Comment êtes-vous entrée dans la magie ? A quand remonte votre premier déclic ?
J’ai toujours aimé la magie. Quand j’étais jeune, je me couchais tard pour regarder toutes les émissions magiques qui étaient diffusées à la télévision, mais malheureusement, il n’y avait jamais de magiciennes programmées.
A quatre ans, j’ai vu une publicité dans un magazine pour Le lac des cygnes, la Première Ballerine était si belle et élégante. Je me souviens avoir décidé à ce moment-là que c’était ce que je voulais faire. Ma mère a commencé à m’emmener à des cours de danse et j’ai joué sur scène devant 2000 personnes pour la première fois à l’âge de cinq ans. J’ai participé à des spectacles de danse et pantomimes annuels à Noël à Portsmouth, en Angleterre, ma ville natale. J’étais une enfant très timide et calme, ce fut donc une transformation totale pour moi. Cela m’a aidé à sortir de ma coquille et à être encore sur scène aujourd’hui où je me sens le plus à l’aise.
Quand avez-vous franchi le premier pas et comment avez-vous appris ?
Je pense qu’il est important d’apprendre des meilleurs, mais je ne crois pas qu’il y ait un magicien extraordinaire dans tous les domaines de la magie. Honnêtement, beaucoup de ce que j’ai appris provient de livres, de conférences, de conventions, de vidéos en ligne, de conversations en tête-à-tête, de discussions de groupe et de spectacles en direct. Voir d’autres artistes (magiciens ou non) est tout aussi une expérience d’apprentissage. Découvrir ce à quoi le public répond ou ne répond pas. Je pense que cela va au-delà des simples trucs. C’est un voyage sensoriel que vous proposez aux spectateurs.
Quelles sont les personnes ou les opportunités qui vous ont aidé. A l’inverse, un évènement vous a-t-il freiné ?
En 2015, j’ai joué sur le plateau de Britain’s Got Talent. J’ai été la première magicienne à avoir eu du succès dans cette émission et je me suis qualifiée pour les demi-finales.
Après cette expérience, je suis revenu à Las Vegas où je jouais dans la revue Fantasy, à l’hôtel casino du Louxor. Je savais que si je voulais poursuivre ma carrière dans la magie, il me fallait apprendre avec l’un des meilleurs. J’ai contacté Criss Angel et exprimé ma passion pour l’art et mon désir de travailler avec lui. A l’hiver 2015, j’étais dans un bus en tournée sur la côte est américaine, effectuant dix spectacles par semaine en tant que magicienne principale de son spectacle The Supernaturalists. J’ai présenté un numéro de quinze minutes comprenant une apparition dans des flammes, le tour des lames de rasoir avalées, une évasion de veste et la malle des Indes (Métamorphose). Je lui serai toujours reconnaissante de m’avoir donné une chance et un nouveau départ dont j’avais besoin.
Après cette tournée, il créait en 2016 son nouveau spectacle MindFreak LIVE ! au Luxor et j’ai eu l’occasion de jouer avec lui. Ce spectacle a été un énorme succès et une expérience incroyable pour moi. Si vous pouvez travailler avec un autre magicien, faites-le absolument ! Être un observateur, voir comment il travaille et comment il construit un spectacle entier n’a pas de prix. Costumes, éclairages, illusions, musique, décors, mise en scène, vous pouvez apprendre autant en coulisses que sur scène.
Je trouve aussi bénéfique d’aller voir d’autres spectacles de magie, mais aussi de musique, de comédie, de danse. J’aime voir ce que les autres font à petite ou grande échelle. Et même si je n’aime pas le spectacle, pour une raison quelconque, j’apprendrai toujours quelque chose de cette expérience de spectatrice.
Dans quelles conditions travaillez-vous ?
Jusqu’à présent, la plupart de mes représentations magiques ont été des spectacles scéniques. Je préfère ce type d’expérience au close-up où tout est beaucoup plus « brut ». Je pense cependant qu’il est bénéfique de pouvoir adapter notre numéro pour jouer dans de grands théâtres ou dans des espaces plus intimes.
Quelles sont les prestations de magiciens ou d’artistes qui vous ont marqué ?
C’est une période très excitante pour moi, parce que je viens de faire mes débuts à Broadway avec le spectacle The Illusionists. Jouer sur Broadway à New York était un rêve, alors je me sens extrêmement chanceuse. 2018 a été une année merveilleuse, à la fois en magie et en mannequinat. Je suis apparue dans Sports Illustrated et j’ai été nommée Playmate dans Playboy South Africa. Le mannequinat est toujours une partie importante de ma vie et je continuerai ce métier en parallèle à la magie. Je viens également de lancer mon site Web et ma boutique en ligne MagicbyChloe.com
J’ai déjà eu la chance de me produire dans le West End de Londres, à Las Vegas, à Broadway… peu importe, mon rêve a toujours été de rentrer chez moi et de me produire au King’s Theatre de Portsmouth sur la scène où j’ai grandi. La plupart des membres de ma famille ne m’ont jamais vu présenter des tours d’illusions en direct, ce serait alors une belle expérience pour nous tous.
Au-delà de ce parcours, ce que je ferai ensuite, comme toujours, vous ne vous y attendrez pas.
Quels sont les styles de magie qui vous attirent ?
J’aime la magie qui rend le public mal à l’aise et qui le prend à contre-pied. Il n’y a rien de plus gratifiant que les gens qui me regardent et se disent : « Oh, une blonde idiote qui fait quelques tours. » Et quelques instants plus tard, se surprennent à pousser des cris par rapport aux exploits « dégoûtants » que je réalise. J’adore tout simplement la magie geek.
