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PETROUCHKA de STRAVINSKY

Sébastien Bazou

Petrouchka est la première grande oeuvre composée d’Igor Stravinsky hors de Russie en 1910 et 1911. Elle a été réalisée entre L’oiseau de Feu et Le sacre du Printemps. C’est un Ballet illustré en quatre tableaux qui fut créé au Châtelet à Paris par les Ballets Russes de Diaghilev, avec Nijinsky dans le rôle de Petrouchka.

L’histoire

La scène se passe dans les années 1830 à Saint-Petersbourg au cours de
la semaine grasse (semaine de fête populaire proche de notre Mardi-gras). La
foire bat son plein. Les gens se bousculent. Il règne une ambiance de fête. Toutes
sortes de personnages se croisent : des hommes ivres, des marchands ambulants,
un joueur d’orgue de Barbarie, des cochers qui dansent avec des nourrices,
un montreur d’ours. Un vieux Charlatan à l’aspect oriental crée trois poupées
animées : Petrouchka, la Ballerine et le Maure. Par sa magie, il leur a communiqué
tous les sentiments et les passions humaines. C’est ainsi que le malheureux
Petrouchka, amoureux de la Ballerine, est évincé par le Maure, personnage bête et
méchant, mais dont l’apparence somptueuse a su séduire la belle danseuse…

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Tamara Karsavina (la Ballerine), Vaslav Nijinsky (Pétrouchka), Alexandre Orlov (le Maure), Enrico Cecchetti (le Magicien).

Petrouchka est un conte folklorique qui raconte l’histoire d’une poupée dont le corps n’est composé que d’un sac de sciure bourré de paille, mais qui est doté de vie et d’amour.
Il est aux Russes ce que Pinocchio est aux Italiens. Cette poupée renvoie à l’illustration d’une passion réelle, qui l’incite à vivre une vie humaine impossible pour lui. Ses déplacements, parfois saccadés et maladroits, illustrent la douleur des émotions humaines enfermées dans un corps de tissu. Les trois personnages principaux constituent le Trio éternel de la Comédie comme dans la Commedia dell’Arte (Pierrot, Colombine et Arlequin) ou le drame bourgeois (le mari, la femme et l’amant).

Le ballet

La première représentation du ballet eut lieu à Paris, au Théâtre du Châtelet, le 13 juin 1911. Bien que la pièce fût un succès, plus d’une critique fut sévère envers l’œuvre du compositeur, qualifiée de musique fragile et ridicule. Quand Diaghilev et sa troupe partirent en tournée pour Vienne, en 1913, l’orchestre résidant refusa de jouer la partition, de prime abord, qualifiant la musique de Petrouchka de schmutzige Musik (musique sale).

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le compositeur Igor Stravinsky et le danseur Vaslav Nijinsky.

La musique

Sur le plan musical, l’œuvre est caractérisée par l’« accord Petrouchka » : il est composé de deux tierces augmentées, renfermant le terrible « triton » (écart de trois tons entre deux notes, tel qu’entre do et fa dièse, écart de notes très redouté dans la musique précédant Stravinsky, désigné comme la marque du Diable au Moyen Âge). Cet accord est caractéristique du personnage principal, il est joué à sa venue, illustrant tout son caractère de malaise et de surnaturel. Stravinsky affectionnait cette structure harmonique tel que, parmi d’autres, l’intervalle diminué ou l’utilisation d’une échelle de 8 tons, au lieu de 12.

L’œuvre est composée pour un très grand orchestre, dont les Bois se groupent par 5. (4 flûtes, 2 piccolos, 4 hautbois, cor anglais, 4 bassons, contrebasson, 4 cors, 2 trompettes, trompette piccolo, 2 cornets, 3 trombones, tuba, percussion, timbales, piano, célesta, 2 harpes, 18 premiers violons et 16 seconds violons, 14 altos, 12 violoncelles et 10 contrebasses. Le Piano y joue un rôle prépondérant. L’œuvre dure 34 minutes.

