Il y a un excellent livre que vous devez absolument étudier si vous voulez développer votre créativité en tant que magicien : Fondations de l’allemand Eberhard Riese*.
J’aimerais attirer votre attention sur votre capacité à changer de point de vue. Le grand mal de la magie actuelle, c’est que ses représentants, les magiciens, sont une poignée à innover. 90% des illusionnistes se contentent d’acheter bêtement des « routines » prêtes à l’emploi et de les présenter telles quelles sans aucun apport créatif. Sans changer de point de vue.
Ainsi, à la TV, dans différentes émissions, j’ai pu voir les mêmes numéros présentés par différents magiciens.
Le premier, c’est ce tour où on cache une pique sous un gobelet parmi d’autres gobelets mélangés. Une sorte de roulette russe « mentale ». C’est sûr, ça fonctionne très bien devant le public. Mais pour autant, n’y a-t-il pas une ou plusieurs idées à creuser ? Chez Drucker, le jeune magicien Rémi Larrousse le présente pieds nus : il écrase les gobelets avec ses pieds. Il fallait y penser, mais ça donne une dimension originale à l’effet. Si seulement il avait remplacé la pique par des morceaux de verre ou tout autre objet coupant, il aurait eu une illusion sortant de l’ordinaire…
Tout aussi récemment, qui n’a pas vu Kamel le magicien, Eric Antoine et un américain « mentaliste » présenter cette incroyable prédiction enfermée dans un coffre bien en vue depuis le début de l’expérience ? Là encore : même matériel, même effet, même présentation. Seul le magicien change. Et après on s’étonne pourquoi on se rappelle des tours et pas des prestidigitateurs : c’est, à ce niveau là, scientifique, car on retient principalement les informations qu’on a vues plusieurs fois. Ici, en l’occurrence, les tours de magie !
Dès lors qu’un magicien passe professionnel, ou prétend l’être, il doit rapidement se constituer son propre répertoire. Et résister à la tentation de s’enfermer dans des tours « tout fait » que n’importe quel spectateur pourra refaire s’il a la bonne idée d’aller sur Internet pour le voir où l’acheter.
Un répertoire se constitue avec le temps. On peut partir d’une idée, d’un effet classique et faire mûrir l’ensemble. Personnellement, je pars plutôt de classiques que j’essaye de présenter différemment. J’ai dans mon répertoire des tours très personnels. Souvent, ils sont le résultat d’une adaptation de tours que j’ai suffisamment travaillé pour me les approprier.
Comment viennent les idées ? A mon avis, une première réponse est évidente : des lectures. Les magiciens génération DVD se privent d’une source de réflexion qui ne se trouve que dans les écrits : les livres, et les revues. Il n’est pas toujours évident de comprendre la description d’un tour. Mais, tout en lisant, il est très fréquent qu’une nouvelle idée germe. On se dit « et si… » et on trouve une solution, ou une piste.
Un bon conseil ! Soyez exigeant : ne copiez pas, même si vous adorez. Reprenez des idées, mais adaptez-les. Surtout, assurez-vous que ce que vous faites soit différent, ou paraisse différent. La présentation peut être une première piste. Le personnage et l’univers aussi. Mais autant que possible, personnalisez votre matériel, transformez-le au besoin. Et ne suivez pas à la lettre le mode d’emploi d’un tour que vous avez acheté.
– Source : Club de Magie.
* Eberhard Riese est le mentor des magiciens de Stuttgard, ceux qui ont raflé de nombreux prix aux concours internationaux de la FISM.
« Monter, seul, un numéro de magie et se présenter à un concours appartient désormais au passé, voir à l’Antiquité. Voici les points essentiels d’un système qui a fait ses preuves. Nous formons une équipe de brainstorming (remue méninges). Cette équipe se compose idéalement de cinq personnes. Chaque participant est au même niveau. L’ambiance est démocratique. On bannit les réactions négatives et on garde uniquement les aspects positifs. On ne va pas contre les idées des autres. L’équipe pense 24h/24 à la magie et cherche l’inspiration dans tout ce qu’elle voit. Elle écrit toutes les idées qui lui viennent ».
Voici un exemple de liste pour puiser des idées :
– Vieux catalogues et vieux livres de magie.
– Décorations de boutiques.
– Catalogues de vente par correspondance.
– Magazines grand public.
– Magasins de jouets.
– Musique.
– Exposition d’art moderne.
– Pièces de théâtre, contes.
– Comics, clips, spots de télévision.
– Films et thème de ces films.
Riese définit six thèmes qui gravitent autour d’un point central défini sous le terme de « Magie-état » :
– La musique
– La décoration
– Les objets et accessoires
– Le personnage/Caractère
– Les costumes
– Le Plot/focus
A lire :
– Fondations de Eberhard Riese (Editions Magicdream, 2008).
– Etre créatif en magie par Jörg Willich.
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