On connaît le personnage de Kamel à travers ses interventions télévisuelles dans Les Agités du bocal de France 4 (2007) puis au Grand journal de Canal + (2009). Il a ensuite eu son émission de Street magic (2010-2013) et une spéciale Kamel à Las Vegas (2013). Rien de nouveau sous le soleil, se dit-on. Bien des magiciens ont eu le même parcours « télévisuel », sauf que Kamel est un enfant de la cité et de l’immigration. Un « modèle de réussite et d’intégration » dont les médias sont friands.
Ayant connu une popularité fulgurante grâce à la télé, Kamel décide d’aller au contact des gens en montant un spectacle sur scène fin 2012. Fin 2015 marque ses dernières représentations.
Introduction
Sur une musique de R&B, deux assistants-danseurs apportent sur scène un grand fauteuil vide d’où apparaît Kamel habillé en pantalon noir, haut sportwear et baskets blanches. Le magicien prend alors un grand carnet et dessine une boule de bowling, qui se matérialise et tombe au sol. Référence : Bowl-A-Rama de Kevin James.
Kamel se présente au public : « Je suis magicien et rebeu ; un arabe qui fait disparaître des choses ! C’est comme un turc beau gosse, ça ne rassure pas les gens ! » Kamel demande aux couples de lever le bras et demande à une femme seule de lui donner la ville où elle habite, sa rue et le numéro de sa maison. Il prend ensuite une carte géographique et demande à son « complice », habillé d’une cagoule et muni d’un pied de biche, d’aller visiter l’habitation (gag bien venu).
A travers la matière
Kamel se propose de défier les lois de la physique en traversant une cabine munie d’une plaque d’acier. Il passe à travers celle-ci de manière progressive, en trois étapes.
Référence : Une variante du tour Thru steel illusion présenté par David Copperfield sur une idée d’Andre Kole. Crossing steel est également au répertoire d’Enzo Wayne et des Kamyléon.
Stars
Kamel : « Grâce à la télé, j’ai rencontré des stars et j’ai inscrit leurs noms sur un jeu de cartes. »
Sur scène se trouve une enveloppe à prédiction suspendue. Le magicien fait venir une spectatrice et lui demande de lire quelques noms. Elle coupe ensuite le paquet en deux et jette par terre une des moitiés. Elle recommence l’opération plusieurs fois et Kamel s’empare des cartes restantes, les étale en ruban et fait toucher au hasard une carte. Sur cette carte, il y a un nom de star. Le magicien ouvre alors sa prédiction et dévoile une photo de la star…bébé (gag), il ouvre ensuite la photo en deux pour découvrir l’autographe de la personnalité choisie par la spectatrice. Référence : Celebrity Smart Ass Bundle de Bill Abbott avec une variante à la fin en montrant la signature de la star au lieu de sa photo.
Micro-onde
Kamel raconte une anecdote lors d’une soirée privée pour le CE de l’entreprise Darty où ces derniers voulaient le payer en électroménager. Entre alors sur scène un micro-onde géant dans lequel le magicien, attaché, prend place. Il a 10 secondes pour en sortir. Le minuteur est enclenché et au bout du temps imparti, de la fumée s’échappe de l’appareil et un homme noir en ressort avec un T-shirt en fripes, comme un rôti-grillé. Il entame une danse sur de la musique R&B. On entend alors la voix française de l’acteur Eddy Murphy : « un rebeu dans un corps de noir ! ». Pour finir, transposition du danseur en Kamel dans le micro-onde. Référence : Numéro Microwave de Nathan Burton repris à la virgule près.
Carte ambitieuse
Kamel : « Ma plus belle rencontre à la télé est celle avec Jennifer Lopez, quand j’ai dansé avec elle. »
Extrait de l’émission du Grand Journal.
