Note aux lecteurs :
« Il nous a paru judicieux de traduire le texte de Simon Aronson Memories are made of this. D’une part car c’est l’introduction la plus complète sur la magie du jeu mémorisé. D’autre part car la majorité des tours cités en référence dans cette introduction sont traduits en Français dans The very best of Simon Aronson et sont accessibles aux lecteurs désireux d’approfondir le sujet. »
« Le répertoire d’un cartomane n’est jamais complet si n’y figure pas le jeu préarrangé sous une forme ou une sous une autre.» S. W. Erdnase
Note (Mai 2002): Ce livret à été écrit initialement il y a trois ans pour des séminaires privés que je conduisais sur la magie du jeu mémorisé. Depuis cette époque le jeu mémorisé est devenu encore plus populaire. L’année dernière j’ai publié mon livre Try the impossible qui contient une exploration en profondeur du chapelet Aronson, plus deux tours qui étaient contenu dans la première version de ces notes. J’ai maintenant un site web : [www.simonaronson.com, qui me permet de partager mes idées sur la magie en général et la magie du jeu mémorisé en particulier, et ce de manière plus régulière grâce à l’internet. J’ai modifié ces notes sur quelques points mineurs pour mettre à jour les références, corriger les erreurs qui m’ont été signalées et plus rarement clarifier ou développer des idées présentées.]
De grands bouleversements se sont produits ces vingt dernières années. Quand j’ai écrit mon premier livre The card ideas of Simon Aronson en 1978, j’ai vidé mon sac en donnant un grand nombre de choses que j’avais développées sur l’utilisation du jeu mémorisé et qui étaient encore sous le manteau. Dans l’introduction de ce livre j’ai mentionné que parfois je me réjouissais avec mauvaise conscience que même les cartomanes avertis utilisaient si peu (à cette époque) le chapelet mémorisé.
Eh bien, je ne me sens plus du tout coupable de nos jours tant le jeu mémorisé est devenu mature. En effet, ces dernières années ont vu une vague d’intérêt pour cet outil vénérable tant chez les penseurs magiques de renommée internationale que chez les cartomanes les plus mondialement respectés. Les conférences dans les clubs de magie de tous le pays ont mis en exergue les miracles réalisables avec un jeu mémorisé. Mais l’enthousiasme ne s’est pas limité aux professionnels. Dans les forums sur internet dédiés à la magie, dans les congrès de magie, je suis régulièrement assiégé par des enthousiastes, amateurs inventifs, qui veulent me montrer leurs derniers raffinements et prouesses avec un jeu mémorisé – et beaucoup sont très bons ! Cette dynamique est croissante et contagieuse, et la simple augmentation du nombre de cartomanes utilisant un chapelet mémorisé a produit une synergie qui a multiplié de manière exponentielle les effets, astuces, variations et nouveaux principes.
Je suis heureux d’être une des sources de cette renaissance, mais il n’y a aucune raison de s’arrêter en chemin. Je travaille sans relâche sur de nouveaux effets utilisant le jeu mémorisé aussi il est temps que vous preniez la relève.
A propos de cette Introduction :
Comme le titre le laisse entendre, le but de ce livret est de vous présenter quelques principes élémentaires que vous devez connaître pour commencer avec un chapelet ainsi que leurs applications. Dans la première partie je définis le vocabulaire de base et je réponds aux questions les plus fréquentes sur comment aborder le sujet. Dans la deuxième partie, j’essaye de vous donner un aperçu de la puissance et de l’étendue du jeu mémorisé en discutant des cinq principes qui sont couramment utilisés dans les applications du jeu mémorisé. Ces principes sont illustrés par plusieurs effets de localisation simple mais néanmoins trompeurs. Dans la troisième partie, je passe en revue quelques suggestions sur la meilleure manière d’apprendre un chapelet. A plusieurs reprises je fais référence à mes « miracles mémorisés » favoris et à mes livres, et donc pour plus de commodité pour utiliser ces références, j’ai inclus dans l’Annexe A la bibliographie de tous mes écrits publiés sur la magie du jeu mémorisé. Finalement, dans l’Annexe B, j’ai mis noir sur blanc le chapelet Aronson, au cas où vous voudriez l’apprendre.
J’espère que cette brève introduction vous aura mis à l’aise vis à vis du jeu mémorisé et que cela vous aura ouvert l’appétit pour une exploration plus approfondie du sujet.
Je vous prie de bien comprendre ce que cette introduction n’est pas. Ce n’est pas un « résumé » de tout ce qu’il faut savoir sur le jeu mémorisé ; bien au contraire, elle ne fait qu’à peine en effleurer la surface. Ce n’est aussi pas un substitut à la lecture de mes livres. Je publie sur le sujet du jeu mémorisé depuis 1972.
Si vous êtes familier avec mes écrits, vous savez que j’ai le souci du détail (mes amis diraient « exhaustif ») quand je décris pour chaque effet les principes sous-jacents, les compromis, les ouvertures et le « nettoyage », les variations, les crédits et toutes les références. Cette introduction cependant va dans le sens opposé, les discussions sont volontairement abrégées, et expressément conçues pour vous indiquer dans lequel de mes livres je décris et j’explore plus en détails le sujet abordé (Si vous avez lu tous mes livres, vous n’avez surement pas besoin cette introduction).
I. Pour commencer
Donc, que signifie un « jeu mémorisé » ou « chapelet mémorisé » ? Tout simplement, dans le jargon des cartomanes qui font réellement de la magie avec le jeu mémorisé, un jeu mémorisé signifie n’importe quel ordre spécifique d’un jeu de 52 cartes, dans lequel la position de chacune des 52 cartes (de 1 à 52) a été parfaitement mémorisée. C’est tout.
L’élément clef est la phrase « parfaitement mémorisé ». Si vous avez vraiment mémorisé la position de toutes les 52 cartes, et si le jeu est arrangé dans ce même ordre mémorisé, vous serez capable de faire deux choses :
– si quelqu’un indique n’importe quel nombre entre 1 et 52, alors vous saurez instantanément la carte qui réside à cette position numérotée
– si quelqu’un nomme n’importe quelle carte à jouer, vous saurez instantanément à quelle position numérotée cette carte particulière réside dans le jeu.
Ceci, de manière succincte, est tout ce qui constitue le jeu mémorisé, mais beaucoup de possibilités merveilleuses découlent du simple fait de cette mémorisation. Et, de la même manière la nature ésotérique du jeu mémorisé devient aussitôt évidente : le magicien moyen qui évalue la difficulté présumée de mémoriser 52 relations numériques abstraites, élimine rapidement cet outil, considérant qu’il ne vaut pas l’investissement en temps et en effort. Beaucoup d’utilisateurs du jeu mémorisé sont secrètement ravis de cela, mais j’espère que cette introduction vous aidera à dépasser cette hésitation ou inertie initiale.
Examinons cette définition plus en détail.
« Instantanément » signifie, dans ce cas, sans l’aide d’aucune formule, calculs, ou délais pour aller d’une position à une carte ou vice versa. Si quelqu’un dit, par exemple 38, vous saurez instinctivement que c’est le dix de cœur (ou n’importe quel autre carte qui réside à la position 38 dans l’ordre du jeu particulier que vous avez mémorisé), ou si quelqu’un vous dit, par exemple, As de pique, alors la position 6 (ou n’importe quelle autre) viendra immédiatement à votre esprit. Cela se produit instantanément, sans méditation, ou pensée, ou règle, ou formule quel quelle soit, parce que les 52 correspondances de chaque carte et de sa position numérique respective ont été préalablement installées dans votre mémoire.
Au début, l’idée même d’apprendre les 52 cartes « de mémoire » est ce qui terrifie le plus les débutants. Permettez-moi de vous prodiguer des encouragements qui, à ce stade, doivent être pris sur parole comme venant d’un initié. Croyez-moi, mémoriser un chapelet est beaucoup, beaucoup plus facile que vous ne pouvez l’imaginer.
En fait, non seulement l’apprentissage du chapelet vient bien plus vite que vous pourriez le penser, mais le processus d’apprentissage peut être aussi agréable et même amusant – parce que vous apprendrez de nouveaux outils qui renforceront votre puissance cérébrale, tant dans la magie qu’en dehors. Les seules personnes qui parlent des difficultés à mémoriser un chapelet, sont celles qui n’ont jamais réellement essayé d’en apprendre un.
Le «numéro de chapelet » d’une carte est la position numérotée que chaque carte occupe dans l’ordre du jeu que vous avez mémorisé. Ainsi, par exemple, dans le cas particulier de mon chapelet, le valet de pique a le numéro de chapelet 1 (c’est la carte du dessus), et le numéro de chapelet 52 est le neuf de carreau (c’est la carte du dessous dans mon chapelet). Le numéro de chapelet de chaque carte est unique et, par définition, lui est associé de manière définitive, et ce quelque soit l’ordre dans lequel il est. Si je mélange mon jeu mémorisé, le valet de piques sera toujours la carte avec le numéro de chapelet 1, quelque soit sa position à laquelle le valet aboutira dans mon jeu maintenant mélangé.
