Un des aspects les plus fascinants de l’art magique, c’est le comportemental que l’artiste développe progressivement, à mesure qu’il pratique.
Les magiciens sont les maîtres du mensonge. Surtout, ils possèdent cette capacité à maîtriser leur langage corporel.
Prenez n’importe quelle personne : en situation de mensonge, il y aura toujours un truc qui la trahira. Le ton de sa voix, son débit peut-être, sa gestuelle, la façon dont elle vous regardera. Instinctivement, on sait tous plus ou moins quand quelqu’un ment. D’ailleurs, des études très sérieuses ont montré que c’est surtout ce qu’on dit qui est le plus suspect quand on ment. En fait, un menteur, une menteuse, aura tendance a donné des détails, beaucoup de détails, à justifier ou se justifier… alors que, dans une attitude plus normale, quelqu’un qui dit la vérité ne cherche pas forcément à détailler, à convaincre.
Dans tous les cas, l’art de la prestidigitation repose sur votre capacité à maîtriser vos attitudes. Notamment celle à faire preuve de relâchement et de détachement.
La plupart des jeunes magiciens connaissent bien ce problème : au moment de faire une passe, une manipulation, l’instant devient critique. L’attention des spectateurs, l’enjeu de cette manipulation sur la finalité du tour : tout est prétexte à créer une certaine pression sur l’artiste qui, s’il n’est pas sûr de lui, rate soit le tour, soit le détournement d’attention.
En tant que magicien ou apprenti magicien, il est donc nécessaire de travailler sur la répétition d’un effet, d’un numéro, encore et encore avant de le présenter en public.
C’est un peu comme quand vous conduisez : vous n’êtes pas en train de vous demander, au moment de freiner, si oui ou non vous devez appuyer sur la pédale de frein. Non, vous êtes en mode automatique. En magie, vous devez atteindre le même niveau de perfection.
Vous devez donc, dans un premier temps, vous assurer que vous maîtrisez parfaitement vos numéros. Ensuite, essayez toujours d’avoir plusieurs sorties. Pourquoi ? Parce qu’à aucun moment dans votre show, vous ne devez montrer le moindre trouble.
En effet, il arrive parfois que le tour ne se déroule pas comme prévu. Si, comme je l’ai parfois vu, au moment où vous « ratez », vous affichez la mine des mauvais jours, que vous vous trahissez en perdant vos moyens, que vous bafouillez par exemple, que vos mains deviennent moites, que vous tremblez : vous perdez votre public et votre crédibilité. L’impact du tour sera évidemment moindre.
Vous devez donc avoir un temps d’avance, « une carte dans votre manche » pour vous sortir de tout mauvais pas. Dominique, le pickpocket, nous racontait une anecdote il y a quelque temps. Dans son show, une fois, une personne était censée se lever dans la salle lors du tour des chaises électriques (je précise que Dominique présentait ce numéro avec des chaises normales, il parvenait à rendre complice les spectateurs sur scène). Un jour, il se trompe d’endroit dans la salle mais continue comme si tout était normal : la personne en question était de l’autre côté, dans le noir pour le coup.
Travaillez donc énormément sur le détachement : ne montrez jamais vos troubles, ne laissez jamais transparaître les moments critiques, faites toujours comme si de rien n’était : au final, vous verrez, vous deviendrez maître dans l’art de mystifier votre entourage.
Source : Club de Magie. Crédits photos – Documents – Copyrights avec autorisation. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants droit, et dans ce cas seraient retirés.