Pour la troisième année, le festival Vive la Magie pose ses valises pour un week-end à Semur-en-Auxois avec un programme renouvelé et de belles surprises.
CLOSE-UP (par Antoine Souchet)
Comme à son habitude, la bibliothèque municipale et le fond ancien de Semur-en-Auxois accueillent trois magiciens afin de surprendre les spectateurs venus nombreux durant ces deux heures de magie rapprochée. Les magiciens présents sont Gérard Souchet (magicien et créateur du festival Vive la Magie), Lukas Brandl (jeune magicien allemand) et Artem Shchukin (magicien russe, champion du monde de manipulation 2022).
Au rez-de-chaussée, Gérard Souchet accueille et présente aux spectateurs des routines classiques de la magie comme par exemple Les trois cordes sur un texte de Jean Merlin, un Bonneteau avec trois cartes (le principe étant de retrouver la Reine), La voiture de Juan Tamariz (une carte est choisie par un spectateur et retrouvée par une voiture en bois qui s’arrête devant celle-ci), on peut aussi voir la routine de La carte au couteau (mais remplacée par des baguettes chinoises en bois).
À l’étage, nous retrouvons Lukas Brandl et Artem Shchukin. Bien qu’ils ne parlent pas français, la compréhension des tours s’effectue sans aucun problème auprès des spectateurs. Lukas Brandl commence ses tours par faire brûler un « papier flash » qui se métamorphose en vraie boule de glace dans la main d’un spectateur. Dans la continuité de cet effet, Lukas effectue le célèbre « tour des boulettes » de Slydini avec ce même spectateur (qui essuie ses mains avec un mouchoir transmis par le magicien). Le magicien exécute la routine du Fil coupé et raccommodé, ainsi qu’une routine avec une carte choisie et signée par un spectateur et retrouvée dans un jeu de carte transparent.
Artem Shchukin présente ses routines sous forme de magie de salon. Il commence en musique avec une routine de dés à coudre qui apparaissent et disparaissent. Il fait ensuite choisir une carte auprès d’un spectateur, qui est remise dans le jeu. Ce jeu est ensuite mis dans un sac en papier, le magicien demande au spectateur de compter jusqu’à trois, la carte choisie saute alors du sac. Après cette routine, il manipule un marqueur Sharpie jaune qui apparaît, disparaît et se transforme en balle jaune. Nouvelle routine avec une spectatrice, une carte est choisie par cette dernière et pliée en quatre et la place entre ses dents (Artem Shchukin choisit aussi une carte, la plie aussi et la place entre ses dents). Artem se rapproche de la spectatrice, touche la carte et retire de sa bouche la carte que la spectatrice a choisi. La spectatrice se retrouve désormais avec la carte choisie par le magicien.
Artem présente ensuite un tour avec un billet de banque emprunté dans l’assemblée. Il demande au propriétaire du billet de le signer et de mémoriser les trois derniers chiffres du billet. Le billet est ensuite plié puis brûlé. En guise de remerciement, le magicien lui remet une boîte avec un kiwi à l’intérieur. Après avoir examiné le kiwi, ce dernier est coupé et le billet de banque est retrouvé dans le fruit. Pour terminer, il demande à une spectatrice de le rejoindre pour un dernier tour. Deux paquets de cartes sont posés sur la table, ainsi qu’une clochette. Le magicien explique qu’après chaque étape du tour, la spectatrice doit tinter la clochette. Artem commence son tour et fait tinter la clochette, la spectatrice s’exécute jusqu’à la fin du tour, où les mêmes cartes sont retrouvées par le magicien et la spectatrice.
GALA
Quand tous les spectateurs ont rempli la salle du petit théâtre, la musique de Queen It’s a kind of magic retentit. Le rideau se lève et, comme à son habitude, c’est le fidèle François Normag qui ouvre cette soirée magique avec ses bons mots, sa bienveillance et ses petites saynètes de salon qui vont servirent de transition aux numéros scéniques.