Le numéro de chapelet, une fois appris, fait que chaque carte a de facto un deuxième « nom », une nouvelle identité « secrète ». Le dix de trèfle, qui est le numéro de chapelet 35 dans le chapelet Aronson, peut aussi être pensé ou « connu » comme la carte 35 – mais alors que tout le monde connaît le nom ordinaire de la carte « dix de trèfle », seulement vous connaissez son autre identité, son numéro de chapelet 35. Le nom courant d’une carte comporte certaines caractéristiques à partir desquels la carte peut être classée, organisée, ou arrangée ; par exemple le dix de trèfle est noir, un trèfle, une valeur, une carte paire, etc. Le fait que chaque carte possède maintenant une identité secrète permet de la classer ou de l’organiser en rapport avec sa nouvelle identité, et ce principe « secret » de classification ou d’organisation ne sera connu que par vous. Personne d’autre que vous ne sera même au courant que cette organisation ou cet ordre existe. Si cela vous apparaît un peut trop conceptuel, laissez moi vous donner un exemple concret pour l’illustrer :
Localisation par division du jeu. Tout le monde est familier avec une des manières les plus anciennes pour faire un effet de localisation de carte qui consiste à diviser secrètement le jeu entre les rouges et les noirs. Si une carte est retirée d’une des moitiés du jeu et placée dans l’autre, elle peut être facilement retrouvée parce que c’est la seule carte mal placée dans l’autre moitié du jeu. Tant que le public n’est pas au fait de la division du jeu, cela peut être vraiment trompeur, mais évidement, on ne peut pas étaler les cartes face en l’air quand on utilise le principe rouge/noir. Parce que la division rouge/noir est trop visible, les magiciens ont pensé à la camoufler en divisant le jeu non pas par couleurs mais en utilisant d’autres caractéristiques des cartes, par exemple toutes les « paires » d’un coté et les impairs de l’autre, ou les trèfles et carreaux d’un côté et les cœurs et piques de l’autre. Chacun de ces critères pour diviser ou organiser le jeu à des inconvénients : si un spectateur cherche une logique dans l’organisation des cartes, il peut la trouver. Si par contre, le jeu est divisé par/en moitiés en organisant les cartes selon des attributs ou caractéristiques de leur identité secrète, même une inspection minutieuse et prolongée des cartes ne permettra pas de trouver quoi que ce soit, parce que leur identité secrète, leur numéro de chapelet, n’est connu que de vous. Ainsi, dans l’effet de localisation décrit auparavant, si toutes les cartes avec un numéro de chapelet bas (1-26) étaient dans une moitié du jeu et les cartes avec un numéro de chapelet élevé (27-52) étaient ensemble dans la moitié restante, vous pourriez faire le même effet de localisation et étaler le jeu en ruban face en l’air à la fin en toute impunité, car le principe d’organisation des cartes ne peut être discerné par quiconque s’il n’est pas familier avec le chapelet particulier que vous avez mémorisé.
Notez que, selon vos besoins, vous pouvez utiliser n’importe quelle caractéristique du numéro de chapelet (haut/bas, pair/impair, toutes les quatre cartes, seulement celle entre 30-40, etc.) comme principe d’organisation. Et évidement, vous n’êtes pas limité à la division du jeu en seulement deux moitiés, le même principe d’identité secrète peut être appliqué à un ou plusieurs petits groupes de cartes. Alors que la classification sera apparente pour vous, les cartes sembleront dans un ordre aléatoire pour le public. On peut généraliser l’exemple ci dessus en en faisant une règle ou un principe : chaque fois qu’une division, une organisation ou un arrangement du jeu est fait, et que cette arrangement doit être utilisé comme un outil secret et non pas comme quelque chose qui doit être in fine révélé ou exposé aux spectateurs, alors un autre arrangement fondé sur le numéro de chapelet peut y être généralement substitué.
Ed Marlo a employé le jeu mémorisé, et en utilisant des «cartes marquées », à trouvé qu’il était plus facile de « marquer » le dos des cartes afin qu’ils indiquent le numéro de chapelet de la carte, au lieu de sa couleur et de sa valeur (« Marked Memory », Pallbearers Review Jan. 1968, p. 152). Un tel marquage, bien sur, ne donne aucun indice ou preuve de l’identité de la carte marquée même si la marque est vue ou étudiée – parce que la marque se réfère à l’identité secrète de la carte, connue seulement de l’artiste. Mon essai General observations on the memorized deck offre nombre d’autres exemples, suggestions et idées d’utilisation de l’identité secrète des cartes, c’est-à-dire de son numéro de chapelet, comme « principe d’organisation ».
En fin de compte, j’utilise le terme « magie du jeu mémorisé » pour désigner strictement cette partie de la cartomagie dont le modus operandi secret utilise, au moins en partie, le fait que l’artiste connaisse le numéro de chapelet des cartes par cœur. C’est une distinction terminologique subtile mais importante. Souvent l’ordre particulier du chapelet mémorisé contient une ou plusieurs caractéristiques dans sa construction, cela vous permet de faire des tours spéciaux qui ne pourraient pas être fait sans cet ordre spécifique. Par exemple, le chapelet Aronson contient trois donnes de poker séparées, un main parfaite de bridge, un effet d’épellation, conçu pour vous permettre d’échanger subtilement les jeux pour introduire le jeu mémorisé, n’importe qu’elle main de poker demandée, une donne de black jack, des astuces pour produire des carrés, un détecteur de mensonge, et plein d’autres réjouissances. Il est souvent possible d’exécuter ces effets spécifiques sans avoir à mémoriser le chapelet. Quand cette mémorisation n’est pas nécessaire pour faire un effet particulier, je ne l’appelle pas « magie du jeu mémorisé », même si on a probablement mémorisé l’ordre du jeu.
Quel chapelet, ou ordre de jeu, devez vous mémoriser ?
Pour la vaste majorité des effets avec un jeu mémorisé, le chapelet que vous avez appris par cœur ne fait aucune différence. La seule chose qui compte est que vous connaissiez la position des cartes « à froid ». L’ordre du jeu que vous avez mémorisé pourrait être théoriquement absolument aléatoire, ou alors ordonné d’une manière non évidente (par exemple un chapelet non perturbé par le mélange pharaon (faro stay-stack) ou qui présenterait une combinaison cyclique ou répétitive (par exemple Si Stebbins ou Huit-Rois), ou une qui serait particulièrement conçue pour un tour ou utilisation précise. La seule exigence « absolue » est que les cartes une fois arrangées dans l’ordre, leurs faces doivent apparaître comme aléatoire ; il ne doit y avoir aucun indice d’une préparation ou d’un pré-arrangement quand le jeu est soumis à une inspection superficielle. L’alternance régulière des couleurs rouge/noir d’un ordre basé sur PiCoeurTréCar a fréquemment trahi un pré-arrangement quand le montage Si Stebbins ou Huit Rois est utilisé, mais ce point peut être aisément corrigé en utilisant ma suite de couleurs déguisée, « Running Without Being CHaSeD » dans The Aronson Approach p. 163, commentaire 9.
Cela dit, il est évident que si vous investissez le temps nécessaire pour mémoriser un ordre particulier de jeu, et que vous prévoyez de régulièrement, ou au moins fréquemment, transporter un jeu monté dans l’ordre que vous avez mémorisé, ce serait aussi bien que ce soit un arrangement qui vous offre quelques avantages en plus.
Le genre d’avantages dépend uniquement de vous : les types d’effets cartomagique que vous affectionnez, ou que l’on vous demande de faire, des conditions dans lesquels vous pratiquez, combien de tour de cartes vous faites dans une session, etc. Par exemple, je trouve très impressionnant d’être capable de faire une démonstration de tricherie apparemment sur l’inspiration du moment, j’ai donc construit mon chapelet afin d’y inclure plusieurs donnes de poker différentes, ainsi qu’une main de bridge parfaite. Je suis donc ainsi capable de répondre à une telle requête, si l’on me le demande de but en blanc. Je voulais aussi un tour séparé qui me permette d’introduire mon chapelet mémorisé, dans le déroulement d’un tour précédant utilisant un jeu mélangé. Aussi ai-je inclus dans mon chapelet une séquence particulière d’épellation qui permet à mon jeu mémorisé d’être échangé de manière indétectable tout en exécutant un miracle de mentalisme. Mais il ne s’agit que de moi et de mes goûts.
D’autres artistes pourront préférer construire leur propre montage qui sera unique, fait sur mesure pour leurs tours favoris. Par exemple, il a été suggéré que si vous faites des tours de petit paquets utilisant des combinaisons de cartes distinctes, vous serez en mesure de monter votre propre chapelet qui consistera en plusieurs tours de petits paquets séparés, ou d’effets utilisant seulement une portion du jeu, (c’est-à-dire, une donne de poker à dix cartes, un huile et l’eau, une assemblée d’as, etc.). A n’importe quel moment vous pourrez couper sur le tour de petit paquet voulu sur le dessus du jeu, le faire, et ensuite replacer ces cartes sur le dessus (ou sur le dessous), en faisant attention à les garder dans leur ordre mémorisé. Votre chapelet mémorisé pourra alors fonctionner comme un « distributeur » de vos « tours de petit paquet » favoris.
