Comment êtes-vous entré dans la magie ? A quand remonte votre premier déclic ?
J’avais 30 ans et je ne savais rien à propos de la magie. Je conduisais une moto de la Californie au Colorado, avec la ferme intention de passer une semaine dans les montagnes. La première nuit, j’ai rencontré Bob Sheets. Il a changé ma vie. Il m’a montré que la magie pouvait être amusante et générer une vie. À ce moment, si vous m’aviez dit que j’allais voyager dans le monde entier pour faire des tours de magie, je vous aurais dit que vous étiez fou. Mon premier tour que j’ai fait était la transposition d’une pièce de cuivre en argent. C’est un tour que j’effectue encore tous les soirs depuis 38 ans.
Quand avez-vous franchi le premier pas et comment avez-vous appris ?
J’ai été très chanceux. En 1977, Le Tower Bar de Snowmass dans le Colorado m’a offert un public en constante évolution. C’est très intéressant de travailler dans une zone de vacances car les gens tournent en permanence et vous êtes en mesure de parfaire vos compétences.
Je n’ai jamais arrêté de travailler dans ce village vacances, pendant de nombreux mois au printemps et à l’automne. Hors saison, quand les vacanciers n’étaient plus là, j’en profitais pour voir ma famille et passer du temps avec mes enfants. J’ai aussi beaucoup voyagé, et fait beaucoup de nuits blanches !
Je recommande à tout magicien de travailler le plus possible devant des gens. C’est la seule façon de devenir bon dans cette profession. Penn Gillette appelle cela du « temps de vol ». Un lieu de vacances vous offre ce genre de public qui est extrêmement précieux et en constante évolution.
Quelles sont les personnes ou les opportunités qui vous ont aidé ?
Outre Bob Sheets, j’ai eu la chance de rencontrer J.C Wagner qui m’a aussi aidé un long moment. Au fil des années, j’ai eu un certain nombre de mentors, mais aucun n’a eu une importance aussi grande que Bob Sheets.
Dans quelles conditions travaillez-vous ?
Aujourd’hui, je travaille de différentes façons. Ma façon préférée est de travailler derrière un bar. Ma personnalité semble être adaptée à cette condition. Bien que je vieillisse, je suis de moins en moins tolérant avec les personnes ivres. Je fais un spectacle de close-up, et un spectacle de stand-up. Toute la magie que je fais est axée sur le public, sur leur réaction.
Quelles sont les prestations de magiciens ou d’artistes qui vous ont marqué ?
Tom Mullica a eu une grande influence sur moi. J.C Wagner bien sûr. Dans le domaine de la magie de salon, j’ai eu la grande chance de connaître Eddie Tullock, non seulement l’un des pionniers de la discipline, mais aussi l’un des meilleurs praticiens.
Quels sont les styles de magie qui vous attirent ?
Principalement le close-up. J’adore la magie de bar, bien qu’aujourd’hui je ne la vois pas réaliser de manière efficace. Il faut comprendre que ce genre de magie n’est pas axée que sur des tours car il s’agit d’interface avec les gens, faire la liaison avec eux et vendre au final du whisky.
Quelles sont vos influences artistiques ?
Outre les personnes que je viens d’énumérer plus haut, je pense qu’il est important d’être ancré dans la culture populaire, pour que vos routines puissent adapter ses références : films, célébrités du moment, potins, événements, actualités, etc.
Quel conseil et quel chemin conseiller à un magicien débutant ?
Je voudrais offrir les mêmes conseils que Bob Sheets m’a donné. Sortir et se « faire prendre ». C’est la seule façon de faire évoluer vos routines. Notre public sera très critique si un tour ne fonctionne pas. Un public de bar peut être impitoyable. Mais, rappelez-vous, ce public n’est jamais fixe et un autre prendra sa place immédiatement après. Vous avez donc une chance incroyable de mettre en pratique les leçons tirées de vos performances précédentes, au pied levé ! Ce public en constante évolution est la meilleure façon de se perfectionner. Vous avez la possibilité d’effectuer le tour encore et encore jusqu’à ce que tous les imprévus aient été contrôlés dans les moindres détails.
Je pourrais aussi ajouter que l’humour, dans l’exercice de la magie, est vital pour moi. J’ai encore une grande bibliothèque pleine de livres sur l’humour. Avoir un arsenal de choses drôles à dire lors de vos routines est extrêmement précieux.
Quand un public rit, il ne regarde pas vos mains. À ce moment, le tour n’est pas aussi important que leur rire. Parce que c’est ce dont ils se souviendront : avoir passé un bon moment. Les gens ne se souviennent pas de ce dont vous avez fait mais ils se souviennent comment vous les avez diverti.
Quel regard portez-vous sur la magie actuelle ?
La magie semble être belle et bien vivante. La quantité du matériel provenant de jeunes créateurs est stupéfiante. Mais une grande partie de ce matériel est, à mon avis, secondaire. Cette soi-disant magie n’est pas la meilleure forme que l’on puisse rêver. Elle met l’accent sur le truc et non sur le public. Et je pense que LE PUBLIC est la partie la plus importante de la magie. Le but est de gagner son public, d’être en osmose avec lui.
Vos hobbies en dehors de la magie ?
Je vis dans une des plus belles régions du pays. J’aime être dehors et marcher avec mon chien, communier avec la nature, tout en appréciant l’environnement où je me trouve. Mon « hobby » actuel est d’écrire un livre sur la magie de bar qui résume les 40 dernières années de ma vie.
– Interview réalisée en septembre 2014.
NB : Doc Eason sera présent à la 43rd International Magic Convention du 14 au 16 novembre 2014 à Londres avec ses amis Tom Mullica et Bob Sheets.
A visiter :
– Le site de Doc Eason.
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