Certains textes de notre patrimoine sont de véritables trésors. Je vous propose de découvrir la préface du Discours sur les Sciences et les Arts de Jean Jacques Rousseau. De tout temps des hommes comme Rousseau ont été sujet à polémiques de part leur positions contraires aux bien-pensants. L’anti-conformisme provoque de vives réactions, des critiques violentes, d’importants conflits. Cependant, il est souvent nécessaire à l’évolution des sociétés et indispensable à l’évolution de l’Art.
DISCOURS QUI A REMPORTÉ LE PRIX À L’ACADÉMIE DE DIJON
En l’année 1750. Sur cette question proposée par la même Académie : Si le rétablissement des Sciences et des Arts a contribué à épurer les mœurs.
AVERTISSEMENT
QU’EST-CE que la célébrité ? Voici le malheureux Ouvrage à qui je dois la mienne. Il est certain que cette Pièce, qui m’a valu un prix et qui m’a fait un nom, est tout au plus médiocre, et j’ose ajouter qu’elle est une des moindres de tout ce Recueil. Quel gouffre de misères n’eût point évité l’Auteur, si ce premier Écrit n’eût été reçu que comme il méritoit de l’être ? Mais il faloit qu’une faveur d’abord injuste m’attirât par degrés une rigueur qui l’est encore plus.
PRÉFACE
VOICI une des grandes et belles questions qui n’aient jamais été agitées. Il ne s’agit point dans ce Discours de ces subtilités métaphysiques qui ont gagné toutes les parties de la Littérature, et dont les Programmes d’Académie ne sont pas toujours exempts ; mais il s’agit d’une de ces vérités qui tiennent au bonheur du genre-humain.
Je prévois qu’on me pardonnera difficilement le parti que j’ai osé prendre. Heurtant de front tout ce qui fait aujourd’hui l’admiration des hommes, je ne puis m’attendre qu’à un blâme universel ; et ce n’est pas pour avoir été honoré de l’approbation de quelques Sages, que je dois compter sur celle du Public : aussi mon parti est-il pris ; je ne me soucie de plaire ni aux Beaux-Esprits ni aux Gens à la mode. Il y aura dans tous les temps des hommes faits pour être subjugués par les opinions de leur siècle, de leur Pays, et de leur Société : tel fait aujourd’hui l’Esprit fort et le Philosophe, qui, par la même raison, n’eût été qu’un fanatique du temps de la Ligue. Il ne faut point écrire pour de tels Lecteurs, quand on veut vivre au-delà de son siècle.
Un mot encore, et je finis. Comptant peu sur l’honneur que j’ai reçu, j’avois, depuis l’envoi, refondu et augmenté ce Discours, au point d’en faire, en quelque manière, un autre Ouvrage ; aujourd’hui je me suis cru obligé de le rétablir dans l’état où il a été couronné. J’y ai seulement jeté quelques notes, et laissé deux additions faciles à reconnoître, et que l’Académie n’auroit peut-être pas approuvées. J’ai pensé que l’équité, le respect et la reconnoissance exigeoient de moi cet avertissement.
À lire :
– Le texte intégral : wikisource
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