Certains artistes préfèrent commencer chaque prestation en ouvrant un jeu de carte neuf. Pour eux, il peut y avoir un bénéfice à avoir un chapelet mémorisé qui peut être facilement et efficacement généré à partir de l’ordre d’un jeu neuf sur le champ, il y aura probablement un prix à payer, un compromis, en sacrifiant d’autres astuces incluses. Je n’ouvre pas de paquet de cartes très fréquemment et quand je le fais, j’aime « roder » les cartes avant de les utiliser, mais c’est clairement une préférence personnelle. La clef est de faire une évaluation réaliste de vos propres habitudes lors de vos représentations et d’incorporer les fonctionnalités qui vous apporteront des avantages pratiques, ceux que vous utiliserez réellement dans les conditions de votre pratique propre.
Finalement, si vous présentez souvent vos tours avec ou en compagnie d’autres magiciens, il y aurait un bénéfice substantiel à avoir appris le même chapelet qu’eux. Cela vous permettrait de faire des miracles avec un « compère » et vous pourrez « emprunter» le jeu de quelqu’un d’autre, secrètement préarrangé, et être encore capable de présenter vos miracles mémorisés. Au moment où j’écris ces lignes (2002), les deux chapelets les plus populaires sont celui de Juan Tamariz, relativement plus fréquent en Europe, et mon propre chapelet, qui semble être plus en vogue aux Etats-Unis. Le chapelet de Juan est présenté à la fin du volume 2 de ses vidéos Lessons A-1 Multimedia, 1997, et aussi dans son livre Sinfonia en Mnemonica Mayor (deux volumes, 2000) [[N.D.T. republié en Anglais par Hermetic Press en 2004 sous le titre « Mnemonica », traduction de Rafael Benatar]] . Le chapelet Aronson à été publié originellement dans un livret séparé A stack to remember en 1979, qui est repris dans son intégralité dans mon livre Bound to please. Les nombreuses fonctionnalités qui y sont incluses sont discutées en détails dans ce même livre ainsi que dans Try the Impossible. Pour plus de commodité, le chapelet Aronson est donné dans l’Annexe B de cette introduction.
Indépendamment du chapelet que vous déciderez d’apprendre, laissez-moi-vous donner deux opinions personnelles. Premièrement vous verrez que la vaste majorité des effets que vous ferez avec un jeu mémorisé sont en fait indépendants du chapelet, ce qui signifie simplement qu’ils peuvent être faits avec n’importe quel chapelet, ainsi le problème de quel chapelet a été appris sera la plupart du temps sans objet. Deuxièmement, j’ai rencontré trop de cartomanes qui « attendent » que le chapelet parfait soit conçu, se promettant de l’apprendre dès qu’ils auront trouvé ce chapelet « ultime ». Ne vous cachez pas derrière une telle excuse. Il n’est pas de meilleur moment que maintenant pour commencer, et sur le long terme, peu importe que l’As de pique soit en 6em ou 7em position dans votre chapelet mémorisé, ce qui importe c’est que vous ayez mémorisé un chapelet ou pas.
De quoi d’autre ai-je besoin ?
Chaque fois que vous utiliserez un jeu en chapelet (et cela s’applique non seulement au jeu mémorisé mais aussi aux chapelets d’un jeu complet) il est utile de connaître quelque faux mélanges ainsi qu’un ou deux bons échanges de jeux.
Les faux mélanges utilisés avec parcimonie, de manière décontractée à un moment faible, permettent de couper court aux suspicions qu’un arrangement du jeu soit utilisé. La littérature magique regorge de techniques et de descriptions, aussi je dirais seulement qu’il est pratique de connaître des faux mélanges adaptés aux différentes situations d’exécution. Pour le travail sur table, je préfère le Zarrow, ou mon propre «The Aronson strip-out », Simply Simon p.65. Pour le travail debout, c’est bien de connaître un faux mélange à la Française (je préfère le première méthode d’Erdnase, « Expert at the card table », 1902, p.159) ou un faux mélange Américain en mains. J’utilise ma propre version du mélange de Lennart Green, mais il y a plein d’autres possibilités publiées (par exemple , “On the Hay False Dovetail Shuffle,” Vernon Chronicles, 1989, Vol. 3, p. 44; “The Cascade Shuffle,” Tamariz, Sonata, p. 77; “An In-the-hands False Shuffle,” Roberto Giobbi, Card college, Vol. 3, p. 651; le travail élégant de Guy Hollingworth’s dans sont livre Drawing room deceptions, 1999, p. 169 [[N.D.T. traduit en Français sous le titre de « Prestige et illusions »]], ou le faux mélange Einstein de Karl Hein, Magazine Genii, Avril 2001). Il est aussi utile de se souvenir que certains effets de jeu mémorisé n’utilisent qu’un chapelet partiel, ainsi avec ces tours vous pourrez créer une illusion convaincante en mélangeant réellement seulement la portion du jeu non nécessaire.
Les échanges de jeux vous permettent d’introduire votre jeu mémorisé au cours d’une routine plus longue. Ils sont utiles mais non essentiels – il est parfaitement possible d’organiser vos routines afin que les effets utilisant le jeu mémorisé soient au début. Quelques artistes ont une série d’effets qui maintiennent l’ordre du jeu tout le long de la routine ; voir le chapitre de Michael Close sur le jeu mémorisé « On the Memorized Deck » dans Workers 5, 1996, p. 122. La plupart des nombreux effets inclus dans le chapelet Aronson et décris dans Try the impossible maintiennent le chapelet dans l ‘ordre.
Les échanges de jeux donnent beaucoup de flexibilité et, dans beaucoup de cas, sont faciles à faire. Je trouve pratique de simplement échanger les paquets en mettant le jeu de coté derrière un autre accessoire ou dans ma poche, pendant que je fais un autre tour qui n’utilise pas le jeu. L’échange aux Jokers de Mel Brown, « Joker Deck Switch », est une ruse très forte qui permet d’échanger les jeux entre deux tours sous le couvert de l’oubli par inadvertance de la remise des jokers dans l’étui (M-U-M, August 1958, p. 96, aussi décris dans mon livre Bound to Please p. 61). Certain tours nécessitent réellement que vous mettiez le paquet dans votre poche ou sous la table, et ces procédures peuvent être souvent utilisées pour inclure un échange du jeu [[N.D.T. voir Closely Guarded Secrets de Michael Close pour une version debout du même effet]]. J’’utlise mon tour commercialisé « Side-Swiped » pour accomplir un tel échange de jeu . Certains tours sont expressément conçus pour fonctionner comme une transition depuis un jeu normal à un jeu mémorisé, tout en étant des effets forts par eux même (voir « Mental Spell » dans Bound to Please p. 128 ou “Bait and Switch” [[N.D.T. Ce tour est traduit dans The very best of Simon Aronson]]). Si jamais vous faites « disparaître » un jeu et ensuite le faites réapparaitre, vous pouvez tout aussi bien comme bonus procéder à l’échange avant de faire réapparaitre le jeu. Pour résumer, j’ai constaté qu’il était relativement facile d’introduire un jeu en chapelet mémorisé. Assurément, il y a un effet classique qui permet subtilement de classer un jeu emprunté et mélangé dans l’ordre de votre chapelet, à n’importe quel moment de votre prestation, juste sous les yeux de vos spectateurs ! (voire « A Subtle Game » dans le livre The Nikola Card System, 1927, inclus dans le chapitre 20 du livre de Jean Hugard L’encyclopédie des tours de cartes).
Y-a-t-il un substitut à la mémorisation ?
Non.
J’insiste sur la nécessité pour les 52 liens mentaux ; entre chaque position numérotée et sa carte respective ; d’être « instantanés », « instinctifs » et « par cœur » afin de vous dissuader d’envisager l’espoir tentant mais vain que, quelque part, il y a un « truc » sur lequel on pourrait s’appuyer et qui rendrait inutile l’apprentissage par cœur du chapelet. Rien de tel n’existe.
Quelques personnes, faisant preuve d’inertie inventive, on pensé pourvoir se passer d’avoir à mémoriser l’ordre du jeu en imaginant à la place un ordre des cartes qui serait déductible d’une ou plusieurs formules mathématiques. En utilisant ces formules, on peut (espérons simplement) « convertir » n’importe quel numéro de position en sa carte à jouer correspondante, ou vice versa. Une telle « formule » est elle un substitut valide pour un jeu mémorisé ? La réponse courte, pragmatique et la seule réaliste est : en aucune façon.
Considérez par exemple, la très simple localisation par division du jeu, dans laquelle le jeu est secrètement séparé en numéros de chapelet « haut » et « bas » afin que vous puissiez localiser la carte en trouvant une carte « étrangère » dans le jeu divisé, la seule carte dont le numéro de chapelet « appartienne à l’autre moitié ». Une « formule » serait hors de question ici parce que vous devriez utiliser votre formule pour chacune des cartes pour simplement déterminer si elle c’est une carte « haute » ou « basse » ! Et ce problème se présentera chaque fois que vous analyserez un « groupe » de cartes pour chercher des caractéristiques particulières, par exemple le plus haut numéro de chapelet dans le groupe. Quand le numéro de chapelet saute à vous de mémoire (tout comme la couleur d’une famille saute à vos yeux visuellement), une telle recherche ne pose pas de problèmes, mais pour pratiquement toute utilisation un peu compliquée, vous n’avez simplement pas le temps de commencer à travailler à partir de formules pour chaque carte du groupe.
