Comment êtes-vous entré dans la magie ? A quand remonte votre premier déclic ?
je suis entré dans la magie à l’âge de 6 ans avec une boite de magie en bois bleu contenant deux boites à double fond, un trépied à la carte, deux boites aux pièces genre Rattling box, un St jean de la vigne, un petit dé au chapeau et un jeu de gobelets avec quatre boules de liège une baguette magique en bois peint. En fait c’était une boite de fabrication allemande, (je suis né en 1944) je crois, car la couverture des explications était en français, mais les explications en Allemand, j’ai donc dû plus ou moins inventer mes routines avec l’aide de mon père qui était magicien du dimanche.
Merlin jeune
J’ai demandé ce cadeau à Noël après avoir trouvé une boite de magie à moitié vide dans le grenier de mon grand père paternel. Le matin de Noël le 25 décembre 1950, vers 11h, j’ai décidé de devenir magicien et je n’ai jamais changé d’avis depuis, malgré beaucoup d’offres flatteuses qui auraient mieux plu à ma famille, du genre : Pape, garde barrière, Lucien barrière, trapéziste au cirque de Gavarnie, Général des pompiers, Motard de Dijon, savant de Marseille et surtout CHEF de la fanfare cycliste des mères chrétiennes. Mais j’ai tenu bon et je suis donc devenu magicien.
Quand avez-vous franchi le premier pas et comment avez-vous appris ?
J’ai donc commencé à emmerder ma famille à l’âge de 6 ans et les survivants en gardent encore des séquelles aujourd’hui. Mon premier public était mes camarades de classe et de caserne.
Quelles sont les personnes ou les opportunités qui vous ont aidé. A l’inverse, un évènement vous a-il freiné ?
De 6 à 11 ans je suis allé en classe à l’école Saint Joseph, établissement privé dirigé de main de Maître par Beniton, hélas disparu, mais qui m’a beaucoup aidé. C’est un certain Maurice Martel qui m’a amené à l’AFAP où j’ai assisté à toutes les réunions en resquillant à l’entre.
Merlin faisant la couverture de Genii, magazine mythique américain en 1975.
Toutefois, comme je présentais souvent des expériences sur scène, beaucoup avaient pensé que j’en faisais parti. Et puis un jour, le scribouillard de service a bien vu que je n’étais pas sur la liste, alors on m’a sommé de passer l’examen. Ca s’est passé au domicile du Dr Jules Dhotel et j’ai failli mettre le feu aux rideaux du salon, mais j’ai été reçu haut la main, peau de lapin. Après ils m’ont donné un insigne, mais comme je n’avais pas envie de le mettre, alors je l’ai perdu. Ces cons là m’en ont redonné un second, que je mettais juste pour les réunions.
Dans quelles conditions travaillez-vous ?
Je travaille dans des conditions…financières très étudiées, à vrai dire pour survivre et pouvoir acheter le pain pour mettre sous le caviar de mes enfants, j’ai fait du close-up, des grandes scènes, des « zencor » plus grandes. Mais mon pied a toujours été le cabaret, là où on peut se battre en direct avec les clients. J’ai pris un énorme plaisir à faire ça pendant 45 ans et je ne me suis jamais ennuyé !
Quelles sont les prestations de magiciens ou d’artistes qui vous ont marquées ?
Slydini, Goshman, Crendal, Ascanio, Ken Brooke, Ricky Jay pour le close-up et Kaps, Potassy, Richiardy Jr, Sitta en scène, O’Shan en mentalisme.
Quels sont les styles de magie qui vous attirent ?
Tout sauf peut-être la grande illusion, telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui.
Quelles sont vos influences artistiques ?
Les mêmes que pour la magie. Pour le reste : Picasso, Magritte, Cocteau, Monk, Bach, Mozart, Brubeck, Brel, Brassens, Barbara, les frères Jacques, Sinatra, Samy Davis Jr, Liza Minnelli, Stephen Sondheim, Al Weber. Michel Audiard, Guy Bedos, Nicolas Bedos, Guy Carlier, Coluche, Raymond Devos… le tout en vrac.
Quel conseil et quel chemin conseiller à un magicien débutant ?
Connaître la législation, se faire respecter, tenir ses prix, savoir dire non, pouvoir parler quatre ou cinq langues même avec des fautes, aimer voyager, savoir manger avec des baguettes et éventuellement avoir un autre métier : je pense à président de la FFAP parce qu’à mon avis ça gagne bien…
Merlin en cabaret (photo : Franck Boisselier).
Quel regard portez-vous sur la magie actuelle ?
La magie actuelle est trop déshumanisée peu de numéros racontent une histoire, peu de numéros font appel a l’inconscient collectif.
Quelle est l´importance de la culture dans l´approche de la magie ?
PRIMORDIALE.
Vos hobbies en dehors de la magie ?
Musique, comédies musicales, jazz période be-bop, Cuisine, pop-up books, colliers de nouilles et sculptures « encoquillagescollés ».
A lire :
– L’histoire de la magie par Jean Merlin.
– Les Jean Merlin Magic History Day.
Interview réalisée en juin 2011. Crédits photos – Documents – Copyrights avec autorisation : Morax, Franck Boisselier et Jean Merlin. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.