Textes : Sophie Perez, Pacôme pour les deux premiers actes, et William Shakespeare. Mise en scène et scénographie : Sophie Perez. Costumes : Sophie Perez, Corine Petitpierre. Bande originale : Sophie Perez. Musique : Xavier Boussiron. Création lumière : Sophie Perez, Fabrice Combier. Création son : Félix Perdreau. Régie générale : Léo Garnier. Sculptures : Dan Mestanza, Adrien Castillo. Accessoires : Adrien Castillo. Construction décor : Daniel Mestanza, les Ateliers de la Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis, Marion Duvinage, Théo Jouffroy. Réalisation costumes : Anne Tesson. Création : juin 2023.
Les titres des spectacles de la compagnie Zerep fondée en 1998 ressemblent à ceux de bandes dessinées d’Edika : Purge Baby Purge, Biopigs, Broute Solo, Deux Masques et la plume… Avec cette libre adaptation de La très lamentable tragédie romaine de Titus Andronicus de William Shakespeare, la première pièce de l’auteur mythique, elle continue à brouiller les pistes…Le grand Will est ici qualifié de « trentenaire bisexuel, pas encore entré au panthéon du Théâtre avec œuvres philosophiques ». La comédienne Françoise Klein énumère les mises en scène anciennes qui ont marqué l’histoire de cette pièce et Stéphane, lui répond, « Mais ils n’étaient pas nés en 1959, on est pas à la Colline ou à l’Odéon ». Difficile de reconnaître ici la tragédie initiale ! Cet assemblage hétéroclite d’effets de théâtre amateur fait pourtant mouche auprès de certains spectateurs : les personnages vivent des meurtres d’enfants, des viols, du sang et des larmes. Et Sophie Pérez dénonce l’hypocrisie des bobos professionnels signant des pétitions dans leur propriété en Sologne et qui se retrouvent « en Avignon » à des cocktails à l’hôtel de la Mirande ! Sophie Perez fait même déclamer une vraie critique savante écrite par elle.
Des ratages en cascades font dire à une comédienne : « C’est toujours pareil en France mais comment vous allez faire avec les Jeux Olympiques ? » ou « Ce n’est pas compliqué : c’est Thomas Jolly qui s’en occupe, tout sera donc sous contrôle aseptisé. » Tout se mélange ici. On y danse, chante, hurle, on se maquille et change de costume à vue… Sophie Pérez utilise les artifices de feu le Grand Guignol, un théâtre de l’épouvante et du sang qui a connu son apogée dans la première partie du XXe siècle. La salle est l’actuel International Visual Theatre (IVT) dirigé par Emmanuelle Laborit et Jennifer Lesage-David. On y côtoie « le théâtre de nos Chattes » et un portrait de Samuel Beckett posé à l’avant-scène, une référence indispensable…
Cette pochade jubilatoire n’est pas du goût de tous. Mais les vieux amoureux du Footsbarn Travelling Theater ou du Théâtre de l’Unité trouveront quelques références de jeu dans cette mise en abyme et on pense aussi au film burlesque Hellzapoppin d’H.C. Potter (1941). « Ce carnaval de boucherie, cette vallée du grabuge » est remarquablement interprété par Sophie Lenoir, Stéphane Roger, Marlène Saldana, Gilles Gaston-Dreyfus, Françoise Klein, Erge Yu, Marie-Pierre Brébant, Adrien Castillo, Baptiste de Laubier, fidèles compagnons de route de la metteuse en scène. Cette pièce est salvatrice et nécessaire dans une époque trop bien-pensante. À voir donc et sans modération.
Article de Jean Couturier. Source : Théâtre du Blog. Crédits photos – Documents – Copyrights avec autorisation : Philippe Lebruman – Compagnie du Zerep. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.