De plus, dans la plupart des tours avec un jeu mémorisé, vous êtes déjà préoccupé à faire trop d’autres choses au moment même ou vous devez appliquer ces « formules » indispensables. Vous souhaiterez alors connaître par cœur le numéro de chapelet des cartes, parce que la plupart des tours de magie utilisant le jeu mémorisé nécessitent eux même par ailleurs que fassiez quelques calculs mathématiques simples avec ce même numéro de chapelet. Les formules vont augmenter les nombres des calculs mentaux nécessaires et vont vous ralentir. Vous commencerez à hésiter et votre esprit sera en surchauffe. Ce n’est surement pas distrayant ni trompeur. Si on voit que vous réfléchissez, c’est aussi mauvais que si l’on voyait vos brisures.
Les chapelets à base de formules ont leur place dans la magie, certains sont très inventifs. Si, hypothétiquement, un chapelet à base de formule a des avantages spécifiques qui le rendent intéressant à apprendre pour lui-même alors je pense qu’il n’y a aucun mal à mémoriser un chapelet à formule comme l’ordre de chapelet que vous avez choisi de mémoriser, cela vous offrira certainement une sécurité mentale en vous permettant, dans le cas d’un oubli momentané, d’utiliser la formule pour vous venir en aide. Une formule peut, dans quelques tours très simples, fournir une autre solution valide à la mémorisation, mais pratiquement dans tous les tours de jeu mémorisé un peu plus complexe ou avancés, une formule n’est que d’un usage théorique.
II. Les principes du jeu mémorisé en action : Principes de base
Cela fait un certain temps que l’on utilise le jeu mémorisé comme un “outil” secret ou simplement pratique et donc ce n’est pas surprenant que beaucoup d’utilisations différentes aient été développées.
J’ai pensé qu’il serait utile que dans cette introduction, je résume brièvement cinq principes que j’ai trouvés particulièrement utiles pour concevoir des effets avec le jeu mémorisé qui soient en même temps forts et trompeurs. A chaque fois j’ai donné la référence de mes propres tours qui utilisent judicieusement ces principes.
1. Groupes secrets
Dans notre discussion nous avons déjà abordé l’idée que le numéro de chapelet d’une carte fournit une nouvelle identité secrète pour chacune des cartes du jeu. A la page 5, j’ai donné un exemple d’effet de localisation par division du jeu en numéro de chapelet haut et. Mais je n’ai fait qu’effleurer le sujet.
Beaucoup d’excellents tours de localisation de carte(s) reposent sur la division secrète préalable du jeu en deux groupes ou plus (rouges/noirs, pairs/impairs, les quatre différentes couleurs, index ouverts (3/7/R) fermés (6/8/9/D), figures/nombres, etc.). En maintenant le jeu dans un tel ordre, le magicien est capable de faire des localisations et des découvertes, généralement en retrouvant une carte « intruse » ne faisant pas partie d’un groupe particulier ou en utilisant la séparation entre groupes (la carte du bas d’un groupe, ou la carte supérieure du groupe d’après) comme une clef secrète. De tels groupes permettent des mélanges convaincants car tant que le mélange est fait à l’intérieur de chaque groupe, le modus operandi secret est conservé.
Maintenant considérez les avantages qu’un jeu mémorisé peu apporter à ce type d’effets, si le groupe secret est basé sur le numéro de chapelet des cartes. Premièrement le groupe sera par définition complètement invisible et indiscernable parce que le principe d’organisation n’est pas fondé sur une caractéristique visible de la carte elle-même mais seulement sur son numéro, secret, de chapelet.
Deuxièmement vous pouvez diviser le jeu en autant de groupes distincts et séparés que vous le souhaitez, et chaque groupe peut être de la taille que vous désirez. Vous n’êtes pas limité à exactement 26 cartes rouges ou noires, ou exactement 13 cartes dans une couleur, ou n’importe quelle limitation fixe imposée par les caractéristiques physique de la carte. Vous pouvez utiliser peu ou beaucoup de groupes inégaux ; utilisant autant de cartes que vous le voulez.
Troisièmement, le point de division entre les groupes peut être « flottant », et n’a pas besoin d’être décidé au préalable. Un exemple permettra d’illustrer mes propos. Si vous utilisez la division traditionnelle noire/rouge, il doit y avoir 26 cartes dans chaque groupe. Si cependant vous utilisez une division en carte hautes et basses, le point de division n’a pas à être exactement au milieu – il peut être où vous voulez ! Cela vous donne beaucoup de liberté dans votre présentation, parce que l’on peut demander au spectateur de couper « environ à la moitié ». Si vous connaissez d’une manière ou d’une autre une carte clé à l’endroit où il coupe (soit la carte visible du paquet supérieur, ou la carte du dessus de la moitié inférieure), vous pouvez créer votre groupe à partir de la coupe du spectateur ; par exemple, si votre carte clé vous informe que le spectateur a coupé par exemple 23 cartes, alors les « basses » seront constituées des numéros de chapelets de 1 à 23 et les « hautes » de 24 à 52. Cette division flottante peut être étendue à n’importe quel nombre de groupes, imaginez vous seulement demander à un spectateur N°1 de « couper environ un quart » et ensuite de mélanger son paquet, entretemps vous prenez connaissance de la carte supérieur du reste du paquet. Ensuite demandez au spectateur N°2 de répéter ces opérations, en coupant un autre quart et ainsi de suite.
Une fois le jeu divisé ainsi, vous saurez les numéros de chapelet des cartes de chaque paquet et pourrez ainsi faire des localisations surprenantes en utilisant cette information. Voyez par exemple mes tours « High Class Location » « Four Stop Intersection » « S-D Plus » et « Shuffle-bored ». La division flottante peut apporter de la souplesse à beaucoup d’effet de localisation.
Quatrièmement, les groupes organisés par numéro de chapelet autorisent la mémorisation et des manipulations mentales simplement impossibles avec les regroupements traditionnels. Dans mon tour « Histed Heisted » le jeu est distribué à dix personnes différentes, en donnant à chacun dix cartes « au hasard ». Ce que le public ne sait pas c’est qu’un spectateur reçoit en fait cinq cartes dont les numéros de chapelet se terminent par 1, le second spectateur reçoit les cartes dont le numéro de chapelet se terminent par 2 (c.-à-d. 2, 12, 22, 32, 42) et ainsi de suite. Non seulement cela vous permet de mémoriser instantanément les cartes distribuées à chacun des spectateurs, mais cela autorise une subtile mais facile application du principe d’élimination « cross-matrix », en récitant simplement votre chapelet en groupe distinct de dix cartes ! Je ne m’attends pas à ce que les lecteurs débutants suivent et apprécient complètement toutes les nuances que je souligne ici mais lorsque vous lirez le tour complet, je pense que vous serez stupéfait de la lecture de pensée que l’on peut accomplir seulement en utilisant un regroupement subtil et secret des cartes à partir de leur numéro secret de chapelet.
2. Compter
Le lien entre une carte et son numéro de chapelet implique, évidement, que si un paquet est pris sur le dessus du jeu et que vous connaissez la carte de coupe, vous savez alors immédiatement le nombre de cartes dans le paquet coupé. Ce point est utilisé dans un des premiers effets de jeu mémorisé, « Peser les cartes » du livre The Nikola Card System mentionné précédemment.
J’ai trouvé que l’application inverse de cette relation numérique est encore plus intrigante, c’est-à-dire que si vous pouvez compter secrètement le nombre de cartes contenues dans un paquet coupé sur le jeu, vous saurez automatiquement la carte qui était la carte de coupe originale de ce même paquet.
La lecture au pouls. C’est un effet simple mais trompeur. Demandez à un spectateur de couper un paquet depuis le dessus du jeu posé sur la table, de regarder la carte de coupe (la seule carte sur la face du paquet) et ensuite de mélanger son paquet puis de l’étaler en ruban sur la table face visible en face de vous. Vous prenez ensuite le poignet du spectateur pour sentir son pouls et lui demander de simplement penser à sa carte pendant que vous déplacer sa main d’avant en arrière au dessus du jeu étalé. Lentement, vous vous abaissez sa main jusqu’à ce qu’elle atterrisse sur une carte, disons le sept de carreau. Et bien sûr vous avez retrouvé sa carte. Comment ? Pendant que vous déplaciez sa main au dessus des cartes, vous avez silencieusement compté le nombre total de cartes formant l’éventail complet. Supposons que vous ayez compté 15 cartes, cela signifie que le spectateur à coupé sur la 15eme carte (qui est le sept de carreau dans le chapelet Aronson). Le reste est seulement de la mise en scène, comme si vous étiez capable de lire son pouls et d’être « guidé » par lui. Ce peut être une démonstration assez convaincante.