« Ce soir, il me manque la Jennifer Lopez pour réaliser mon tour. »
Kamel fait venir une jeune femme dans une allée de la salle et danse avec elle. Un caméraman retransmet sur un écran ce qui va se passer par la suite. Le magicien présente un jeu de 52 cartes différentes et demande à la spectatrice de lui dire stop quand elle veut. Une carte est choisie, signée, puis perdue dans le jeu. Kamel réalise le tour classique de la carte ambitieuse : la carte remonte alors plusieurs fois au-dessus du paquet de façon magique. Elle est ensuite « tuilée » et mise au milieu du paquet pour remonter au-dessus. La carte est remise dans le jeu et le tout est confié à la spectatrice qui referme ses mains dessus. Une carte remonte, il s’agit du joker, tandis que le jeu a disparu. Kamel sort de sa poche un jeu neuf et cellophané. Celui-ci est ouvert, les cartes sont étalées faces en haut et une carte se retrouve retournée, il s’agit de la carte signée par la spectatrice. Un tour bluffant et efficace malgré une technique approximative…
Gilbert le canard
Kamel : « Croyez-vous aux pouvoirs surnaturels ? Par exemple, si vous étiez invisibles, vous feriez quoi ?… Moi, je voudrais me téléporter. »
Une oie blanche (!) arrive sur scène dans une cage et Kamel se propose de l’hypnotiser avec l’aide d’un spectateur. Un seau est présenté vide et est confié à l’assistant d’un soir. L’oie est ensuite transférée dans une boîte en métal et disparaît instantanément de celle-ci pour réapparaître dans le seau.
Référence : Un méchant copier-coller du Webster the duck (Duck bucket illusion) de Copperfield qui vient comme un cheveu sur la soupe dans le spectacle, et qui n’est pas justifié par la présentation du début !
As McDonald
Grâce à des photos qui défilent sur un écran, Kamel raconte son enfance à Clichy-sous-Bois dans le 93 et ses années collège quant à l’âge de 11 ans, son professeur de français lui dit de croire en lui et qu’il deviendra un jour un grand magicien. Cette phrase a changé sa vie et le jeune Kamel s’est mis à pratiquer la magie de plus en plus et notamment en faisant disparaître et réapparaitre 4 as. Il prend place sur une petite table et nous propose cette routine, retransmise en vidéo sur un écran. Il s’agit du tour des As McDonald dans la version d’Alain Choquette pour David Copperfield. Efficace mais déjà vu…
Michael Jackson
Arrive un moment de fraicheur où Kamel affirme ses influences artistiques par le biais de Michael Jackson. Il entame alors avec ses deux partenaires-danseurs une petite chorégraphie sans prétention, monte sur une table, disparaît derrière un rideau et réapparaît instantanément.
Facebook prédiction
Kamel : « Des gens ont Facebook ? Levez la main. Moi-même, j’ai un vrai « mur » Facebook mais mon statut n’est pas complet. Je vous propose de le remplir ensemble. »
Son « mur » Facebook est matérialisé par un grand paperboard sur lequel est inscrit son nom et son statut : amis…, je suis en vacances…, je suis avec…, je suis joignable au…
Un coffre est suspendu avec une prédiction à l’intérieur. Une fausse brique est envoyée dans la salle pour choisir des spectateurs (blague à l’intention des portugais, [sic]). Les spectateurs choisis à tour de rôle, au hasard, sont amenés à compléter le statut. Une fois la page Facebook de Kamel remplie, le coffre est descendu et un tube contenant une feuille est retiré de celui-ci. La feuille est dépliée progressivement par le magicien qui dévoile une à une les différentes prédictions qui correspondent aux réponses des spectateurs (plus la feuille est dépliée et plus le volume de la musique de fond augmente).
Harry Houdini
Une vidéo de présentation nous montre quelques exploits d’Harry Houdini. Kamel propose aux spectateurs une version de La malle des Indes (Metamorphosis) présentée par Houdini renommée La malle des Indes de Tanger. Un spectateur est invité à monter sur scène vérifier la malle.
Un des assistants de Kamel le ficelle et l’enferme dans un sac, puis dans la malle qui est cadenassée. L’assistant réalise des figure de break danse avant de monter sur la malle avec un rideau et de réaliser la transposition avec Kamel. Tour bien présenté et bien exécuté.