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Stravinsky dit avoir eu la vision d’un pantin subitement déchaîné qui, par ses cascades d’arpèges diaboliques, exaspère la patience de l’orchestre, qui lui répond par des fanfares menaçantes. Il s’ensuit une terrible bagarre qui se termine par l’affaissement douloureux et plaintif du pauvre pantin. Petrouchka est l’éternel héros malheureux de toutes les foires.

Stravinsky stylise et réhabilite ce que l’on avait coutume de considérer comme la vulgarité. C’est dans cet esprit que l’accordéon deviendra, ainsi que l’orgue de Barbarie un des thèmes fondamentaux de Petrouchka. Martèlements rythmiques entêtés, orchestration acide et grimaçante, citations parodiques faussement débonnaires (comme la chanson « elle avait une jambe de bois »). Six ans avant le scandale de Parade de Satie et Cocteau, Stravinsky chamboule l’univers compassé du classique, y introduisant la naïveté fantasque du cirque et l’ivresse goguenarde des fêtes foraines.

Le noyau de Petrouchka est resté le « Konzertstück » (il constitue le 2ème tableau du ballet : chez Petrouchka). Son expressivité tient à une bitonalité (do et fa dièse) rendant compte de la nature double de Petrouchka : à la fois marionnette et cœur humain.

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Le rythme, dans Petrouchka, est un élément primordial, bien qu’encore fortement dépendant de la hiérarchie harmonique et mélodique même s’il tend, ici et là, à s’en émanciper. Stravinsky développe systématiquement les procédés de la métrique variable (inaugurée dans l’Oiseau de Feu) engendrant constamment la surprise par le déplacement des temps et des accents. Il procède quelquefois par superpositions de strates de durées différenciées, mais en restant asservi aux « polymélodies » instrumentales, sans constituer encore les structures polyrythmiques dont le Sacre fera état. Enfin, il est fortement lié à la rythmique populaire. C’est au niveau de la forme qu’il se manifeste de la façon la plus remarquable, et la plus efficace, par la juxtaposition des séquences rythmiques, de « plaques de temps » fortement caractérisées.

Stravinsky s’affirme à lui seul comme le nouvel « avatar de la musique Russe ». Petrouchka répartit sa substance dramatique selon une trajectoire quasi Beethovénienne : Allegro, Andante, Allegro, Adagio. Cette pièce continue à faire frémir le spectateur par le sujet tragique de l’histoire, le début d’une musique torturée, aux harmonies très dissonantes au service de l’illustration de sentiments humains, et du comportement des hommes, quelles qu’en soient les motivations.

SYNOPSIS

Premier tableau

La grande fête populaire de la Semaine Grasse (maslenitsa en russe) à Saint Petersbourg, vers 1830 (c’est une réunion populaire où règnent la joie et l’amusement quelques jours avant un recueillement pieux) : un petit théâtre de marionnettes. Grâce à un étonnant tour de passe-passe, le charlatan-magicien anime les trois poupées : Petrouchka, la ballerine et le Maure.

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L’orchestration et les rythmes aux changements rapides illustrent parfaitement la hâte et les mouvements de la fête. Une « rectifieuse d’organe » et une danseuse amusent la foule. Les tambours annoncent l’arrivée d’un vieux mage, qui capte l’attention de tout le monde. Le rideau s’ouvre alors pour laisser apparaître la curiosité, accompagnée de trois poupées : Petrouchka, la ballerine et le Maure. Le vieux mage joue de la flûte pour user de son pouvoir magique. Il donne vie aux trois poupées, qui se mettent à s’animer et s’agitent en une danse russe, devant la foule ébahie.

Deuxième tableau

Dans la chambre de Petrouchka. Le charlatan-magicien a donné à ses marionnettes des sentiments humains. Petrouchka est désespéré par son aspect hideux incompatible avec son amour pour la ballerine. Il tente de se suicider.

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Irina Baronov dans le rôle de la Ballerine.

