Mise en scène et marionnettes : Laurie Cannac. Interprétation et chorégraphie : Andy Scott Ngoua. Musique originale : Adri Sergent. Création lumière et régie : Sébastien Choriol. Jeu en langue des signes projeté : Karine Feuillebois. Co-écriture du texte en langue des signes française : Igor Casas. Collaboration à l’écriture et direction d’acteur : Simon Attia. Vidéo : Fabien Guillermont. Costumes : Nelle Bosson. Slam et rap : Kôba Building. Son : François Olivier.
Un spectacle inspiré du Vilain petit canard sans doute le plus autobiographique des contes d’Andersen (1805-1875) ; il y raconte son enfance à Odense, les années d’études, l’intimité dans la famille Collin et une poule incarne madame Drewsen, la fille aînée. Ici, c’est une sorte de savante composition de théâtre d’ombres, images vidéo, hip hop, danse contemporaine occidentale et africaine, musique d’Adri Sergent à la guitare électrique et de Kôba Building, mais aussi et surtout de marionnettes comme on voit rarement. Laurie Cannac avec sa compagnie Graine de vie à Besançon, s’appuie sur la langue des signes, qu’elle utilise comme une expression artistique avec l’actrice sourde Karine Feuillebois, bilingue-français et langue des signes française. Depuis 1997, elle a été la conceptrice, la constructrice et l’interprète de L’Homme de la manche, Petits rêves faits main (2004) et Faim de loup (2009). Puis elle a fait une relecture du Petit Chaperon Rouge, mise en scène d’Ilka Schönbein. Et elle a créé Queue de Poissonne (2013), Blanche Ébène (2017), inspiré de Blanche Neige et JeveuxJeveuxJeveux ! (2021) d’après des contes de Grimm.
« Rejeté par sa communauté parce qu’il sort du lot, un enfant affronte des épreuves qui mettent sa vie en péril. Peu à peu, il déniche en lui la force de résister au malheur pour s’envoler vers son destin. (…) L’idée : partir de la langue des signes pour construire un langage visuel original incluant le jeu, la danse et la marionnette. Au début du spectacle, les signes de la mère interagissent avec le corps du danseur. Ses mains parlantes surdimensionnées par la projection, représentant la toute-puissance maternelle sur l’enfant, tantôt jouent avec lui, tantôt se jouent de lui, aimantes, puis façonnantes, et enfin violentes quand, sous la pression sociale, elle rejette son propre enfant. (…) C’est quand ce dernier fugue qu’un dialogue subtil s’établit entre l’image lointaine de la mère et son fils, exprimé par le dialogue entre graphisme de la langue maternelle et mouvements du danseur. Puis lorsque le petit canard se retrouve tout à fait esseulé, c’est lui qui reprend sa langue, dans une danse-signe expressive pour tout le public, sourd ou entendant. Tout au long du spectacle, la marionnette tantôt marionnettisera les signes, tantôt s’en inspirera, tantôt leur substituera son propre langage visuel. La nage, quant à elle, matière où le caneton excelle est représentée par la danse, car c’est cette passion en lui qui le fera renaître cygne. Il ne s’agit pas de traduire un texte écrit en langue des signes, mais d’élaborer une écriture visuelle, en collaboration étroite avec Karine Feuillebois et l’adaptateur Igor Casas. (…) Si lors de la fuite du caneton, l’image réduite et fantomatique de la mère raconte son point de vue en langue des signes, le texte oral est pris en charge par une voix d’homme à la première personne qui évolue graduellement du phrasé du conte à celui du slam, puis à celui du rap. (…) Tout en apportant une touche actuelle, il permet à la fois de dire le parcours intérieur du personnage en complément de l’histoire portée simultanément par la danse, les marionnettes et la langue des signes. »
C’est du moins ce que dit la note d’intention et si, comme nous, vous n’avez pas bien compris, pas grave… Et sur le plateau, les choses sont aussi moins nettes surtout au début, bref, ce mélange entre musique, danse, projections, marionnettes manque de lisibilité. Andy Scott Ngoua, danseur et chorégraphe gabonais, accompagné par Ari Sergent à la guitare, avec des mélodies à la fois traditionnelles et actuelles, a pourtant une belle présence. Et les marionnettes que manipule Laurie Cannac avec virtuosité, ont une beauté exceptionnelle et sont de véritables sculptures. Et elle crée des images souvent proches de la magie. Tout se passe ici comme dans un rêve ou un cauchemar ( à vous de choisir) et, encore une fois, même si le scénario n’est pas exemplaire, il suffit de se laisser entraîner par la vie de ce poème visuel, fait aussi de rumeurs de la campagne : aboiements de chiens dans le lointain, chants d’oiseaux et de poules… Laurie Cannac donne avec son corps tout entier, existence à ses marionnettes. Deux d’entre elles – fantastiques – l’une avec sa tête, et l’autre avec ses pieds. Et leurs têtes, un peu inquiétantes, font penser à celles, fascinantes, qu’avait créées le célèbre marionnettiste américain Robert Anton dans les années soixante-dix et comme ici, les histoires qu’il contait seul avec de minuscules poupées, se passaient du langage oral…
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