Tobias « Théo » Leendert Bamberg, descendant d’une célèbre dynastie de magiciens juifs hollandais, jouait devant le roi Guillaume III quand il avait onze ans. A dix-huit ans il devint sourd et les problèmes que posait cette infirmité pendant les représentations l’amenèrent à inventer « Okito », (anagramme de Tokio), personnage japonais qui ne parlait pas d’autre langue que la sienne : c’est pourquoi il pouvait faire son spectacle dans le plus complet silence. Cette transformation exploitait également l’engouement de l’époque pour l’exotique et bien des magiciens adoptèrent l’allure et le maniérisme d’artistes étrangers.
Tobias Leendert Bamberg avant transformation.
Tobias Leendert Bamberg après transformation en Okito.
Okito remporta un énorme succès à sa première représentation dans un théâtre de variétés de Berlin, et, en dehors de quelques années pendant lesquelles il travailla avec Howard Thurston sous son propre nom, Théo L. Bamberg passa toute sa vie dans la peau du mystérieux magicien oriental.
Au début de sa carrière, il était difficile de se procurer des costumes japonais, alors, bien qu’il gardât le nom japonais, il transforma son spectacle en style chinois. Etant perfectionniste, Okito étudia la décoration et le style chinois, et ses numéros étaient remarquables autant pour leur authenticité et leur beauté que pour ses talents de magicien.
Okito joua à travers le monde entier jusqu’en 1908, date à laquelle il vendit son spectacle et se retira en Hollande. Il passa ensuite une courte période à New York pour diriger la Bamberg Magic and Novelty Co. Deux ans plus tard, il remonta sur scène en tant que Theo Bamberg pour présenter un superbe numéro d’ombres chinoises (inspiré de Félicien Trewey) dans le spectacle d’Howard Thurston. Il reprit ensuite du service en tant qu’Okito et il continua à se produire pendant 25 ans.
Okito et son fils Fu Manchu.
Pendant la Seconde Guerre mondiale il rejoignit son fils, David Theodore Bamberg (Fu Manchu), en Amérique du Sud, puis il se rendit à Chicago ou il passa ses dernières années à inventer ses « Mystères d’Okito » et à dessiner les plus beaux accessoires qui existent aujourd’hui.
Son tour le plus marquant
– La boule volante (vers 1910). De tous les effets encore associés au nom d’Okito, le plus beau est La boule volante, une création du magicien américain David Abbott (1863-1934). Sous les ordres de son maître, la boule se promenait en flottant au-dessus de la scène, passait et repassait à travers un cerceau puis retournait se poser dans le coffre d’où elle était sortie. Des variantes de cette illusion sont toujours présentées par certains des plus grands magiciens du monde.
Theo Bamberg était un magicien complet. Non content d’être un maître de l’art de la scène, il inventa de nombreux tours. Il est aussi resté célèbre pour des effets plus modestes que ses grandes illusions, qui reposaient sur sa prodigieuse dextérité comme, par exemple, la boîte Okito.
Cet article a été publié pour la première fois dans le MAGICUS magazine n°200 (juillet-août 2016). Crédits photos – Documents – Copyrights : Collection S. Bazou. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayant droits, et dans ce cas seraient retirés.