François Normag parle du théâtre de Semur et de son historique, ce qui l’amène à nous présenter un vieil appareil : « l’applaudimètre ». Fabriqué en Suisse, il permet de mesurer les applaudissements du public sur une échelle de 0 à 100. Le magicien sépare alors la salle en deux et fait applaudir chaque moitié, ce qui donne un résultat de 86% contre 84%. Il fait ensuite applaudir toute la salle et l’appareil pète les plombs dans un grand éclair. François Normag demande ensuite au public de mettre leurs mains devant eux, l’une en face de l’autre, de plier l’index de la main droite et d’imiter le pivert… pour éteindre leurs téléphones portables.
Artem Shchukin
Le premier artiste à ouvrir le gala est le russe Artem Shchukin, champion d’Europe et champion du monde de manipulations. C’est un personnage extrêmement attachant qui intrigue et stupéfait rapidement les spectateurs. Avec un costume et des accessoires minimalistes, noirs et blancs, ce manipulateur-comédien va faire tourner la tête du public avec des effets visuels de grande classe : apparitions et disparitions de balles d’un chapeau, balle qui devient plate, production et éventails de cartes blanches où apparait un trou, carte transformée en bandeau de papier, jeu avec un guéridon, carte collée à la bouche, cartes transparentes, cartes boomerang, cartes transformées en balles… Tous les effets sont directs, fluides et s’enchainent dans une chorégraphie de gestes très précises pour terminer par la même image que le début du numéro avec le focus sur le visage de l’artiste, masqué par son chapeau haut-de-forme.
Quelle entrée en matière ! C’est un numéro exceptionnel de maitrise technique et théâtrale. Artem arrive à faire oublier « sa catégorie » de manipulateur qui souffre très souvent d’un manque de sens en privilégiant la démonstration technique. Ici c’est l’inverse qui se produit, on oublie la technicité au profit du personnage (jeu de mime) et de sa chorégraphie corporelle. Un dernier mot sur cet artiste qui est contre la politique menée par Vladimir Poutine en Ukraine et qui a eu le courage de fuir son pays en février 2022. Exilé en France, dans la région parisienne, il continue à travailler en toute liberté pour éblouir le public européen.
François Normag revient sur scène avec un costume à paillettes vintage ; fait apparaître un foulard et une colombe. Cette dernière pond un œuf, qui se balade ensuite sur une canne en roulant de droite à gauche. François Normag dit que les magiciens aiment tout ce qui brille et les boîtes, un clin d’œil aux stéréotypes de la magie. Il présente donc une boîte à bijoux où la colombe prend place et disparait.
Vient ensuite une saynète en hommage à Léonard de Vinci, qui s’est depuis recyclé dans les parkings et autoroutes… un enfant est invité sur scène pour assister le magicien et trouvez la pièce du puzzle manquante pour reconstituer le portrait du célébrissime tableau de la Joconde. Après plusieurs pièces attrapées dans un sac transparent, l’enfant désigne une spectatrice dans la salle qui donne un numéro entre 1 et 10. L’enfant tire alors, pièce par pièce, les morceaux du puzzle du sac jusqu’à arriver au numéro choisi… qui correspond à la pièce manquante.
Lukas Brandl
Arrive sur scène un homme torse nu au regard hagard qui cherche quelque chose. Tout à coup une balle blanche apparait au sol ; il la touche et celle-ci se volatilise. Elle apparait alors derrière son dos, part en coulisse et réapparait dans sa main, se dédouble puis apparait une troisième balle. Après une séquence de jonglage, une balle disparait dans le mouvement et réapparait au milieu des deux autres. Deux autres balles sont produites par magie et trois balles au sol se dédoublent une par une dans un effet saisissant. Le personnage est alors envahi par une multitude de balles qui apparaissent sur lui et dans sa bouche. Une balle éclate sous la pression de ses doigts et se transforme en poudre. Une dernière balle lévite au-dessus de la tête de l’homme et une avalanche d’autres balles tombent des cintres.
Ce numéro de « magie nouvelle » est très technique, ce qui donne lieu à quelques accros et flashs. Mais l’acte est jeune, tout comme son interprète allemand, et promis à une belle évolution dans le temps au vu de son potentiel artistique, dans la veine des balles en lévitations de Rémi Lasvenes.
