Comment êtes-vous entré dans la magie ? À quand remonte votre premier déclic ?
J’ai commencé au début du collège avec les DVD de Bernard Bilis sur la magie des cartes et la magie a accompagné une bonne partie de ma scolarité. C’est au lycée que je m’y suis mis très sérieusement et à mes dix-huit ans, en plein cours de comptabilité que j’ai eu mon déclic ! J’ai affirmé à mes parents que je serais magicien ! À partir de là, ils m’ont encouragé à poursuivre des études afin d’avoir un bagage minimum, tout en me laissant développer ma carrière de magicien. À ce jour, je déteste toujours autant la comptabilité !
Quand avez-vous franchi le premier pas et comment avez-vous appris ?
J’ai appris tout seul pendant très longtemps ! Quand on est jeune, il n’y a pas d’hésitations ou de réflexions avant de se lancer dans de tels projets. La magie me plaisait… Donc je pratiquais. J’ai passé d’innombrables heures devant les vidéos de Bernard Bilis pour les cartes ou David Stone pour les pièces à mes débuts… J’ai aussi très vite vendu mes premières prestations et j’ai toujours investi beaucoup (trop) dans l’achat de nouveaux tours ! J’ai beaucoup appris de cette façon, grâce à une soif d’en savoir toujours plus et de percer tous les mystères de ce monde incroyable. Aujourd’hui, je travaille régulièrement avec Benoît Rosemont, Mark Elsdon, Yves Doumergue ou Olivier Guernion pour la création de nouveaux projets.
Quelles sont les personnes ou les opportunités qui vous ont aidé. À l’inverse, un événement vous a-t-il freiné ?
J’ai eu la chance d’avoir des parents très ouverts et encourageants. Je pouvais choisir n’importe quel métier, tant que je m’y consacrais à 100% et que je travaillais dur pour réussir. C’est toujours le cas aujourd’hui et j’ai gardé cette philosophie pour mes différents projets de vie. Je ne pense pas avoir été freiné dans ma carrière… Bien sûr, le fait de se marier, d’avoir un enfant, d’autres loisirs ou des amis… Tout cela nous donne moins de temps à consacrer à la magie… Et en même temps, la richesse d’une vie bien remplie permet de porter un autre regard sur notre art et d’intégrer notre être et notre personnalité à notre travail.
Quels sont vos domaines de compétence ? Dans quelles conditions travaillez-vous ? Parlez-nous de vos créations, spectacles et numéros.
J’ai donné mon premier spectacle professionnel (contre rémunération) en 2007, à l’âge de dix-huit ans. J’ai ensuite touché à beaucoup de domaines dans la magie : les spectacles pour enfants, la scène, la grande illusion, le close-up… Puis en 2017, j’ai été coaché par Mark Elsdon. J’ai alors choisi de me concentrer sur une seule spécialité afin de pouvoir y consacrer tout mon temps de travail, toute mon énergie et ma créativité. J’ai choisi le close-up, mon style d’expression préféré. C’est pour moi la magie la plus complexe et celle qui nécessite le plus d’intelligence sociale. C’est le format magique qui demande le plus de répartie, d’improvisation et d’attention. J’adore ça ! Aujourd’hui, je travaille principalement avec des entreprises exigeantes qui veulent faire plaisir à leurs clients ou leurs partenaires. La magie est mon seul métier et je présente plus de cent cinquante spectacles par an. Je me considère comme un interprète plutôt qu’un créateur de tours, même si je prends aussi du plaisir à présenter des effets personnels. J’ai un très grand répertoire et à ce jour mon spectacle le plus long a été présenté pour un groupe de douze personnes et il a duré… 3h30 ! (1h30 de spectacle prévu + 2h de rappels)
Parlez-nous de votre Salon des Illusions situé à Reims. Pourquoi et comment est né ce projet ?
Je suis un des premiers magiciens en France à avoir présenté un spectacle en ligne pendant le Covid. J’ai joué au total cent vingt représentations d’un spectacle créé spécialement pour l’occasion pendant cette période. C’était très enrichissant et j’ai eu d’excellents retours. J’ai adoré ce moment. Lorsque les spectacles en présentiel ont repris, j’ai eu l’idée de continuer à jouer depuis mon habitat… J’avais appris à aimer cette façon de s’organiser. J’ai alors créé une salle de spectacle directement chez moi ! Aujourd’hui, le Salon des Illusions peut accueillir vingt spectateurs et je joue lors de privatisations principalement, ou pour récolter des fonds pour des associations. Les retours sont très positifs et je prends énormément de plaisir à présenter mon spectacle dans ce cadre intime et si particulier.
