Extrait de l’ouvrage À travers mon époque : Satires Poésies diverses du Comte de Trogoff-Kerbigoët. La question musicale (Paris Challamel aîné, 1874).
Bien répéter que la révolte est un impérieux devoir et que le bonheur se récolte. Sitôt que tombe le pouvoir, dire à la misère irascible qu’à son secours on y a venir. Et lui promettre l’impossible afin de ne jamais tenir exploiter aux heures de crise. Les colères et les douleurs, procéder toujours par surprise. Suivant l’avis des connaisseurs et faction envahissante. Que proclament les ébahis. Crier d’une voix glapissante. C’est nous qui sommes le pays ! Cacher les traits de l’égoïsme sous le masque du dévouement. Avec l’emphase du sophisme, déclarer solennellement qu’aujourd’hui le but sanctifie la conquête contraire aux lois. Que d’ailleurs on su sacrifié, en s’empara ni des hauts emplois, rendre ses actes l’antithèse de ses paroles du passé !
Se montrer despote à son aise, dès qu’aux grandeurs on s’est hissé Après avoir de ses morsures criblé les abus affligeants. Peupler toutes les sinécures de ses favoris exigeants. Confier le soin des affaires aux avides solliciteurs et faire croire nécessaires les plus grotesques dictateurs.
Improviser fonctionnaires, ceux qui savent se prélasser. Appeler réactionnaires les gens que l’on veut remplacer. Ne pas négliger la parade qui charme nos légers Français. Au vantard donner vite un grade.
Gonfler chaque maigre succès. Amorcer l’homme de tout âge par les civiques oripeaux et surtout garnir l’étalage et de canons et de drapeaux.
Tandis que nos défenseurs gèlent, se préserver des aquilons. Et, dès que les balles s’en mêlent, lestement tourner les talons. Enfin, nouveau genre d’apôtres, être partout, prudent soutient, très prodigue du sang des autres. Et très économe du sien par orgueil tripler nos désastres. Et, pour étonner l’univers, tâcher de paraître désastres à l’horizon de nos revers. Aux victimes de la famine. Débiter les discours fleuris et, quand tout n’est plus que ruine, rester debout sur les débris. Voilà comment en politique, adroitement soufflant le feu, On peut, au moment pathétique, glisser les honneurs dans son jeu. Bien pratiqué, l’escamotage fait la fortune d’un parti.
Que l’on me prenne pour otage si l’on prouve que j’ai menti !
– Lire la suite.
Crédits photos – Documents – Copyrights : Didier Morax. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.