui permet des effets visuels ahurissants et magiques. Et pour cause, leur conception a été confiée à Georges Proust, le directeur de la maison de la magie à Paris. Michel Polnareff lui-même n’hésite pas à parler de « musée de la magie » quand il fait allusion aux effets spéciaux diriger par Michel Gery. Toute cette virtuosité visuelle est au servir de la musique, et quelle musique !
Au niveau du son, le concert est une merveille. Polnareff a volontairement choisi son répertoire dans ses classiques pour renouer avec le public et ne pas le décevoir. Seul deux ou trois chansons inédites sont au programme. Si la majorité des titres sont connus, en revanche l’orchestration est complètement nouvelle et éclaire ses classiques sous un nouveau jour. Il faut dire que l’artiste est un mélodiste extraordinaire et qu’il a crée de nouveaux arrangements qui passent en revue les styles les plus éclectiques : rock, jazz, opéra, hard métal. Et si cela ne suffisait pas, la star a choisie la crème des musiciens et s’est fait entouré des meilleurs mondiaux dans leur catégorie. Ils méritent tous une standing ovation tant leur performance force le respect. A la direction musicale et à la basse Bunny Brunel, à la batterie Virgil Donati, à la guitare Tony MacAlpine. Michel Polnareff n’a rien perdu de sa virtuosité. Même si il ne peu plus monter dans les aigus comme avant, sa voix donne toujours le frisson. Avec tous ces éléments l’artiste atteint le sublime sur des titres tel que « Le bal des laze », «Qui a tué grand maman», «Love me please love me».
Pendant plus de deux heures de show sans interruption, le sexagénaire Michel Polnareff se livre tout entier, comme libéré d’une trop longue séparation avec son pays d’origine. Humble et généreux, sa prestation émeut le public qui l’acclame debout avec un «Ban bourguignon» en prime. L’artiste est touché de cette attention, et nous, nous repartons avec des rêves plein la tête.
A voir :
– DVD du concert « Ze(re)Tour 2007 » disponible chez Universal music.
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