Voyez ce charmant petit automate ; à l’appel de son maître, il vient sur le seuil de sa porte, et fournisseur aussi poli que pâtissier habile, il salue et attend les commandes de sa clientèle. Des brioches chaudes et sortants du four, des gâteaux de toute espèce, des sirops, des liqueurs, des glaces, etc., sont aussitôt apportés par lui que commandés par les spectateurs, et quand il a satisfait à toutes les demandes, il aide son maître dans ses tours d’escamotage. Une dame, par exemple, ayant mis secrètement sa bague dans une petite boîte, qu’elle ferme à clef et qu’elle garde entre les mains, à l’instant même, le petit pâtissier lui apporte une brioche, dans laquelle se trouve la bague qui a disparu de la boite.
« Pour les consommateurs, allumant mes fourneaux ; Je fais des échaudes, des tartes, des gâteau ; Mes brioches surtout prouvent mon savoir faire par leur goût savoureux, leur fumet engageant. Goûtez-y donc : en les mangeant, Vous serez surs de n’en pas faire. » Robert-Houdin
Voici une autre preuve de son intelligence ; une pièce d’or lui est remise dans une petite corbeille par un spectateur, qui lui dit ce qu’il doit prendre sur cette pièce ; il s’enferme chez lui, fait son calcul, et rapporte en monnaie le reste de la somme. Enfin une loterie comique est tirée, et c’est encore le pâtissier qui est chargé de la distribution des lots. Aussi intéressante par sa complication que par la gaité qu’elle apporte parmi les spectateurs, cette pièce mécanique est une des plus belles, et sans doute des plus difficiles créations de Robert-Houdin.
Extrait du Bulletin de l’ami des arts, troisième année, troisième volume (1845).
Je laisse de côté toutes les surprises de cartes pour arriver au petit pâtissier de Louis XV. Que demandez-vous ? Une brioche ? Un vol au vent ? Une tarte aux amandes ou aux confitures ? Un verre d’anisette, de rhum ou de cognac ? Une brioche ! Soit ! Apportez ! Et, posée sur une table sans tapis, une charmante boutique de pâtissier ouvre ses portes et le pâtissier, le bonnet de coton sur l’oreille, vous apporte la brioche demandée. Mangez, elle est chaude, elle brûle ; un verre d’anisette ! Et la pâtissière se présente portant, un grand verre sur un plateau, et tour à tour, à l’appel des spectateurs, se succèdent les tartes et les verres de liqueurs. D’où cela sort-il ? Comment, dans cette boutique où ces pâtissiers travaillent avec tant ardeur, peut-on faire ce service aussi rapide et aussi exact ? C’est-ce que vous dira peut- être un autre ; quand à nous, nous y renonçons.
Ce n’est pas tout :
une tombola s’annonce, les trois premiers numéros gagnent successivement un objet de denrées coloniales , un sucrier d’argent et un dé
en or. Tâchez surtout de gagner le dé en or et défiez-vous des escamoteurs ! Les lots sont tour à tour apportés par le pâtissier à l’appel de son maître. Voulez-vous plus du petit automate ? Désirez-vous lui voir changer une pièce de monnaie ? Dites lui de prendre 17 francs sur 20 francs et il vous rapportera avec exactitude le reste de votre argent. Comment tout cela peut-il se faire ? Tout cela nous passe. Allez le voir, lecteur, peut-être serez-vous plus intelligent que nous. Mais, ce qui est certain, c’est qu’ayant compris ou non, vous sortirez de ce charmant théâtre entièrement satisfait.
Note de Didier Morax :
Le texte ci dessus est une découverte récente que j’ai faite. Mon ami Christian Fechner n’a jamais eu connaissance de ce document important qui donne une idée plus précise du tour. La tombola c’est un scoop, ainsi que son utilisation comme changeur de monnaie. On savait qu’il rendait la monnaie selon la somme donnée pour payer la friandise, mais le fait qu’il soit le précurseur des appareils de change était totalement inconnu.
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