Mise en scène : Daniel Mesguich. Conseils et parties humoristiques : Pierre Etaix
On ne présente plus Alpha qui est un spécialiste et un précurseur de la magie des perroquets et du feu. Il est le concepteur de nombreux effets de pyrotechnies scéniques et a travaillé aux côtés des plus grands magiciens comme David Copperfield ou encore Siegfried & Roy à Las Vegas. Il développe en parallèle un travail de dessinateur et de peintre intimement lié à sa passion pour les oiseaux exotiques.
Sur scène un impressionnant décor exotique est en place. Fond de scène en forme de verrière art déco, barils, caisses, arbre tourmenté, pile de livres anciens, ferronneries, etc. L’accessoirisation est minutieusement étudiée jusqu’aux moindres détails tout comme les costumes et le maquillage. Tout cela renforce considérablement l’ambiance générale et le fait d’être totalement immergé dans un autre monde : l’univers légendaire des corsaires et des pirates, véritable fantasme collectif.
Peinture de Pierre Etaix.
Un magicien, un servant et trois danseuses-jongleuses-assistantes vont dérouler sous nos yeux la légende du Pirate.
Introduction au voyage
Pour introduire son spectacle, un perroquet mécanique raconte le naufrage du bateau, la découverte d’une ile et les tribulations d’un fameux pirate. Bienvenue en terre inconnue à travers l’exploration des 7 mers, le pirate Alpha va recréer devant nous les splendeurs des îles constituées de mille et une couleurs, d’oiseaux de paradis, de visions flamboyantes et terrifiantes, de trésors oubliés… Cette entame est un poil trop longue et Alpha pourrait aisément résumer son histoire, car la suite est assez explicite.
L’ile des perroquets
Alpha commence son spectacle par son magistral acte des perroquets, reconnu dans le monde entier. Le magicien-pirate arrive sur scène et fait retentir son mini canon sur roulette dans un coup de tonnerre ! Il laisse apparaître un premier perroquet, puis une souris qui traverse la scène et se retrouve prisonnière d’une grosse boîte et qui se transforme en chien. Après cette introduction légère et comique, le magicien va nous offrir un feu d’artifices d’effets spectaculaires, dix minutes de pure poésie visuelle et d’inventivité magique.
Nous apercevons au milieu de la scène un impressionnant arbre torturé constitué de têtes de mort et de boutons de rose (foulards enroulés) mêlés à des foulards de différentes couleurs qui pendent : une véritable sculpture poétique dans le spectacle où vont venir « s’accrocher » les futurs oiseaux. Alpha, à l’aide de foulards, de feu et d’effets pyrotechniques va produire une quantité impressionnante de perruches, de perroquets, de colombes et de cages de plus en plus grosses.
Parmi les effets les plus marquants :
– Une tête de mort se matérialise sur un foulard en feu, manipulé les mains nues, d’où sort une colombe !
– Une production de perruche dans une boule de cire malaxée
– Une épée en feu transformée en confettis dorés
– Une incroyable séquence de foulards inépuisables
Les flammes volantes
Il s’agit d’un superbe moment de pure poésie visuelle ou la virtuosité technique se mêle à la grâce d’un moment suspendu dans le temps. Alpha commence cette séquence par faire passer une flamme sur un foulard qui se transforme en boule de feu et lévite, sous couvert, comme une boule zombie. Il produit ensuite différentes boules de feu qui se mettent à flotter dans les airs en dessinant une petite chorégraphie en mouvement. Elles passent ensuite à travers un anneau métallique pour regagner un grand pupitre fait d’un empilement de gros livres.
Ces boules enflammées sont comparables à des feux follets, à des âmes perdues qui errent dans le monde des vivants, des fantômes d’un autre âge que le pirate convoque tel un médium…
Numéros de danse
Le spectacle est ponctué de plusieurs numéros dansés grâce à l’intervention de trois danseuses professionnelles qui participent également en tant que figurantes, personnages ou assistantes dans l’évolution de l’histoire. Le numéro le plus inspiré est le tableau asiatique avec deux femmes munies de rubans qui passent à travers le cou du magicien et qui se raccommodent après avoir été coupés.
Un autre numéro chorégraphié est le maniement de structures enflammées par les trois danseuses qui deviennent pour un temps jongleuses.
Le panier hindou
Une femme entre dans un panier en osier typique du tour du Colonel Stodare (datant de 1865). La méchante tatouée de l’histoire transperce le panier avec des lances enflammées. Avant que la femme enfermée ne réapparaisse, la méchante lui coupe une main : effet gore garanti (dommage qu’il y avait de nombreux enfants dans la salle !).
Les sables des mers
Présentation d’un classique appelé Les sables du désert. Arrive sur scène une grande vasque remplie d’eau qui devient totalement noire et opaque. Trois poignées de sable de couleurs différentes sont ensuite déposées dans la vasque que le magicien mélange de fond en comble. Alpha plonge ensuite ses mains, montrées vides, à l’intérieur de la vasque et en ressort tout d’abord une poignée de sable jaune complètement sec, ensuite il fait de même et en ressort une poignée de sable rouge bel et bien sec, puis enfin il sort la poignée de sable vert. Alpha clôture le numéro en transformant instantanément l’eau noire en une eau parfaitement claire.
A noter que le magicien est accompagné d’une partenaire en kimono qui change trois fois de couleur, en passant derrière un paravent, à mesure que celle-ci lui amène le sable coloré (jaune, rouge et vert). Une belle idée.
Tours divers
Alpha entrecoupe son histoire d’effets classiques un peu décousus de l’ensemble et qui peinent à être justifiés comme L’œuf et le foulard avec la participation d’un enfant ou encore la manipulation de cartes (back and front et cartes boomerang). Par contre, La chasse aux pièces (seau et pièces de pirate) et les anneaux chinois (routine pour 8 grands anneaux) se fondent bien au récit.
Final
Pour le final, un grand tableau vierge sur chevalet est amené sur le devant de la scène. Alpha produit du feu de ses mains et le transforme en neige. Cette neige-confetti est projetée sur la toile d’où se matérialise un portrait de Pavarotti. Un très bel effet réunissant des matières opposées mais qui a du mal à se justifier dans l’histoire globale, dommage.
Conclusion
La légende du Pirate est une pièce magique théâtralisée qui mixe différentes disciplines dans une ambiance d’histoires lointaines. Le choix des trois danseuses et du servant s’avère payant dans la répartition des rôles qui sont multi tâches. Cela fonctionne plutôt bien même si quelques transitions ne sont pas tout à fait fluides et que le rythme descend sur quelques saynètes. Malgré quelques incohérences de scénario (nous perdons le fil de l’histoire à un moment), l’ensemble nous berce agréablement de par la diversité de ses tableaux.
Qui d’autre qu’Alpha pouvait interpréter ce rôle de pirate au grand cœur qui déborde de vérité ? Personne, car Alpha est unique et « à la gueule de l’emploi », celle d’un baroudeur, d’un artisan qui nous embarque à bord d’un voyage exotique personnel et singulier. On sent son investissement à chaque instant, cette sincérité qui rend l’artiste encore plus touchant et qui le place dans une certaine marginalité au vue de ses collègues illusionnistes. Cette légende du Pirate est un spectacle unique de plus d’une heure, autoproduit par un passionné qui transpire l’amour qu’il porte à son art et à ses oiseaux.
A visiter :
– Le site d’Alpha.
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