Joseph B. Hallworth est né à Malden dans le Massachusetts. C’est un enfant précoce qui commence l’apprentissage de la lecture à l’âge de trois ans. À six ans, il lit déjà les classiques de la littérature et a une « connaissance intime » de Shakespeare, Fielding, Byron, Swift, Balzac et bien d’autres ! À quatorze ans, Joseph B. s’enfuit de chez lui et, pendant quelques années, travaille dans l’Ouest en tant que trappeur de fourrure, prospecteur et cow-boy. Au Kansas, il commence sa carrière d’artiste itinérant dans le show-business dans un cirque et continu à se produire en tant que cow-boy tireur et lanceur de couteaux dans des medicine shows. Il se produit dans les spectacles du Far West et le Chatham Square Museum. Dans les années 1890, Joseph B. travaille dans les dime museums, sur les bateaux fluviaux, dans les cinémas et surtout dans les vaudevilles où il devient l’un des artistes les plus connus et les plus employés du circuit présentant un numéro de quinze minutes qui tourne dans toute l’Amérique jusqu’en 1914.
Joseph B. Hallworth change de nom de scène plusieurs fois au fil des ans. D’abord Joseph, ensuite Joe Van Victorina, Victorina, puis Prince Kar-Mi, et enfin Kar-Mi. Il dépense une petite fortune pour ses superbes affiches lithographiées annonçant son spectacle orientaliste avec sa « Victorina Troupe » puis Les mystères de l’Indes. Lorsqu’il change son nom en Kar-Mi, il colle simplement son nouveau pseudonyme sur l’ancien nom1. Lorsqu’ils se marient, Joseph B. Hallworth et sa femme Selma se produisent ensemble dans des spectacles toujours itinérants, avec un répertoire très varié où l’on retrouve des numéros de chants et de danses, d’avaleur de feu, de divination, ainsi que des actes de magie, d’illusion et de lecture de pensée. Leurs fils rejoignent également l’entreprise familiale – l’un habillé en assistant pour aider Kar-Mi dans ses illusions, l’autre en jeune hindou que son père fait flotter dans les airs.
Kar-Mi se retire progressivement de la scène lorsque ses deux fils sont enrôlés dans l’armée américaine pendant la Première Guerre mondiale. Sa famille déménage alors dans une petite ville du Massachusetts où Kar-Mi se lance dans l’impression et la gravure. Joseph B. Hallworth prend définitivement sa retraite artistique au milieu des années 1930, alors qu’il a la soixantaine. Il vit encore longtemps, décédant tranquillement à quatre-vingt-quatre ans.La légende raconte qu’il est mort d’un cancer de l’estomac à la suite de son numéro d’arme à feu…
Son répertoire
Interprète aux multiples talents, Kar-Mi propose dans son spectacle Les mystères de l’Indes, des grandes illusions, du mentalisme, des séances de fakirisme (déglutition d’épée, avaleur de feu, de rasoirs et d’un pied de table de 60 centimètres de long, etc.), des tours d’adresse au tir, des performances physiques (il se fait enterrer vivant pendant trente-deux jours) et de la jonglerie (avec des lapins, des drapeaux et des foulards). Les représentations sont complétées de projections cinématographiques « spectaculaires » mettant en scène des épaves de train ou des accidents de voitures.
Kar-Mi se présente comme « le prince de l’Inde » et « le grand prêtre des prestidigitateurs et des spirites ». Kar-Mi et « sa troupe Hindoue » ou « sa troupe royale de Nécromanciens orientaux » proposent une « démonstration des pouvoirs et des forces occultes du monde des esprits pratiquées par les prêtres et les yogis de Bénarès ».
Kar-Mi est l’auteur de plusieurs numéros dont The wonderful Hindu Water Transformations, The Beautiful Oriental Flower and Rosebush Productions, Swallows a Loaded Gun Barrel (un fusil chargé et avalé qui se finit par un tir visant la tête d’un partenaire), Selma (une saynète où il incinère et fait revivre sa femme), Shooting a Cracker from a Man’s Head (un tour de tir à haut risque), ou Gamsho (un numéro dans lequel un homme, debout dans une boîte, se transforme visiblement en femme grâce à une barre de bois horizontale descendant devant lui). Kar-Mi est également tatoueur et, entre ses spectacles, il installe un salon de tatouage temporaire à destination des spectateurs qui se transforment souvent en clients occasionnels. Cela lui permet de gagner de l’argent supplémentaire assez facilement.
Note
1 En raison des différents noms d’artiste de Joseph B. Hallworth et de son choix de réutiliser ses affiches, il existe une certaine confusion sur sa carrière. « Victorina » n’est pas la femme représentée sur l’affiche colorée « Victorina Troupe » mais fait bien référence à Hallworth lui-même.
Cet article a été publié pour la première fois dans le MAGICUS magazine n°241 (mai – juin 2023). Crédits photos – Documents – Copyrights : Collection S. Bazou. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.