Il est aussi possible de faire l’éventail face en bas ! Faite comme décrit au dessus mais cette fois veillez à ce que le paquet une fois mélangé soit étalé en ruban face en bas sur la table. Tenez-lui le poignet et faites comme si les vibrations que vous recevez du spectateur vous guidaient vers une carte sur laquelle vous abaissez le doigt du spectateur. Ayez l’air incertain pendant que vous soulevez un coin de la carte face en bas pour y jeter un coup d’œil, et demandez, de manière plutôt hésitante, « votre carte est le sept de carreau ? » Une fois de plus en comptant le nombre total de cartes dans le ruban face en bas vous connaissez l’identité de la carte. Le reste est purement du bluff : peu importe la carte que vous avez en fin de compte touchée, car vous seul l’avez regardée ! Vous allez alors faire comme si c’était le sept de carreau (ou n’importe quelle autre carte correspondant au numéro 15 dans votre chapelet). Dans ses deux présentations, cet effet est à la fois trompeur et distrayant. – et tout ce qu’il demande est de pouvoir compter secrètement les cartes d’un ruban. Le total vous donne la carte de coupe originelle. Il est important que vous réalisiez que ce principe simple, un comptage secret, a une application beaucoup plus large que le seul tour ci-dessus. Il y a beaucoup de manières subtiles et ingénieuses de compter secrètement le nombre de cartes dans un paquet donné, et chacune peut être utilisée pour créer un effet de localisation étonnant. En faisant quelques mélanges à la française vous arriverez à compter les cartes. Si vous demandez au spectateur d’éventailler un petit paquet de cartes devant ses yeux, vous serez peut être capable de secrètement compter le nombre de cartes formant l’éventail. Si vous demandez au spectateur de distribuer (« Distribuez et arrêtez vous quand vous le souhaitez. » ou « distribuez les cartes en deux tas. ») vous pouvez alors compter les cartes au fur et à mesure de la distribution.
L’expérience m’a montré que ce principe de comptage secret échappe à l’attention de tous, même des magiciens expérimentés, tant qu’il y a une justification naturelle à la méthode que vous adoptez.
Ce principe de comptage est utilisé et développé dans quelques un de mes effets de jeu mémorisé favoris, en particulier « Two Card No Touch Location,” “Past, Present, Future,” et “Madness in Our Methods » [[N.D.T. Ce tour est traduit dans The very best of Simon Aronson]] .
3. Point final
L’idée de comptage précédente est extrêmement utile tant que vous avez un point de départ (le dessus du jeu habituellement) à partir duquel compter. Mais que faire si vous n’avez pas un tel point de départ ?
Localisation à la coupe centrale. Imaginez ce scénario : le jeu est sur la table, le spectateur retire un bloc de carte du centre du jeu, regarde sa carte de coupe (la carte visible sous le paquet qu’il a retiré du jeu) et ensuite mélange son paquet. Comment faire pour retrouver sa carte dans de telles conditions ? Rendons les conditions encore plus impossibles : après que le spectateur a mélangé son paquet, il vous donne quelques cartes (mais pas toutes) de son paquet et il décide seul combien et quelles cartes il vous donne (dans la mesure où la carte choisie fait partie de la sélection). Croyez le ou non, grâce aux propriétés du chapelet, vous pourrez rapidement parcourir les cartes que vous avez en main et trouver sans hésitations sa carte, sans toucher aucune des cartes restantes, sans poser aucune question, sans carte clef, et sans compter !
Comment ? En utilisant le concept du « point final » d’un groupe de cartes. Si vous vous représentez le processus de sélection qui consiste à retirer un paquet de cartes du centre du jeu, un peu de réflexion vous apportera la réponse. De toutes les cartes prisent au centre du jeu, la carte visible de ce paquet (celle choisie) aura le rang le plus élevée de toutes les cartes du paquet central. Tout ce que vous avez à faire, c’est de réciter mentalement le rang de chaque carte que le spectateur vous donne et de prendre celle dont le rang est le plus grand : ce sera la sélection.
J’ai inauguré ce concept de point final dans ma « Localisation à la coupe centrale » et j’insiste sur le fait que l’effet de localisation décrit précédemment est seulement là pour illustrer ce principe. Le principe de point final peut être développé de beaucoup de manières ingénieuses. Vous pouvez avoir de multiples sélections même dans le même paquet – il vous suffit d’utiliser la carte supérieur du bloc de cartes dont le numéro de chapelet sera toujours le plus petit du groupe. Vous pouvez utiliser plusieurs blocs successifs de cartes et retenir le point final de chaque bloc ! Le principe du point final est d’une utilité étonnante car il peut être utilisé dans des situations ou les conditions sont très contraignantes.
Le principe du point final n’est bien sûr pas limité à l’extrémité d’un bloc ou groupe de blocs – parce qu’il ne demande pas forcément l’existence de blocs de cartes consécutives – il peut être utilisé avec n’importe quel groupe de cartes, si vous connaissez la position relative de la carte choisie par rapport au point final. Voici ci-dessous une utilisation très différente de la même idée qui illustre la « relativité » de ce concept.
Localisation de cinq cartes : Etalez votre jeu mémorisé en ruban face en bas sur la table et demandez à un spectateur de faire glisser cinq cartes au hasard seulement à demi hors du ruban en les gardant face en bas. Expliquez à un second spectateur qu’il devra ramener le choix à une seule carte en mettant son doigt sur une des cinq cartes. Une fois qu’il a fait cela, vous vous retournez pendant qu’il montre la carte qu’il a choisie à tout le monde. Ensuite, il retire les quatre autres cartes qui dépassent du ruban pour les mélanger avec sa carte et vous tend alors les 5 cartes.
Malgré ces conditions, vous pouvez déterminer instantanément quelle carte parmi les cinq est la carte sélectionnée, en utilisant le subtil principe du point final. Quand le deuxième spectateur pointe son doigt sur une des cartes dépassant du ruban face en bas parmi cinq, il vous faut retenir la position de cette carte parmi les cinq, la première, la deuxième, la troisième, la quatrième ou la cinquième, (en respectant l’ordre des cinq cartes) en comptant à partir du dessous du jeu. Vous avez uniquement à connaitre la « position relative », peu importe que les cartes ne se suivent pas. Quand le spectateur vous donne les cinq cartes, vous devez les réarranger dans l’ordre, du rang le plus élevé vers le plus petit (vous pouvez même faire cet « arrangement » mentalement, sans changer physiquement les positions des cartes). La « position relative » que vous avez notée vous permet maintenant de retrouver la carte choisie. Par exemple, si le spectateur a pointé son doigt sur la deuxième carte (à partir du dessous du jeu) parmi les cinq, vous savez que la carte choisie sera celle dont le numéro de chapelet est le deuxième le plus élevé.
Si vous voulez voir ce qui peut être fait avec le principe du point final, en particulier conjugué avec d’autres idées que j’ai explorées, alors en plus de ma « localisation à la coupe centrale », vous devriez jeter un coup d’œil à mes tours « Four Part Harmony » et « Topsy Turvy » [[N.D.T. Ces tours sont traduits dans The very best of Simon Aronson]].
4. Principes Mathématiques
Souvent, les débutants sont rebutés car ils imaginent que la magie du jeu mémorisé demande beaucoup de calculs mentaux. Comme vous avez vu dans les exemples précédents, ce n’est pas nécessaire. En nous référant aux principes exposés précédemment, nous avons été capables de créer des effets étonnants de localisation ne demandant rien de plus que la capacité à compter ou à trouver la carte ayant le rang de chapelet le plus élevé dans un groupe de cartes.
Je suis tout à fait conscient que ce texte est seulement une « introduction » et que la plupart des lecteurs qui le parcourent distraitement par curiosité se demandent si cela en vaut la peine ? Je ne veux pas vous effrayer en vous laissant croire que la magie du jeu mémorisé est complexe, parce ce n’est pas nécessairement le cas. Mais je serais aussi incomplet si je ne vous signalais pas les occasions que fournit le jeu mémorisé quand il est utilisé avec d’autres principes mathématiques applicables à la magie des cartes, principes que vous devez probablement déjà connaitre. Le fait que le jeu mémorisé soit dans un ordre connu, numéroté dont vous connaissez la position de chaque carte par cœur facilite énormément et même peut simplifier l’utilisation d’autres principes mathématiques.
Il y a quelque temps, j’ai écrit un essai Memorized Math qui traitait ce domaine dans le détail. Je ne vais pas répéter ce que j’ai écrit, mais le jour où vous vous sentirez à l’aise avec le jeu mémorisé, il sera sans doute intéressant pour vous de lire cet essai et de commencer à réfléchir à l’utilisation de ces principes mathématiques. Je ne dis pas de transformer toute votre magie du jeu mémorisé en formules mathématiques complexes, loin de là. Je veux juste vous faire comprendre que quand vous utiliserez le jeu mémorisé, cela rendra d’autres tours de cartes, ceux qui utilisent des principes mathématiques, plus accessibles et plus trompeurs, en ajoutant une autre dimension à votre chapelet mémorisé.