François Normag fait monter sur scène une jeune fille et lui fait choisir une carte au stop dans un jeu préalablement mélangé. Le magicien présente alors une bête sauvage du nom de Patrak, un charmant petit raton laveur animé qui prend place dans une boîte (Référence : The Raccoon). Un journal est confié à l’animal qui le déchiquette en confettis. Le magicien déplie le journal où apparait la carte choisie du début sous forme de quatre losanges découpés.
François Normag demande ensuite à une spectatrice de venir expérimenter un phénomène d’hypnose. Aidé du régisseur plateau, la spectatrice s’allonge sur une petite table à roulette, avec sa tête maintenue par un coussin. Le magicien-hypnotiseur demande de visualiser un arbre, puis un morceau de bois solide et de respirer en élevant les mains. D’un coup, la « force de l’arbre » fait léviter la spectatrice à une soixantaine de centimètres, puis redescend sur la table. (Référence : Spontus 360).
Topas
Arrive sur scène le grand magicien allemand Topas qui propose au public de leur montrer trois fois le même tour à trois moments différents de la carrière d’un magicien : Les répétitions, le premier spectacle et la millième représention. Le tour en question est « la boîte à découper le bras » (Référence : Tri-section illusion). Dans la première version (répétitions), le magicien entre son bras dans une boite en bois horizontale montée sur une structure à roulettes. On voit sa main ressortir de l’autre côté et deux petites lames sont enfoncées au niveau du bras et de l’avant-bras. La main devient « morte » au contact des lames. La petite fenêtre du milieu est ouverte pour montrer que le bras a disparu. La main coincée a du mal à ressortir à la fin.
Dans la deuxième version (premier spectacle), le magicien, sûr de lui, en fait des tonnes et exagère tous ses gestes en se déhanchant. Il entre son bras dans la boîte, place les lames et enlève la partie du milieu. Il reste un trou au milieu de son bras. Il enlève ensuite les lames qu’il lèche et tapote sur son fessier (rires assurés).
Dans la troisième version (la millième représention), le magicien apparaît complètement blasé et exécute le tour avec des gestes automatiques et ses expressions sont forcés. Il est constamment à contre-temps et finit son numéro avec un jet de confettis qui fait l’effet d’un pétard mouillé.
C’est un très grand moment de comédie que nous propose le magicien de Stuttgart. Une leçon de présentation et de construction dramatique avec un effet commercial que l’on retrouve chez beaucoup de magiciens amateurs. Topas campe un personnage jovial et malicieux avec une âme d’enfant qui s’amuse avec son public complice.
François Normag propose à un enfant de l’initier à la magie en lui prêtant un costume de magicien un peu trop grand et large pour lui. François Normag présente un seau montré vide avec le raton laveur Patrak à l’intérieur. L’apprenti magicien fait apparaitre un foulard avec l’aide de Normag, puis c’est au tour d’un ribambelle de foulards noués de faire leurs apparitions dans le seau en une interminable guirlande. Patrak est ensuite placé dans le seau et l’enfant donne un coup de baquette magique dessus qui le transforme en lapin vivant.
Une jeune femme arrive sur scène et fait face à une chaise. La chaise se met à basculer toute seule et la danseuse accompagne son mouvement en se penchant de façon antinaturelle sur un côté de son corps. Elle retire les barreaux de la chaise qui se transforment en rouge à lèvre, disparaissent dans ses mains pour reprendre leur place sur la chaise. S’en suit une gracieuse chorégraphie avec la chaise qui se met à léviter et tourner autour de la magicienne. Cette danseuse de formation a intégré dans son numéro magique son savoir-faire chorégraphique en duo avec une simple chaise, aidé dans la conception par son mentor Topas. Le numéro est original et donne un nouveau souffle aux effets de lévitation en détournant astucieusement le numéro de « la canne dansante ».
François Normag demande aux gens s’ils possèdent une voiture ? Personne ou presque ne lève la main, ce qui exaspère le magicien qui traite la salle de menteurs. Il présente ensuite une vieille plaque d’immatriculation à plat sur un guéridon, qui servira de prédiction finale. François Normag propose aux spectateurs de définir ensemble un numéro de plaque au hasard. Pour cela, il présente un carnet horizontal à spirales avec différentes lettres et numéros qui seront définis aux « stops » de sept spectateurs. Au final, ce choix collectif correspond à la plaque sur le guéridon. Un effet net à fort impact.
