Biennale Internationale des Arts de la Marionnette
De et avec : Marta Cuscunà. Conception et réalisation des têtes coupées : Paola Villani. Assistant réalisateur : Marco Rogante. Création lumière : Claudio « Poldo » Parrino. Création son : Alessandro Sdrigotti. Animation graphique : Andrea Pizzalis. Création graphique : Andrea Ravieli. Têtes inspirées par : Eva Fontana, Ornela Marcon, Anna Quinz, Monica Akihary, Giacomo Raffaelli, Jacopo Cont, Andrea Pizzalis, Christian Ferlaino, Pierpaolo Ferlaino, Filippo pippogeek, Miserocchi, Filippo Bertolini, Davide Amato. Diffusion France : Jean-François Mathieu. Traduction, surtitrage : Federica Martucci. Création 2015.
Onzième édition de la biennale avec, en coup d’envoi, un spectacle venu d’Italie. Et elle se clôturera avec un Bal marionnettique conçu par la compagnie Les Anges au plafond. Entre temps, une grande diversité de spectacles, dans trente lieux d’Ile de France, principalement à Paris. Notamment trois de Marta Cuscunà qui avait déjà joué Sorry Boys en 2020 aux Chantiers d’Europe du Théâtre de la Ville et qu’on a plaisir à découvrir ou à revoir.
Des têtes s’alignent : côté jardin des garçons, et côté cour, plusieurs personnages d’adultes. Ces têtes prendront vie entre les mains expertes de l’artiste démiurge : seule en scène, on la devine derrière les châssis d’où émergent ces visages. Le titre (en français : « Désolées, les gars ! » s’adresse comme un pied de nez à une bande de gamins immatures qui discutent sexe et films d’action et aussi à ces parents qui s’agitent par ces têtes interposées, inquiets pour leurs filles disparues. La cause de cet émoi : dix-huit lycéennes de moins de seize ans, toutes enceintes ont signé un « pacte secret de grossesse » pour élever leurs enfants ensemble dans une communauté de femmes.
Tirée d’un fait divers survenu au lycée de Gloucester, petite ville du Massachusetts en 2000, la pièce nous invite à rire des remous créés par cette initiative féministe « révolutionnaire », et un téléphone géant affiche sous forme de textos, les échanges entre les jeunes filles. On suit donc l’évolution de leur grossesse mais sans jamais les voir… Seuls les témoignages des autres nous narrent leur aventure. Tout ce petit monde s’agite et nous apprécions la virtuosité de Marta Cuscunà à animer seule cette foule de personnages, passant de l’un à l’autre avec une célérité remarquable. Elle prête ainsi à chaque visage en latex une expression et une voix particulière.
Sorry Boys, résolument polémique, met en boîte des gamins plutôt couillons : ignorants qu’ils sont de la sexualité et abreuvés de films pornos ils ne comprennent rien à leurs copines. Leur sexisme ordinaire se nourrit des clichés masculins du cinéma hollywoodien. Les parents ne valent guère mieux, avec leur prêchi-prêcha conservateur et leur peur du lendemain. Les conversations tournent vite à l’affrontement politique. Seul, Joseph Sullivan, le proviseur du lycée semble entendre le projet des lycéennes et, avec l’infirmière, leur facilite la tâche en secret… Il les aide à fuir et lui revient le mot de la fin : « Elles avaient un drôle de sourire quand elles sont parties ». Ce sourire, explique la marionnettiste surgie de l’ombre, est une réponse aux boucheries perpétrées par les hommes. Nous recevons cinq sur cinq le message de Marta Cuscunà qui s’est engagée à défendre l’indépendance et la résistance féminine, d’autant plus qu’elle le fait avec humour.
– Article de Mireille Davidovici. Source : Théâtre du Blog.
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Crédit photos : Daniele Borghello et Alessandro Sala. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants-droit, et dans ce cas seraient retirés.