Extrait de la revue L’Illusionniste, N°54 d’avril 1906
C’est en 1894 que De Latorre débute dans la prestidigitation. Il avait alors vingt-trois ans ; étant né à Paris en 1871. C’était donc un tout jeune homme à peine sorti du service militaire. Doué d’un physique agréable et d’une élégante correction, il fut vite remarqué parmi les débutants de cette époque et très rapidement il les distança. On peut dire de lui qu’il embrassa, avec un rare bonheur, tous les genres de la magie. En ce qui concerne les manipulations, il eut vite fait de développer l’adresse de ses doigts, les éventails, sauts de coupe compliqués, accordéons, etc. devinrent, pour lui, un jeu d’enfant.
Quand il posséda, à fond, l’art que nos voisins d’Outre-Manche appellent « léger de main », il reconnut que cela ne suffisait pas pour fixer l’attention du public II ajouta à son programme toutes les nouveautés de l’époque et s’attaqua avec acharnement à la transmission de pensée. Ce qu’il faisait, il y a dix ans, pourrait avantageusement avaliser avec les performances des voyantes du dernier bateau. II fut très heureusement seconde dans ces curieuses expériences par sa femme, qui, sous le nom de la grecque Djina, ne fit qu’accroître le succès, en apportant à ces spectacles le charme de sa grâce et le concours de sa vive intelligence. Ayant acquis dans cette branche toutes les satisfactions désirables, il continua en d’autres genres ses tentatives artistiques, nous l’avons toujours connu poursuivant un but nouveau dès qu’il avait atteint l’objet de ses précédents désirs. Ce fut alors la magie noire qui excita son ambition, il monta ce spectacle d’une façon très amusante et l’exploita pendant deux ans, notamment au Musée Saint-Denis. Il s’attaqua ensuite aux grands trucs. On le vit présenter entre autres : la Suspension aérienne, le Sarcophage et l’Océan de Lumières ou le Bottin. Ce dernier lui valut de brillants engagements parmi lesquels l’Eldorado, le Concert-Parisien, le Pôle-Nord, le Palais de Cristal de Marseille, l’Olympia de Bordeaux, le Casino de Lyon, etc.
Comme beaucoup d’autres, il monta un théâtre forain dans lequel on voyait le cinématographe. Ce théâtre fut incendié en 1901 à Annecy. Aujourd’hui il prépare un nouveau spectacle de music-hall qu’il ne nous appartient pas de déflorer par l’énumération des merveilles qui le composeront… Commettons cependant une petite indiscrétion ; on y verra une « Arche de Noé » comme on n’en vit jamais.
J. C.
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