Quelles sont les prestations de magiciens ou d’artistes qui vous ont marquées ?
Je suis un fan inconditionnel de Derren Brown qui m’a marqué et qui me plait toujours autant. J’ai vu la plupart de ses spectacles à Londres et je suis toujours émerveillé ! Sinon, je ne consomme que très peu de spectacles de magie, ni en live, ni à la télévision… Pour moi, faire ou regarder sont deux choses différentes et je préfère être sûr de ne pas me faire influencer par ce que je pourrais voir.
Quels sont les styles de magie qui vous attirent ?
Pour moi, la magie est un moyen, pas un but. Ce qui m’attire, c’est toujours la réaction du public. Je veux des yeux qui s »écarquillent d’émerveillement, des mâchoires qui tombent de surprise et des exclamations d’enchantement incontrôlables. La magie est le meilleur moyen que j’ai trouvé pour arriver à ces fins. Quand je travaille un nouveau tour, j’ai toujours comme but de réussir à me connecter avec le public, de l’emmener avec moi pour un voyage court mais efficace et passionnant. L’idée est qu’en quelques minutes, les gens passent d’un état dans lequel ils ne me connaissent pas, à un souvenir qu’ils vont garder et prendre plaisir à raconter pendant des années.
Quelles sont vos influences artistiques ?
J’essaie de me laisser influencer le moins possible. Je pense que David Williamson, Derren Brown ou Juan Tamariz sont des personnages tellement forts qu’on ne peut pas les oublier quand on les a vu et qu’ils influencent toujours notre façon de pratiquer.
Quel conseil et quel chemin conseiller à un magicien débutant ?
J’imagine que je dirais de ne pas écouter les conseils de magiciens ? Être débutant en magie est sans doute la meilleure période, celle dans laquelle on apprend le plus. Foncez avec cette passion et touchez à tout. Dites oui à chaque opportunité qui se présente et surtout faites-vous plaisir !
Quel regard portez-vous sur la magie actuelle ?
La démonstration de « trucs magiques » est devenue extrêmement populaire avec les réseaux sociaux. On y présente (et on explique) des puzzles magiques et quelques illusions. Cela détourne le public de la vraie expérience magique. Selon moi, un bon tour de magie s’articule comme un bon morceau de musique, il doit y avoir une histoire, une construction globale et un sens général. Aujourd’hui, la majeure partie de la magie en ligne est composée d’effets courts, sans aucun sens ou aucune présentation. Pour reprendre la comparaison avec la musique, la magie actuelle (en ligne) s’apparente selon moi à des effets musicaux : pas à de la musique. En dehors de la magie en ligne, il n’y a jamais eu autant de magicien qu’aujourd’hui, dans le monde. L’accessibilité aux apprentissages joue un rôle énorme. Avec tout le contenu disponible sur Internet, on peut presque devenir magicien simplement avec des vidéos TikTok ou Instagram ! Cela permet d’élever le niveau général de la magie, d’inciter les meilleurs à se renouveler sans cesse pour se distinguer.
Quelle est l’importance de la culture dans l’approche de la magie ?
La magie est intemporelle. Un excellent tour de magie d’il y a mille ans sera toujours excellent aujourd’hui. La culture et l’actualité peuvent jouer un rôle et apporter un contexte qui mettra en valeur le tour. J’ai eu la chance de présenter ma magie dans de nombreux pays, pour des personnes de cultures très différentes et l’expression de l’émerveillement lorsque l’on est témoin de quelque chose d’impossible est universelle. Les lois de la physique le sont, elles sont connues de tous, dans le monde entier. Alors quand celles-ci sont brisées ou détournées, la sensation d’un moment d’impossibilité est toujours présente.
Vos hobbies en dehors de la magie ?
J’ai toujours pratiqué beaucoup d’activités. Des arts martiaux au tennis, en passant par l’escrime et l’aviron… En ce moment je fais de l’apnée (statique et dynamique) et cela exige une capacité de concentration, de contrôle et de connaissance de soi qui présente beaucoup de points communs avec l’art magique.
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Interview réalisée en mars 2024. Crédits photos – Documents – Copyrights avec autorisation : Cyril Regard. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.