Topas
Topas revient clore le gala avec une intervention furieusement rock’n roll. Il fait un parallèle entre les spectateurs de magie et ceux des concerts. Les applaudissements et l’ambiance ne sont pas les mêmes. Topas propose de personnifier un groupe de rock à lui tout seul et de s’armer d’un simple jeu de cartes comme instrument. Commence alors un concert en soliste où le jeu est frictionné près d’un micro pour produire des airs de musiques connus. Vient ensuite, des riffs de guitare avec le frottement des cartes. Ça commence avec We will rock you de Queen avec le « frout frout » du pouce sur la tranche du jeu. Ça continue avec de la musique classique en effectuant des back and front, des mélanges en main et des éventails (techniques classiques de manipulations). Après cet intermède, la musique rock reprend avec des mélanges Charlier, des éventails et des cartes boomerang envoyées une par une dans la salle, de plus en plus vite suivant le rythme de la musique.
Pour conclure cette démonstration, Topas invite les gens à chanter avec lui les paroles de sa chanson One more (2019), qui va faire la transition avec son numéro final. La ritournelle Just one more (juste un de plus) va rythmer les effets d’apparitions d’enceintes HP sur scène. Le magicien-musicien sort d’un carton, montré vide, dix enceintes colorées qu’il branche à des jacks ; ce qui a pour effet de déclencher progressivement un instrument dans la bande son (batterie, piano, guitare…). Le numéro est imparable et emporte irrémédiablement le public dans un rythme participatif. Après l’apparition d’une enceinte géante, c’est au tour de Jaana Felicitas d’apparaître sous un grand voile pour clore le spectacle. Ce numéro de Topas est encore une fois remarquable dans sa conception, sa progression dramatique et l’empathie collective qu’il dégage.
François Normag remercie tous les artistes présents ainsi que l’équipe technique du festival : Nicolas Pillet aux lumières, Corentin Bossenec au son et Yannick Van Goethem au plateau. Il salue également Madame le maire Catherine Sadon, son premier adjoint Jean-Claude Pernette, la directrice du Théâtre du Rempart Marie Alison et la famille Souchet. Ce beau gala aura durée 1h45 avec une ouverture remarquable et un numéro final du tonnerre, plongeant le public dans une ambiance rock électrisante.
CONFÉRENCE-SPECTACLE
C’est dans le cadre du Théâtre du Rempart que Sébastien Mossière présente, pour la première fois, une conférence-spectacle à destination du grand public pendant deux heures. Le magicien remercie les spectateurs de s’être déplacés pour ce cours magistral de 3h50 sur la magie et commence par faire l’appel collectivement avec le public criant son nom et prénom. Après ce prologue décalé, Sébastien Mossière se présente malicieusement comme un magicien de renommé interrégionale. Pour lui, être magicien c’est ne pas avoir de copine pendant des années, saouler ses amis et sa famille à leur montrer des tours. On résume cette pratique au simple « truc », mais c’est bien plus complexe que ça. Le truc est la base des effets magiques comme le texte pour le comédien.
Sébastien Mossière se définit avant tout comme un comédien qui fait des tours de magie (plutôt classiques et simples à suivre), comme un créateur d’interprétation qui privilégie la complicité, le partage et l’émotion avec ses spectateurs. Ses effets magiques prennent place à l’intérieur d’une histoire et se répondent entres eux.
Sébastien Mossière demande aux spectateurs s’ils ont une définition du mot « magie » et insiste sur la pluralité de ses significations. Il illustre les définitions des gens avec un effet d’apparition d’une bougie sous un foulard rose et sa disparition dans un flash éclair.
Sébastien Mossière parle de sa découverte du spectacle, à l’âge de six ans, grâce au théâtre de marionnettes de sa grand-mère où elle racontait des histoires. Sa première rencontre avec la magie lors d’un spectacle où le magicien faisait disparaître une bille qui réapparaissait dans la poche de chemise du jeune Sébastien. C’est ce magicien qui lui a donné envie de faire de la magie. Il est maintenant directeur du Théâtre Guignol Anatole des Buttes Chaumont à Paris.