Le premier outil mathématique que le jeu mémorisé vous apporte est qu’il vous donne le numéro de rang de chaque carte. Quiconque a souhaité avoir une carte clef à une position donnée (c.-à-d. en position 13 pour le tour de l’horloge, en position 26 pour diviser le jeu en deux ou n’importe quel autre position) appréciera que le numéro de rang dans le chapelet vous offre 52 cartes clef, sans aucun calcul mathématique. Mais, à partir de là, il ne nous reste qu’une étape à franchir – en pratique une seule coupe du jeu – pour réaliser que vous pouvez placer n’importe quel carte en n’importe quel position. Tout ce que vous devez savoir est où couper le jeu. Un petit calcul mathématique vous le dira. (Comme je l’ai déjà mentionné, je ne me lancerai pas dans les formules dans cette introduction, c’est la dernière chose dont vous avez besoin en ce moment. Mais si vous savez soustraire un nombre de 53, ce ne sera pas plus compliqué que cela pour 90% des effets utilisant les mathématiques). Et vous n’avez pas besoin d’une estimation précise pour couper le jeu, ni de savoir exécuter un saut de coupe « invisible ». Vous pouvez faire une telle coupe ou ajustements mathématiques en étalant simplement les cartes face en l’air, pour montrer qu’elles sont « bien » mélangées, ou pour enlever les jokers. Quand vous repérez la cible, coupez nonchalamment le jeu à cet endroit.
Connaître et positionner une carte clef est relativement rudimentaire. Imaginez seulement ce que vous pourriez accomplir si vous pouviez utiliser quelques unes des formules utilisables avec le mélange pharaon sur votre chapelet. Vous pourriez connaître la position finale, après un ou plusieurs mélanges pharaon, de n’importe quelle carte que vous voudriez suivre. Dans Memorized Math je décris même comment un jeu mémorisé est « automatiquement » insensible au mélange pharaon (stay stack), comment la moitié supérieure du jeu est constamment en relation avec la moitié inférieure, et ce quelque soit le nombre de mélanges pharaon.
Ceux d’entre vous qui font des tours basés en partie sur les positions « binaires » (c.-à-d. 2-4-8-16-32), trouveront plus de souplesse quand ils réaliseront qu’un jeu mémorisé peut fournir l’information sur quelle carte occupe précisément ces positions binaires clefs. Les amateurs de tours de distributions, seront heureux de savoir qu’il existe des formules pour connaître quelle sera la carte finale, et ce quelle que soit la taille du paquet de départ. Et la liste des applications mathématiques ne s’arrête pas là, mais c’est suffisant pour une « introduction ». Laissez-moi ajouter quelques remarques pour clôre le sujet. Même si un tour dépend des mathématiques, son « apparence » ou « ressenti » pour les spectateurs ne doit pas être ceux d’un casse tête ou d’un exercice mathématique.
Les mathématiques doivent être utilisées comme un élément secret, quelque chose que le spectateur doit ignorer. Cela implique que la présentation, le texte et le rythme doivent être planifiés afin d’être certain que tout le processus mental sera caché et non évident. Une partie de la solution est de planifier vos routines afin de d’avoir explicitement le bon moment pour faire ces calculs mathématiques. Par exemple, si vous donnez au spectateur des tâches à effectuer, alors l’attention se reportera sur lui et vous pourrez faires vos calculs quand le spectateur sera occupé.
Mon opinion personnelle est que la plupart des effets qui utilisent des calculs mathématiques, sont en fait ni difficiles ni intimidants ; si vous connaissez votre chapelet sur le bout des doigts. Mon tour favori de toujours avec le jeu mémorisé est à ce jour « Everybody’s Lazy » [[N.D.T. Ce tour est traduit dans « The very best of Simon Aronson »]]. Il ne nécessite que quelques additions ou soustractions simples, exécutées à des moments différents. Il n’est pas difficile et pourtant il produit un effet que d’autres ont gentiment qualifié de « classique » de la magie des cartes. Lisez-le et jugez vous-même si cela vaut la peine de faire un peu de maths.
5. L’index découvert
Les principes discutés jusqu’à présent sont utiles principalement pour des effets de localisation, pour découvrir une carte sélectionnée dans des conditions impossibles. Ce « principe » final va dans une direction bien différente. L’idée de base est que quand vous manipulez votre jeu mémorisé, vous avez pratiquement les 52 cartes sous votre contrôle. Si n’importe laquelle des 52 cartes est nommées, comme vous connaissez sa position exacte dans le jeu, vous pouvez avec peu d’effort imaginer une procédure qui amènera secrètement cette carte dans une position ou vous pourrez l’empalmer, la forcer, la produire magiquement ou faire quelque chose de magique avec elle. Ce genre de procédure n’implique généralement pas plus d’une coupe à l’estimation et un coup d’œil à la carte du dessous pour voire l’erreur de l’estimation. Si vous vous êtes à trompé de quelques cartes, un coup d’œil à la carte du dessous vous indiquera quoiqu’il en soit la position exacte de la carte cible depuis le dessus (ou dessous), afin qu’un ajustement mineure de plus (peut être une double coupe d’une carte ou deux) amène la carte cible sur le dessus du jeu (ou à la position que vous désirez). Notez que c’est assez puissant : un spectateur nomme juste une carte de manière informelle dans la conversation et vous pouvez la sortir de votre poche (ou l’avoir sous votre contrôle) sans jamais avoir regardé les cartes !
C’est pratiquement comme si vous aviez un index de poche avec les 52 cartes pouvant facilement et rapidement mettre la carte choisie sous votre contrôle. Seulement ici l’index secret est visible, c’est le jeu même que vous tenez dans la main ouvertement, et le chapelet mémorisé vous fournit le classement ainsi que le mécanisme pour accéder rapidement à n’importe quelle carte désirée. Parce que le jeu mémorisé peut servir comme un « index » et qu’en outre il est « visible », j’ai désigné ce concept par « index découvert ».
Dans un essai détaillé intitulé « Open index», j’explore ce concept plus en détail. J’y discute des techniques d’estimation, de coupe et de carte à l’œil ainsi que de quelques manières subtiles pour faire les ajustements nécessaires si votre estimation est fausse de quelques cartes. L’essai suggère aussi des applications et utilisations de l’index ouvert, le genre de tours qui peuvent faire le meilleur usage de cet outil inestimable. Le point à apprécier est que plus connaissez de choses sur les autres facettes de la magie des cartes, plus vous avez de techniques, d’empalmages, de contrôles, productions magiques et forçages dans votre arsenal, plus vous connaissez d’effets ou de routines, plus vous serez à même d’utiliser l’index ouvert. L’index ouvert n’est pas en lui-même un tour ou même une « méthode », c’est plutôt une chance pour prendre de l’avance dans d’autres tours que vous faites déjà en y ajoutant une dimension supplémentaire qui vous permettra de travailler avec n’importe quelle carte nommée ou désignée.
Triomphe sur demande. Voici un exemple ou l’index découvert peut améliorer un tour que la plupart des magiciens font. Le triomphe est à juste titre un classique de la magie des cartes, mais imaginez ce qu’il donnerait si le spectateur « nommait » juste une carte au lieu d’avoir à en choisir une physiquement et la replacer. Dès que le spectateur à nommé sa carte, vous utilisez l’index découvert pour secrètement amener la carte choisie sur le dessus du jeu. Assurément, vous pouvez combiner efficacement les opérations nécessaires pour amener la carte cible où vous le désirez avec la procédure normale qui est de couper le jeu et de retourner une des moitiés face en l’air. Vous pouvez alors effectuer votre mélange triomphe favori, mais la chute, quand toutes les cartes sont étalées et qu’elles sont toutes magiquement dans le même sens, la carte nommée du spectateur le regarde droit dans les yeux, c’est la seule carte face en l’air ! (et si vous utilisez le Triomphe de Vernon ou deux mélanges Zarrow, vous pouvez même maintenir votre chapelet dans l’ordre !). Ce Triomphe sur demande est un excellent exemple sur la manière dont une des facettes du jeu mémorisé qu’est l’index découvert peut se combiner avec d’autres effets de cartes pour en augmenter l’effet et leur conférer une touche encore plus magique.
Deux maîtres du concept de l’index découvert sont Juan Tamariz et Michael Close, et leur travail mérite toute votre attention. Mike à consacré un chapitre complet au concept de l’index découvert dans « On the Memorised Deck » de son livre Workers, Vol. 5. C’est à lire absolument pour quiconque prétend étudier sérieusement ce concept. En plus de présenter de nombreux effets spécifiques qui reposent sur l’index découvert, Mike aborde aussi le sujet de l’improvisation avec l’index découvert comme en Jazz, ce de manière ouverte, en réfléchissant au fur et à mesure que vous manipulez. Vous avez cette incroyable arme secrète entre les mains : quelque soit la carte que vous désiriez, vous pouvez mettre la main dessus, quelle est la meilleure manière d’utiliser ce potentiel ? Pour ceux qui sont familiers du tour classique de Vernon : « Le tour que l’on ne peut pas expliquer », sauront que parfois on peut construire le tour tout en le faisant, gérant les situations au cas par cas, tirant parti de chaque circonstance fortuite quand vous le pouvez, ou en vous rabattant sur un autre effet si le sort est contre vous. Plus vous serez à l’aise avec votre chapelet, plus vous trouverez d’opportunités et plus vous prendrez de risques pour obtenir la possibilité de réaliser un miracle. Quiconque à vu Juan Tamariz à l’œuvre, appréciera la puissance et la souplesse de cet outil dans les mains d’un magicien doué qui travaille avec beaucoup de confiance, de sang froid, des sorties multiples et une pensée créative.
J’ai publié deux de mes tours favoris utilisant l’index découvert : « Two Beginnings” et “The Invisible Card » dans Try the Impossible [[N.D.T. Ces deux tours sont traduits dans « The very best of Simon Aronson ».]] Je pense que vous verrez comment cela amène le jeu mémorisé hors des tours de localisation pour créer des intrigues magiques visuelles et distrayantes qui vont bien au-delà des tours du genre « je vais retrouver votre carte ».