J’aime aussi la magie qui a un sens pour les gens. Pour moi, « contourner » et « déformer » le corps par des moyens mystiques et mystérieux est ma vraie passion. Je suppose que, tout comme le mentalisme Colin Cloud, les gens croient que c’est réel. Ce n’est pas une parodie de ce que devrait être la magie, ni une énigme à résoudre pour le public. C’est réel, brut et indéniable.
Quelles sont vos influences artistiques ?
J’ai toujours admiré des gens comme Pamela Anderson et Marilyn Monroe. Ce sont des femmes fortes, influentes, talentueuses dans de nombreux domaines et également inspirées par l’esprit d’entreprise. Je ne veux pas faire que de la magie, de la danse ou du mannequinat. Je pense que la polyvalence est la clé du succès et aide à se sentir épanouie.
Quel conseil et quel chemin conseiller à un magicien débutant ?
Depuis que je suis entrée dans la magie, je me suis impliquée entièrement, de l’apprentissage des tours que je devais exécuter, aux costumes, coiffures et maquillage que je devais adopter. Mais au final, j’ai toujours fait et décidé ce que j’estimais être bon pour moi.
Vous devez vous sentir aussi à l’aise que possible lorsque vous montez sur scène car c’est un endroit très vulnérable. Vous partagez vos créations avec un public qui a payé et qui vous critiquera. Vous devez donc affronter cela en toute confiance. Soyez vous-même. N’essayez pas de vous glisser dans un moule. Il est primordial de vous épanouir de manière créative. Soyez unique et sortez des sentiers battus. Vous ne savez pas ce qui pourra arriver…
Que ce soit dans la magie ou dans une autre carrière, je pense qu’il est vraiment important de se soutenir et de se renforcer mutuellement. À une époque où il y a tant de négativité dans le monde, j’estime que nous devrions toujours déployer de l’énergie positive et nous élever les uns les autres. Physiquement, mais aussi sur les réseaux sociaux et à la télévision.
J’ai travaillé extrêmement dur pour arriver là où je suis aujourd’hui. C’est un acte de foi. J’ai quitté ma maison, ma famille et mon pays et je n’ai jamais regardé en arrière. Parfois, il vous suffit de sortir de votre zone de confort et d’aller rechercher ce que vous voulez. Vous seul devez y arriver ! Je pense également qu’il est important, en particulier pour les femmes, de partager leurs expériences, positives et négatives, afin que nous puissions réellement nous développer au sein de la communauté magique et au-delà.
Quel regard portez-vous sur la magie actuelle ?
Voilà une question intéressante. Beaucoup de représentations magiques sont dépassées parce qu’elles n’évoluent pas et que, par conséquent, elles sont datées dans le temps. La meilleure magie que j’ai vu vient des magiciens-interprètes qui ont trouvé un personnage qui leur est propre et qui partage quelque chose d’inoubliable avec le public.
Quand je vois des magiciens avec des approches et des attitudes égoïstes, je m’éteins instantanément. Lorsque vous apprenez à prendre conscience et à évaluer honnêtement qui vous êtes, vous pouvez être présents, en un instant, avec votre matériel et les personnes avec lesquelles vous vous engagez. Cela leur permet de sentir que ce qu’ils vivent se passe pour la première fois et est si personnel que cela ne se reproduira plus jamais de la même manière.
Quelle est l´importance de la culture dans l´approche de la magie ?
Habituellement, lorsque je travaille sur de nouvelles idées, elles découlent de tout ce que j’ai vu dans ma vie quotidienne. Promener mes chiens, aller au supermarché, regarder la télévision, préparer le dîner. Je n’ai pas tendance à m’asseoir et à écrire un numéro à partir de rien, j’ai besoin de m’inspirer de quelque chose, ce qui se produit généralement lorsque je m’y attends le moins.
Vos hobbies en dehors de la magie ?
Je n’ai pas vraiment de passe-temps mais je viens de me fiancer au mentaliste Colin Cloud. Nous sommes actuellement occupés à planifier notre mariage qui aura lieu à Edimbourg en décembre prochain. C’est si merveilleux d’avoir enfin rencontré quelqu’un qui non seulement comprend le business, mais qui me soutient également dans ma vision et mes objectifs et en fait sa priorité. Nous avons une grande dynamique, nous pouvons échanger des idées et nous nous poussons mutuellement à créer le meilleur travail possible. C’est formidable de pouvoir développer de nouvelles idées avec Colin, notamment parce qu’il vient d’un milieu différent.
Colin et moi avons eu la chance de jouer ensemble à Broadway dans The Illusionists sur un numéro de douze minutes qui a impliqué tout le public et a conduit à un moment magique vraiment impossible. Mais plus important encore, il nous a permis d’apprendre à compléter au mieux le style de chacun sur scène. Comme il a été si bien accueilli, nous avons décidé de jouer ensemble au Fringe festival d’Édimbourg, du 31 juillet au 25 août 2019, au Pleasance dans The Grand avec notre nouveau spectacle Sinful. Cette expérience est un excellent moyen pour nous de combiner notre réflexion et de commencer à transformer ces idées en un tout nouveau contenu, en fusionnant nos différents talents et forces. Sur la base de ce que nous avons déjà écrit, je crois vraiment que cela va pousser ce que nous avons tous les deux fait individuellement, dans une nouvelle direction, plus intrigante et plus réfléchie. Il n’y a personne d’autre avec qui je préférerais partager la scène.
– Interview réalisée en mai 2019.
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