Levent au Gala d’ouverture du vendredi 25 septembre
C’est une des révélations du congrès FFAP 2009.
Levent, est un grand showman américain, encore inconnu en France. Au cours du gala d’ouverture il nous a offert un époustouflant spectacle de trente minutes.
Aussi bien à l’aise dans la comédie et le burlesque que dans la manipulation pure et dure, il faut le dire, Levent nous a complètement bluffé.
Arrivé sur scène habillé d’une improbable chemise rose à carreaux, le magicien ouvre une mallette sur laquelle est écrit son nom en lettres jaune. Il commence à déballer ses tours les plus loufoques sur un rythme soutenu où il va entremêler des passages de pure manipulation.
Nous pensons être en terrain connu mais celui-ci se transforme bientôt en un exercice d’une subtilité rarement vue. Car il faut une connaissance extrêmement poussée des tours de magie et de leur histoire pour proposer au public une relecture de situations et de gags stéréotypés. Tout l’art de Levent est de revisiter des classiques du gag, de la comédie et de la prestidigitation pour les sublimer. L’attente des spectateurs est constamment prise à contre-pied dans un dénouement fait de surprises. Le divertissement et le plaisir sont extrêmes dans ce bric à brac d’effets tout feu tout flamme.
Voici les tableaux et saynètes proposés par l’artiste
– Une apparition et une disparition d’une carte géante non pas grâce à la technique du back and front, mais parce que le tarot de la carte est du même motif et se confond avec celui de la chemise à carreau du magicien !
– Le gag de la corde raide qui traverse le corps. Les deux morceaux sont révélés à la fin.
– Une torsion classique d’une grosse cuillère en main qui se ramollit au point de rupture jusqu’à ce que la queue de la cuillère tombe sur le sol.
Le même effet est présenté avec une fourchette et nous prend à contre-pied car ce n’est pas une dent de la fourchette qui se tord, mais un des doigts du magicien qui finit par tomber par terre. Le doigt est ramassé, et fixé à sa place sur sa main avec une agrafeuse.
– Trois petits effets mineurs qui nous permettent de souffler : les mains et les genoux qui se croisent rapidement, et les doigts enlacés avec le majeur qui pend comme un gond de cloche. Et l’éventail de cartes qui rétrécit ? (En réalité c’est seulement le magicien qui recule jusqu’au fond de la scène !). Le gag terminé, il revient sur le devant de la scène et effectue un deuxième effet comique grâce à une carte témoin jumbo tenue en main droite. Pour finir la routine, Levent réalise l’effet classique des cartes diminuantes, le vrai, celui de Robert-Houdin et à la perfection. L’éventail devient alors de plus en plus petit jusqu’à disparaître complètement.
– Une présentation à rebondissement des trois cordes inégales qui deviennent égales. Une corde est placée autour du cou. Les deux autres sont nouées, le nœud disparaît et nous voyons maintenant une seule grande corde. Enfin deux cordes sont de nouveau inégales. Nous devons choisir entre la moyenne ou la grande. Celle qui est choisie s’allonge énormément. Elle est placée dans un sac. Celui-ci une fois déplié représente une bannière avec écrit dessus « The End ». L’écriture est faite en corde !
– La chasse aux pièces : Un frisbee est posé sur le sol. Le sceau à champagne est exposé. Une bouteille en est sortie. Musique « please » et c’est parti pour une cueillette de pièces incroyablement variée, jusqu’à la prise d’une oreille de spectateur ! Le final est sympathique et fait penser aux spectateurs profanes qu’il en a profité pour piquer un portefeuille, des colliers…
– Il place une bouteille dans un sac en papier. Il extrait un lapin et jette le sac après l’avoir froissé. Il boit au goulot le lapin qui est tenu comme une bouteille et lui essuie ensuite les fesses. Il lui injecte un liquide avec une seringue. Ensuite il hypnotise le lapin qui relève quand même la tête. Trois fois sans succès. Il menace le lapin avec son pistolet. Alors il s’endort, la tête se couche ! Puis il lui tire des grandes antennes de ses oreilles, tire sur sa queue qui s’allonge (bruit de tondeuse à gazon qui démarre).
Le lapin est alors mit dans un orgue de barbarie. Le magicien tourne la manivelle et actionne le mécanisme qui fait ressortir l’animal aplati par les deux rouleaux. Le dessin du lapin est alors replacé dans la boîte et regonflé grâce à une pompe à vélo. Le lapin ressort avec un énorme ventre qui est éclaté avec une baguette et il redevient normal. C’est surréaliste.
– Les lames de rasoirs. Une grande pancarte indique ici « les lames de rasoir ». Puis une pancarte autre ici « le fil dentaire ».