J’espère que vous comprenez que j’ai sélectionné les cinq principes précédents pour les exposer. Je les ai choisis parce qu’ils sont, dans une certaine mesure, uniques à la magie du jeu mémorisé. Il y a bien sur quantité d’autres principes applicable à d’autres « chapelets » et jeux pré-arrangés qui peuvent être utilisés avec avantage avec un chapelet mémorisé. Gardez aussi à l’esprit que la discussion précédente n’a fait qu’effleurer tout ce que ces principes peuvent accomplir quand ils sont intelligemment maniés. En outre, nous n’avons même pas regardé comment ces principes peuvent êtres utilisés en combinaison les uns avec les autres. Vous pouvez créer des effets diaboliques à plusieurs phases, en utilisant un principe pour la phase un et en changeant de méthode pour utiliser un autre principe dans une phase différente. Les méthodes s’annulent les unes les autres, ne laissant au spectateur désemparé aucune autre solution que d’admirer vos pouvoirs magiques. Au fur et à mesure de votre étude de la magie du jeu mémorisé, je suis sûr que vous serez enchantés de voir à quel point le jeu mémorisé peut être ingénieux.
III. Comment dois-je apprendre mon chapelet ?
La réponse brève est : par la méthode qui vous conviendra.
L’apprentissage. Avec le temps j’ai eu de nombreuses discussions avec des magiciens du monde entier qui m’ont chacun donné leur idées, leurs trucs et astuces personnelles qui les ont aidés à apprendre leur chapelet. Leurs méthodes sont très variées mais quiconque à jamais étudié la mémoire ou la mnémotechnie vous dira qu’il n’y pas de méthode meilleure que les autres pour mémoriser quelque chose, et ce qui fonctionnera avec une personne ne marchera pas si bien avec une autre.
Certains ont choisi d’apprendre leur chapelet en utilisant la mémoire « brute », en mémorisant quelques cartes de plus chaque jour. Quand vous y réfléchissez, 52 éléments ce n’est pas tant que cela, la plupart d’entre nous connaissons au moins 50 numéros de téléphones de nos amis, proches et relations de travail – et les numéros de téléphone sont bien plus abstraits et complexes que des cartes à jouer. Beaucoup de gens, moi le premier, préfèrent mémoriser leur chapelet en utilisant un système plus organisé, plus formel, structuré pour aider votre mémoire. J’ai adopté la méthode de mémorisation universellement reconnue et acceptée fondée sur les l’alphabet mnémotechnique/phonétique et la capacité de « lier » les images entre elles à l’aide d’associations visuelles. Si vous n’en avez jamais entendu parler, Harry Lorayne sera extrêmement déçu, mais c’est un système testé et prouvé qui fonctionne réellement. Vous pourrez en trouver une description dans beaucoup de livres généraux sur la mémoire (Bruno Furst, The practical way to a Better memory, Grosset & Dunlop, 1946 – Harry Lorayne, How to develop a super power memory, Fell, 1957). Je ne vous la décrirai pas ici (cela demanderait trop de temps et j’ai déjà décrit le système complet avec force de détails dans A Stack To Remember, pages 16-29, et aussi Bound to please, p. 129-139). Ce système mnémotechnique général, fournit une structure sous jacente qui accomplit plusieurs choses importantes.
Premièrement elle traduit des nombres abstraits et des cartes à jouer sans sens particulier et indifférenciés en images visuelles uniques, frappantes et faciles à mémoriser – le tout fondé sur une simple liste de 10 unités « phonétique » de base. Cette liste de base de dix composants est réellement la seule chose devant être réellement mémorisé, et ceci peut être fait en moins de 15 minutes. Tout le reste s’appuie, est relié à, et construit sur ces 10 éléments phonétiques de base, ainsi dès que vous avez ces éléments gravé en mémoire, vous serez surpris de la rapidité avec laquelle vous pourrez les combiner pour former une superstructure mentale.
Deuxièmement le système ouvre la voie à votre esprit pour rapidement et facilement créer des images mentales qui vous permettront de lier ou associer deux images visuelles séparées. C’est cette image mentale combinée ou association qui restera mémorable dans votre esprit, votre imagination et en fin de compte, oui, votre mémoire. Parfois les gens sont intimidés quand ils entendent parler pour la première fois d’un tel système mnémotechnique, mais cela uniquement avant qu’ils ne l’essayent. Je ne connais personne qui, après avoir lu les dix pages nécessaires (c’est tout ce qu’il en est, c’est l’explication complète) ne sourit pas quand il réalise la simplicité, l’élégance et la facilité d’utilisation du système. C’est presque trop facile – comme si il devait y avoir un « truc » – mais réellement, sans essayer de vous tromper, une fois le système utilisé, les cartes et les positions seront connectées dans votre mémoire.
Troisièmement, et c’est le principal encouragement que je puisse donner, indépendamment de l’usage plus ou moins intensif que vous fassiez d’un système mnémotechnique pour apprendre votre chapelet, une fois celui-ci su, la structure mentale complète faite d’associations entre les images, les mots et les cartes bientôt disparaitra de votre esprit. Après un mois vous réaliserez que, quand vous voyez une carte à jouer, vous saurez instantanément et automatiquement son numéro de chapelet et vice versa. Le système in fine transformera votre chapelet mémorisé en un lien direct, conscient et non assisté. Faites moi confiance, je suis un ardent défenseur de ce système mnémotechnique, du moins quand il est utilisé pour apprendre une fois pour toute un jeu de carte. Je recommande de manière immodeste ma description (référencée précédemment) comme étant la meilleure écrite sur le sujet. (Pratiquement toutes les autres descriptions ont été écrites par des experts de la mémoire qui essayaient d’arriver à faire retenir à un public général tout depuis des listes de courses aux visages et aux dates, alors que mon but unique et limité quand j’ai écrit A Stack to Remember était de trouver le meilleur moyen pour un magicien d’apprendre 52 cartes à jouer). Mais vous n’avez pas besoin d’acheter mes livres pour connaitre ce système mnémotechnique ; la plupart d’entre vous doivent probablement déjà l’avoir dans leur bibliothèque – par exemple il y en a une description succincte dans Greater Magic pages 902-906, dans la partie « Mnemonics with cards » de H. Adrian Smith (c’est là que je l’ai appris initialement quand j’étais adolescent).
Finalement, laissez moi mettre en avant le fait que le système mnémotechnique cité précédemment n’est pas limité ou conçu pour le chapelet Aronson (ou n’importe quelle autre chapelet particulier). Ce système mnémotechnique vous aidera à apprendre n’importe quel chapelet.
Voici une astuce de plus. Certains utilisateurs ont suggérés que cela les avait aidé de ne pas apprendre leur chapelet en « séquence ». Ainsi, au lieu d’apprendre d’abord la carte de chapelet numéro 1, puis numéro 2, et ainsi de suite, un des apprentis décida de commencer par apprendre la position des quatre as. Après avoir appris par cœur leurs positions (en utilisant le système mnémotechnique ou n’importe quelle autre méthode), il a appris ensuite la position des quatre deux – et ainsi de suite. Il avait l’impression que cela l’avait «protégé » de l’habitude potentiellement dangereuse de penser à une carte comme venant après, ou étant liée à, une autre carte. En apprenant chaque ensemble de valeurs de manière isolé, il n’y avait aucun lien avec un ordre ou une séquence de nombres. (Il a appris le jeu très vite et le connait sur le bout de doigts). Vous pourrez tirer profit de cette approche ou vous pourrez varier le concept en apprenant par exemple les 13 piques d’abord, ensuite les cœurs etc.
L’entraînement. Une bonne structure mentale bien organisée peut vous faire apprendre le chapelet au début et vous donner de la confiance et de la sécurité dans vos premiers pas pour l’utiliser. Mais au début vous voudrez aussi avoir des façons de vous entraîner à votre chapelet, des exercices à faire et des quizz mentaux pour dérouiller votre esprit. Les utilisateurs ont suggérés beaucoup de conseils au fil des ans. C’est simple de créer un jeu de carte « flash » – prenez un jeu de carte vieux et usé et marquez le numéro de rang de chapelet au dos de chaque carte avec un stylo marqueur épais. Au-delà du défi évident qui consiste à mélanger les cartes et à les distribuer afin de savoir combien vous serez capable d’en nommer (à la fois la carte et le numéro de chapelet), vous pouvez essayer différentes combinaisons. Par exemple, à partir des dos (coté numéro de chapelet), mélangez et voyez à quelle vitesse vous pouvez distribuer et séparer les cartes en rouges et noires. Ou bien à partir des faces, regardez à quelle vitesse vous pouvez séparer les numéros de chapelet haut des numéros de chapelet bas. Il y a plein de combinaisons de tri différentes (suites, numéro de chapelet impairs, les figures, ..) que vous pourrez utiliser pour vos exercices.