Ce qui intéresse Sébastien Mossière, c’est tout ce qu’on peut « mettre » autour d’un tour. Pour lui, il y a trois aspects essentiels du magicien : le magicien « tout puissant », le magicien spectateur de sa propre magie et le magicien victime de sa magie. L’important est de coordonner la technique à l’interprétation.
Sébastien Mossière va maintenant illustrer ces différentes incarnations par des routines et un répertoire adapté. Il commence par un effet de bague sauteuse sur l’index, le présentant comme un tour très technique en « magicien tout puissant ». Dans le rôle du « magicien spectateur », il sculpte une serviette en forme de lapin… mort et sans moutarde (gag). Dans le rôle du « magicien victime », il fait dessiner une colombe, par une fillette, sur la couverture intérieure d’un livre qui se referme et fait apparaitre un vrai oiseau. Le magicien prend un miroir et le place devant la colombe. Son reflet laisse apparaître une deuxième colombe derrière au grand étonnement du magicien. (Référence : Gérald Le Guilloux).
Sébastien Mossière insiste sur l’histoire que l’on raconte au public. C’est elle qui va déterminer les tours, les effets, les techniques et le personnage que l’on va interpréter. Un exemple avec le « magicien victime » qui va reprendre le contrôle des choses à la fin du tour ; une application « SOS magicien » propose à l’apprenti magicien d’apprendre un tour en suivant les indications d’une voix off. On entend la voix d’un « conseiller » qui invite le magicien à demander une chaussure à un spectateur. Ensuite, la voix propose différents tours : « La banane écrasée dans le sac à main », « L’enfant à la tête coupée » ou « Le Coca-Cola dans la chaussure ». C’est le troisième tour que choisi l’apprenti magicien. Il se saisit alors d’un verre transparent qu’il empalme et qu’il glisse « discrètement » dans la chaussure du spectateur. Le liquide d’une cannette de Coca est alors versé dans la chaussure. Voix off : « Tadaa ! », « profitez-en pour rire avec le public et faites un geste magique au-dessus de la chaussure » (signe de croix). Le verre est ressorti plein de la chaussure avec des confettis et la cannette se retrouve sous la casquette du magicien.
Autre exemple du magicien « tout puissant » avec la lévitation d’un guéridon en compagnie d’une spectatrice (Référence : Floating table de Dirk Losander). Le même tour mais présenté autrement avec le « magicien spectateur » où c’est le public qui va faire léviter le guéridon grâce à son index levé. Sébastien Mossière montre que l’émotion n’est pas la même quand on implique les gens dans un tour. Il insiste également sur la technique de cette lévitation qui demande un travail de mime et des mouvements « compensés », sans bouger le corps, pour donner une vie propre au guéridon (comme le steadicamer avec sa caméra portative). Pour Sébastien Mossière, il est important de se former au mime, au théâtre et même à la peinture pour donner de l’épaisseur aux représentations magiques.
Un nouvel exemple du « magicien victime » avec le foulard qui se transforme en canne quand le magicien atchoum. Pour les allergies, il y a l’administration de gélules, sous forme d’un ballon à sculpter, que le magicien va avaler progressivement à l’aide d’un verre d’eau.
Sébastien Mossière parle des objets et accessoires magiques obsolètes comme la quêteuse, les casseroles ou les cannes qu’il remet en piste dans son spectacle l’Apprenti magicien en les justifiant dans son histoire. Comme La baquette à pompons d’Ali Bongo, avec un texte descriptif récité à toute vitesse.
Vient ensuite une routine classique de disparitions et apparitions de cigarette avec un scénario sur une méthode d’autosuggestion pour arrêter de fumer. Sébastien Mossière enchaine des manipulations où la cigarette disparait dans l’œil, réapparait sur les lèvres, disparait des mains pour réapparaître dans l’oreille. Pour conclure sur cette phrase : « maintenant le spectateur ne veut plus la fumer car elle est au miel ! ». Avec cette petite comédie, le magicien implique le public, crée une relation d’empathie et provoque l’intérêt. Dans le même genre, Sébastien Mossière « met en texte » un effet basique de « la pièce qui remonte dans la main » avec une histoire de miroir en référence à l’Orphée de Jean Cocteau.