Les murs chez Petrouchka sont très sombres, décorés de quelques étoiles, d’une lune en croissant, et d’un portrait du vieux mage fronçant les sourcils. La poupée attend devant sa chambre, mais un bruit fracassant annonce l’arrivée de son maître qui la projette d’un coup de pied dans sa cellule. Petrouchka mène une vie morne et solitaire derrière ses barreaux. Son seul réconfort, il le trouve dans l’amour qu’il porte pour la poupée ballerine. Le portrait du vieux mage suffit à lui seul à rappeler à Petrouchka qu’il n’est qu’une marionnette et qu’il se doit de rester docile et humble. Même si Petrouchka n’est qu’une marionnette, il n’en a pas moins des sentiments humains, comprenant aussi bien l’amour qu’il porte pour la ballerine que l’amertume envers le vieux mage. La ballerine entre en scène et Petrouchka tente de lui révéler son amour, mais il est aussitôt rejeté par elle, qui qualifie tout cela de pathétique. Elle préfère la frivolité avec le Maure, ce qui anéantit le passionné Petrouchka.

Troisième tableau

Dans la chambre du Maure. Scène d’amour entre le Maure et la ballerine, interrompue par l’arrivée soudaine de Petrouchka qui est jaloux. Le Maure le met dehors.

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Nijinsky dans le rôle de Petrouchka.

Le Maure vit dans une chambre gaie, décorée de toutes parts. Installé dans son salon, il joue avec une noix de coco. Les couleurs qui émanent de la pièce inspirent la joie et la fête, le rouge, le vert et le bleu. Le Maure préfère la joie de sa chambre plutôt que d’aller consoler le pauvre Petrouchka. C’est alors que la ballerine est placée dans la chambre du Maure par le magicien, et elle entame une danse chatoyante dans le but de séduire le Maure, qui la rejoint dans sa danse. Petrouchka broyant du noir dans sa cellule est emporté dans celle du Maure par le mage, pour interrompre la séduction de la ballerine. Petrouchka se met alors à attaquer le Maure, mais il réalise qu’il est trop petit et bien trop faible pour faire face à son rival. Il finit par se faire chasser par le Maure.

Quatrième tableau

Le soir, la fête populaire continue. Petrouchka est suivi par le Maure qui le tue. Il meurt au milieu de la foule. La ballerine et le Maure ont disparu. Le charlatan-magicien rassure la foule et rappelle que ce n’était qu’un pantin. La foule se disperse et le fantôme de Petrouchka apparaît.

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Pendant la fête du mardi gras, où une série de scènes apparaissent puis disparaissent rapidement. L’orchestre se transforme en véritable fanfare, jouant une suite de danses. Arrive ensuite un paysan et son ours dansant, suivis d’un marchand, de Bohémiens et de personnalités diverses. Après que la foule et la fête s’installent, un cri surgit du stand de marionnette. Le Maure poursuit Petrouchka avec une hache et le tue. Le Maure devient alors la métaphore de l’indifférence face aux sentiments humains. La police questionne alors le vieux mage, qui cherche à calmer l’ardeur de la foule consternée, en secouant les restes de paille et de sciure de Petrouchka, pour rappeler à tout le monde que ce n’était qu’une poupée sans âme, à la tête de bois. La nuit tombe et la foule se disperse, tandis que le mage s’en va, emportant avec lui le corps mou de Petrouchka.

Une fois la place vide, le vieux mage aperçoit avec frayeur le fantôme de Petrouchka (ou son âme, l’âme du peuple Russe), le narguer au-dessus de sa baraque, et s’enfuit apeuré. Petrouchka s’effondre alors, se balançant dans le vide, sans vie. La scène se termine et laisse le spectateur juger de ce qui fut réel ou non. Selon Pierre Boulez, le tour de passe-passe final, l’apparition de la marionnette au-dessus du castelet, résume l’énigme Stravinsky, « ce mélange insolite d’agressivité et de poésie, de familiarité et de candeur, de bonne humeur et de mélancolie ».

Crédit photo : Bettman Corbis. Tous les documents et archives sont proposés sauf avis contraire des ayants-droit, et dans ce cas seraient retirés.

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Classé sous :MUSIQUE

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