Break danse
Francis, le partenaire-danseur de Kamel, réalise ensuite un petit solo avec de beaux jeux de lumières sur une musique électro-rock.
Book test
Kamel : « Parfois, je suis invité chez des gens et on me demande de faire des tours alors que je n’ai pas de matériel sur moi… je prends alors des livres. Je vous propose une expérience avec cinq bouquins différents. »
Kamel fait choisir un livre au hasard à un spectateur et demande qu’il choisisse un numéro de page entre 1 et 129. Le spectateur ouvre à la page et choisi un mot sur la première ligne. Le mot est deviné par le magicien qui l’écrit sur un grand carnet. Choix d’un deuxième livre avec un autre spectateur, qui est ouvert à n’importe quelle page. Choix de la page gauche ou droite et choix d’un mot sur la première ligne. Le magicien demande à la personne de se concentrer sur les lettres du mot et de réciter l’alphabet à haute voix. Suivant l’intonation, il devine les lettres une à une et le mot en entier.
Lévitation
Le magicien descend dans la salle et fait venir vers lui une spectatrice. La scène est filmée par un caméraman et retransmise sur un écran. Il froisse un morceau de papier qui lévite ensuite dans sa main avec l’aide de son doigt et celui de la spectatrice. Le papier est ensuite « sculpté » en rose qui est offerte à la spectatrice. La rose lévite alors dans sa main et finit par se transformer en vraie fleur dans un flash. Référence : Cette séquence est calquée sur le classique de la lévitation en close-up : Floating rose de Kevin James sur une idée de Finn Jon, reprit par… David Copperfield.
Tombe la neige
Kamel : « Une personne qui m’est chère m’a quitté, il s’agit de ma grand-mère. Elle vivait au Maroc et son rêve était de venir en France pour voir la neige et pour faire du scooter des neiges. »
Kamel transforme du papier en flocons, place le tout dans un verre, et produit de la neige artificielle qui envahit la scène. Pour finir, un scooter des neiges fait son apparition en fond de scène et le magicien grimpe dessus en saluant le public. Énième présentation de la neige japonaise, un effet usé jusqu’à la corde pour finir sur une apparition d’un engin que l’on a déjà vu chez d’autres magiciens américains dont Nathan Burton et chez Enzo Wayne notamment.
Conclusion
Après ce spectacle, deux points de vue s’offrent aux spectateurs, qu’ils soient profanes ou initiés. Pour les premiers, le show est percutant, bien rythmé et on ne s’ennuie pas une minute. Kamel a un fort capital sympathie et sait jouer avec son image de beur venu de la banlieue parisienne par des lines adhoc et une répartie bien venue. Le public en a pour son argent et n’est pas « volé ».
Pour les initiés, le show ressemble trop à ceux de David Copperfield (répertoire et construction des numéros) et pour cause, il s’est fait entourer de Don Wayne, designer et créateur d’illusions qui a collaboré dix-huit ans avec la superstar américaine. Il y a un manque flagrant d’originalité dans les effets qui sont souvent que des copier-coller avec un soupçon d’apports « personnels ». La globalité du spectacle reste dans un schéma d’une succession de numéros sans véritable logique. Il faut noter également une technique approximative dans les effets de la carte ambitieuse (échange) et de la rose flottante (charges).
Ce qui « sauve » Kamel, c’est son personnage, sa spontanéité et son énergie communicative. C’est dans les moments où il joue avec les clichés, où il mêle magie et chorégraphie que le spectacle décolle et montre sa singularité ; mais cela reste embryonnaire. Dommage que les choix artistiques de Kamel ne lui correspondent pas car il serait capable d’apporter quelque chose de beaucoup plus personnel en s’éloignant des clichés et du répertoire déjà existant, commun à beaucoup de magiciens qui repiquent tout aux autres (c’était déjà le cas avec son répertoire de close-up quand il passait à la télévision).
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