Le tour est classique jusqu’au moment ou le fil ressort avec toutes les lames. Un morceau de la langue est sur le fil après la dernière lame ! C’est alors qu’il replace sa langue puis ressort l’agrafeuse pour la fixer!
NB : Pour compléter notre article bibliographique sur le fil hindou, Philippe DAY nous a écrit le 01/10/2005 « … Je tire le fil, les lames se retrouvent sur le fil. Le problème c’est que la langue est aussi nouée au bout du fil. Donc je prends une lame pour me couper la langue. Finalement je me raccommode la langue avec une agrafeuse… Voilà, voilà… A bientôt ».
Pour cet effet, qui est la poule, qui est l’œuf ? Tapez un ou tapez deux (idée d’un autre Philippe).
– Levent apporte sa pierre à l’édifice du tour des six foulards. Il fait voyager les nœuds plusieurs fois d’une manière aussi magique que Jean Merlin en ajoutant un repère « sympathique » pour les spectateurs. Il s’agit d’une petite pancarte modifiable avec les mots LIEN / KNOT et RIEN / NOT. Il inverse les lettres L / K et R / N et les nœuds suivent ! Pour mimer le voyage des noeuds il se met accroupi et fait marcher ses index et majeur droits d’un socle à l’autre !
Finalement il recompte ses foulards et fait apparaître une puis deux bouteilles, et enfin un lapin. Il le présente comme son prof de magie. La preuve ? Il présente le tour de la carte qui disparaît en la retournant, le tarot est fait de fourrure et se confond avec le poil du lapin ! Puis il sort un long fil de la gueule du lapin avec pendu dessus des lames de rasoirs !
– Le foulard qui change de couleur en le passant à travers le poing. Le foulard blanc devient rouge, le rouge devient blanc. La fausse explication arrive et le foulard en finale se trouve être moitié rouge et moitié blanc.
– Le magicien éventaille un jeu de carte jumbo et demande à une spectatrice montée sur scène de choisir une carte. Une carte sort nettement de l’éventail et remue de droite à gauche (Le forçage gag de Dereck Dingle repris par de nombreux magiciens) Elle est retournée pour laisser apparaître le pronom MOI ! Pour terminer, une énorme flèche sort pointée dans sa direction. Finalement la spectatrice accepte le choix. Le magicien prend alors un appareil photo, un rayon rouge pointe sur la spectatrice (comme un tireur d’élite !) et déclenche la prise de vue. Il développe ensuite instantanément la photographie qui représente la carte choisie précédemment. Quand la spectatrice quitte la scène, le magicien prend subrepticement une photo de son arrière train et extrait de l’appareil une petite culotte !
– Levent joue du pipeau avec sa bouche, puis avec une de ses narines. Le pipeau est sniffé et disparaît ensuite d’un seul coup dans son nez.
– Pour terminer (fausse fin) il annonce le grand final : la disparition du bouquet de fleurs placé sur le guéridon en avant scène.
– Mais avant il informe la salle qu’il a des tours à vendre sous forme de VHS et cassettes Bétacam, un format professionnel introuvable et illisible pour le grand public… Pour prouver la qualité de la cassette il extrait une bande magnétique à la manière d’un serpentin. Il transforme le fouillis de bande en canne. Cette canne est enroulée dans un journal à la manière de fred Kaps. La canne disparaît, mais le magicien traverse la scène avec une jambe raide ! Un classique revisité de façon hilarante
– Vient alors le sel inépuisable dans une présentation remarquable qui ferait plaisir à Fred Kaps. Je crois qu’à la fin le sel est transformé en foulard blanc.
– Alors soudain il snif l’énorme bouquet par sa narine droite (création de Gaëtan Bloom) et un bouton de fleur reste coincé dans cette narine.
Mais ce n’est pas fini. Levent présente une routine parfaite de balles excelsior, d’un haut niveau avec des passes très techniques, des lancés et des rattrapages entre les doigts avec quatre balles.
Il jubile et nous communique sa joie. Malgré sa grande technicité, à aucun moment il ne se prend au sérieux. C’est une grande leçon de prestidigitation.
En conclusion
Par sa fantaisie, son excentricité et son habileté, Levent a illuminé ce quarante troisième congrès FFAP. Au cours de sa conférence il nous a démontré que la connaissance historique et technique de l’art magique est une base indispensable pour construire des routines originales et se sortir de situations embarrassantes. Son intelligence, son sens de l’humour en font un modèle pour tous ceux qui désirent développer une magie originale et percutante et redonner toute ses lettres de noblesse à notre art.
A lire :
– Le compte-rendu de sa conférence.
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