Vous n’avez pas besoin d’avoir un jeu de cartes « flash » physiquement sous la main pour vous entrainer car, évidement, le seul but est d’entrainer votre esprit. Cela signifie que vous aurez de multiples occasions de vous entrainer à réciter votre chapelet mémorisé, particulièrement tous ces moments perdus ou à attendre, quand votre esprit n’est pas occupé par autre chose (ce que j’appel des « moments à se rappeler » [[N.D.T. référence au livre Moments to Remember de Simon Aronson]]. Chaque fois que vous êtes sous la douche, que vous attendez le train ou un taxi, que vous êtes dans une file d’attente, que vous tondez la pelouse ou que vous écoutez distraitement une conversation d’une soirée de cocktail ou un discours sans intérêt – pratiquez intérieurement votre chapelet mémorisé. Vous pouvez le réciter à l’envers, puis tous les piques, cœurs, trèfles et carreaux dans l’ordre – ou dans n’importe quelle autre combinaison qu’il vous plaira.
Beaucoup de magiciens sont des informaticiens, et c’est relativement facile (et amusant) de créer un programme qui vous questionne sur votre chapelet. L’ordinateur peut tirer aléatoirement les cartes ou les numéros de chapelet, et il ne s’en lassera jamais. Mark Harris à conçu un logiciel de questions réponses simple et très efficace qui fonctionne comme un jeu de cartes « flash » informatisé. Le programme peut vous interroger sur tout depuis les cartes et leurs positions jusqu’aux différentes clefs mnémotechniques dont j’ai parlé dans A Stack to Remember . Mark à généreusement permis que son logiciel soit disponible sur mon site web www.simonaronson.com, ainsi si vous choisissez d’apprendre le chapelet Aronson, c’est une manière commode de vous entraîner quelques minutes. Essayez-le. Comme dit précédemment, le plus difficile est simplement de commencer – bientôt, maintenant. Une fois ce pas franchit, vous serez surpris des progrès que vous ferez.
Combien de temps cela me prendra ?
Il y a vingt ans, dans Card Ideas, j’ai écrit « il faut environ un mois, avec peut être 45 minutes d’entrainement par jour, pour être à l’aise et vraiment connaître son chapelet ». Mon expérience, à cette époque, était uniquement fondée sur ma propre courbe d’apprentissage, plus celle de quelques amis qui avaient appris mon chapelet. Maintenant que j’ai parlé avec littéralement des centaines de personnes qui ont mémorisé un jeu, je dirais que mon estimation initiale est, si tant est que c’est possible, conservative. Si vous consacrez réellement 45 minutes par jours à l’apprentissage, l’entrainement et à l’exercice pour renforcer les liens mémoriels, vous devriez être opérationnels en quelques semaines. Le record absolu à ma connaissance est de seulement trois jours, mais l’auteur de cet exploit y a consacré tout son temps (je n’aurais pas aimé habiter avec lui pendant ce marathon). Faites preuve de volonté et d’équilibre et vous ne devriez pas avoir de problèmes. Une fois que vous aurez votre chapelet en mémoire, vous pouvez vous empêcher de « rouiller », même si vous ne faite pas régulièrement d’effets utilisant le jeu mémorisé en effectuant les récitations mentales citées précédemment, chaque fois que vous avez du temps « mental » libre.
Je prédis que les seules personnes qui ne réussiront pas à apprendre un chapelet seront celles qui n’auront pas essayé.
Conclusion
En conclusion de cette introduction, je voudrais ajouter une note d’avertissement importante. J’ai essayé d’expliquer certains concepts de base, des principes et des thèmes qui sont centraux à la magie du jeu mémorisé, afin de vous aider à démarrer, mais cette discussion théorique a fait l’économie de la « présentation ». Une telle omission est compréhensible dans une introduction dont le but est juste de vous donner les grandes lignes, mais je ne souhaite que personne sorte de cette introduction en pensant que la bonne magie du jeu mémorisé consiste simplement à trouver une carte choisie dans des conditions difficiles. La magie du jeu mémorisé, comme tous les domaines de la magie, nécessite des intrigues intéressantes, des textes distrayants, des surprises et des camouflages, pour donner de la chair aux squelettes nus que nous avons vus jusqu’à présent. J’espère que ces concepts et ces principes vous intrigueront et vous donneront l’inspiration pour travailler, mais je vous en prie, essayez de leur donner la présentation qu’ils méritent, une présentation qui aidera vos spectateurs à apprécier et à se souvenir des miracles que vous leur montrerez.
Annexe A
Bibliographie des écrits de Simon ARONSON
sur le jeu mémorisé
(à la date de mai 2002)
Abbréviations des publications
– KAB = Kabbala (numéro dédié à Simon Aronson, avril 1973)
– CI = The Card Ideas of Simon Aronson, 1978
– STR = A Stack to Remember,1979
– SB = Shuffle-bored,1980
– AA = The Aronson Approach, 1990
– BTP = Bound to Please, 1994 (une compilation des premiers travaux d’Aronson, inclut notamment KAB, CI, STR, SB et d’autres articles)
– SS = Simply Simon,1995
– TII = Try the Impossible, 2001
– VBO = The very best of Simon Aronson, 2005(Edition Magix – Traduction de Richard Vollmer)
Essais
– General Observations on the Memorized Deck (CI p. 88, BTP p. 84)
– Memorized Math (AA p. 113)
– The Open Index (SS p. 222)
Effets
– Some People Think (KAB p. 57, BTP p. 3, VBO p. 105)
– Lie Sleuth (KAB p. 58, BTP p. 5, VBO p. 110)
– Group Shuffle (KAB p. 59, BTP p. 8)
– Two Card “No Touch” Location (CI p. 95, BTP p. 88)
– Four Stop Intersection (CI p. 100, BTP p. 92, VBO p. 170)
– Histed Heisted (CI p. 104, BTP p. 95, VBO p. 161)
– S-D Plus (CI p. 111, BTP p. 100)
– Center Cut Location (CI p. 117, BTP p. 105)
– Shuffle-bored (memorized deck applications) (SB p. 14ff, BTP p. 160ff, VBO p. 192)
– Bait and Switch (AA p. 85, VBO p. 150)
– Any Card, Then Any Number (AA p. 93)
– Four Part Harmony (AA p. 101)
– Past-Present-Future (SS p. 153, VBO p. 136)
– Lazy Memory (SS p. 162)
– Everybody’s Lazy (SS p. 167, VBO p. 95)
– Two Wrongs Make It Right (SS p. 173)
– Taking Advantage of One’s Position (SS p. 179)
– Self-Centered (SS p. 187)
– Madness in Our Methods (SS p. 194, VBO p. 176)
– Topsy Turvy (SS p. 203, VBO p. 116)
– High Class Location (SS p. 216)
– Twice as Hard (TII p. 46)
– Two Beginnings (TII p. 171, VBO p. 83)
– The Invisible Card (TII p. 175, VBO p. 88)
The Aronson Stack
Dans « A Stack to Remember », tel que réimprimé dans BTP, avec de nouvelles notes de 1994 :
The Aronson Stack
Features of the Aronson Stack:
– Draw Poker Deal
– Stud Poker Deal
– Ten Card Poker Deal
– Poker Routines
– Perfect Bridge Hand
– Spelling
– Any Poker Hand Called For
– Mental Spell Pocket Deck Switch
– Small Packet Trick Pocket Deck Switch
– Blackjack Demonstration
Memorizing the Aronson Stack
Dans « Unpacking the Aronson Stack » (un chapitre de TII, p. 193 – 266):
Introduction: Stalking the Stack
– Aces Awry (Production des as)
– Four on a Match (Production des quatres)
– Jack Coincidence (Production des valets)
– The Mind Reading Deck, Part 6 (Production des sixs)
– The Mind Reading Deck, Part 9 (Production des neufs)
– The Mind Reading Deck, Part 7 (Production des septs)
– Two by Four (Production des deuxs)
– Fit Four a King (Production des rois)
– Joshing With The Threes (Production des trois)
– Routine Maintenance (Poker Deal Restoration)
– Truth-Sayer (quatre sequences de détecteur de mensonges)
– Deal and Duck Poker
– Reciprocal Spell Pairs
– Threespell (utilisant le principe UnDo Influence)
– Built for Two (utilisant le principe UnDo Influence)
– Triple Trick Tip
– Sequence Spells
« The Aronson Stack Makes Good », MAGIC magazine, avril 2002, p. 79
D’autres tours spécifiques au chapelet Aronson sont décris sur la page dédiée au chapelet Aronson sur www.simonaronson.com
Annexe B
LE CHAPELET ARONSON
TABLE 1
Le chapelet ARONSON (Numériquement)
Si vous prenez un jeu et l’arrangez dans l’ordre du chapelet Aronson et l’étalez dans un ruban face en haut, vous verrez qu’il ressemble simplement à un jeu bien mélangé, aléatoire ; aucun groupement particulier de valeur ou de couleur ne saute aux yeux. La table 2 présente le même chapelet mais cette fois arrangé par couleurs et valeurs, vous verrez que la aussi il n’y à pas d’arrangement numérique particulier apparent.
TABLE 2
Le chapelet ARONSON (par cartes)
A lire :
– Memories are made of this. Edition Originale Droits d’auteur, 1999 Simon Aronson. Edition Révisée. Droits d’auteur 2002 Simon Aronson. Traduction Alain Issard 2009.
Crédits photos – Documents – Copyrights avec autorisation. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.