Un exemple du « magicien spectateur et victime » en même temps. Un enfant est invité à choisir « au stop » une lettre de l’alphabet sur des grandes cartes. Une enveloppe est placée depuis le début sur un guéridon. L’enfant saisit une baguette magique et dans un geste, vers l’enveloppe, le tissu du guéridon se détache. A son deuxième essai, c’est la rose qui saute du vase. Pour le troisième essaie, le guéridon bascule vers l’avant et tous les objets tombent par terre pour révéler la lettre E. Pour la quatrième et dernière fois, une branche de la lettre E tombe et révèle le choix de l’enfant, le F.
Sébastien Mossière propose une saynète comique extraite de son spectacle l’Apprenti magicien avec deux enfants après avoir enflammé un livre. Il confie deux baquettes magiques aux enfants et, contrairement à la (grande) fille, le (petit) garçon a toujours un problème avec l’accessoire : baguette cassée, baguette molle, baguette hélicoptère, baguette se démultipliant en six… Ensuite, les deux baguettes de la fille se transforment en fleurs et un geste magique est lancé vers un verre vide d’où apparait un ballon rose (Référence : Glassosilk de Jean Merlin). Le ballon est gonflé, il éclate et apparaît un coq en plastique (au lieu d’une colombe). Sébastien Mossière insiste sur le jeu avec les deux enfants qui apportent au tour un aspect comique entre la grande fille et le petit garçon qui sont renommés Carla et Nicolas (au temps de Sarkozy) ou Brigitte et Emmanuel (au temps de Macron), en prise avec l’actualité politique du moment.
Sébastien Mossière nous montre deux façons de faire disparaître des colombes. Le premier exemple avec la disparition des colombes dans une boîte « tout en carton », extrait du final de l’Apprenti magicien. Le deuxième exemple avec la disparition des colombes dans une boîte en feu, qui se retrouvent ensuite « cuites » sur le couvercle intérieur, extrait du final de l’École des magiciens.
Pour finir sa conférence, Sébastien Mossière nous propose le tour des cubes numérotés de 1 à 6 placés dans deux cheminées. Les chiffres s’inversent, se retournent suivant le modèle à gauche ou à droite. Pour finir, une spectatrice est invitée à donner un ordre de chiffres au hasard sur la première colonne visible. Le magicien mélange alors la deuxième colonnes et place la cheminée dessus. Quand cette dernière est retirée, les chiffres correspondent aux choix de la spectatrice. (Référence : Twin Dice Tower). Avec ce dernier tour, le magicien montre que sans mise en scène, sans personnage, sans justification et sans originalité, le public est quand même satisfait et bluffé par l’effet qui s’apparente à un casse-tête. Il remet ainsi en cause ce qu’il a démontré tout au long de son intervention, comme pour dire que la magie est une chose très complexe qui est avant tout une expérience subjective d’un spectateur à l’autre.
Encore une fois, nous pouvons remercier les Souchet pour cette proposition inédite et hybride qui permet au public de découvrir l’envers du décor d’un numéro de magie et les procédés « invisibles » mis en place.
Conclusion
Le festival Vive la Magie a encore gâté son public bourguignon en lui offrant un plateau exceptionnel d’illusionnistes. À proposer l’excellence à chaque édition et dans chaque ville de France, il faut tenir solidement le cap ; C’est l’exploit que réalise l’infatigable famille Souchet avec une curiosité et une exigence de chaque instant. Grâce à eux, le public a la chance de découvrir les meilleurs numéros des plus grands artistes mondiaux. Mais où s’arrêteront-ils ? Certainement pas en si bon chemin où l’année 2023 s’annonce sous le signe de la nouveauté !
A lire :
– L’édition du festival à Dijon.
– La conférence d’Hector Mancha lors de la première édition du festival à Semur-en-Auxois.
– La deuxième édition du festival à Semur-en-Auxois.
A visiter :
– Le site du festival Vive la Magie.
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